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Alain de Benoist en 14 points

Alain de Benoist est un des plus grands intellectuels Francais, également co-fondateur du GRECE (le principal vecteur du courant Nouvelle Droite). Observateur lucide et éclairé, celui ci a accepté de répondre aux questions de Alexandre Latsa, pour DISSONANCE.


1) Alain de Benoist bonjour, et merci d’accepter de répondre aux questions de DISSONANCE, pourriez vous synthétiser votre parcours très varié au sein de la scène intellectuelle et philosophique Francaise ? 
On ne résume pas en quelques lignes un itinéraire intellectuel d’un demi-siècle. Je suis écrivain, journaliste, philosophe aussi. J’ai beaucoup publié, en France comme à l’étranger. Je dirige également deux revues que j’ai créées, l’une (Nouvelle Ecole) en 1968, l’autre (Krisis) en 1988. Mes domaines de prédilection sont l’histoire des idées et la philosophie politique. Je n’appartiens à aucun parti ou mouvement politique, et ne souhaite appartenir à aucun. Dans l’époque de transition qui constitue notre actuel horizon, j’essaie de tenir le mieux possible le rôle que tout intellectuel digne de ce nom devrait s’assigner : mieux comprendre et faire comprendre le monde où nous vivons. 


2) Quelle est votre vision de la scène politique francaise actuelle, Thierry Meyssan disait récemment dans une interview que “Sarkosy n’était ni de droite, ni de gauche mais voulait faire comme les Yankees“. Pensez vous que l’avenir politique des sociales démocraties Européennes soit sur le modèle Américain à savoir “deux candidats élus par des primaires (illusion de démocratie) et qui au global défendent les mêmes idées” ? 
Que les candidats qui se présentent aux élections soient ou non désignés d’abord dans des « primaires » est à mon avis un détail complètement sans intérêt. La scène politique française actuelle, comme la plupart des scènes politiques occidentales, est une scène pré-codée. Cela signifie que seuls ont la possibilité d’accéder au pouvoir ceux dont on sait par avance qu’ils n’ont nullement l’intention de changer (ou de tenter de changer) les fondements d’une société aujourd’hui dominée de part en part par l’idéologie de la marchandise. De ce point de vue, il n’y a plus aujourd’hui d’alternative. L’alternative a été remplacée par l’alternance, avec pour conséquence une déception permanente des masses populaires, une crise généralisée de la représentation et un fossé qui ne cesse de se creuser entre le peuple et la Nouvelle Classe politico-médiatique.



3) Vous avez une bonne connaissance politique, je voudrais soulever le point des extrêmes dans notre pays : on a souvent l’impression que le FN n’était qu’une bouée (pour une grande majorité d’électeurs frustrés) qui faisait tout le temps “le grand écart” (absence de programme économique claire, prises de positions géopolitiques contradictoires, incapacités de bien gérer des mairies etc etc..) mais maintenu soudé et en position de force par son président, Jean Marie Le Pen. Alors que de nouvelles lignes politiques se dessinent à l’intérieur de même de cette mouvance nationale (Soral qui joue sur un souverainisme beu blanc rouge et sur l’anti-sionisme, ou les identitaires bien au contraire anti jacobins et régio-européens) … Comment envisagez vous l’après Le Pen ?
L’extrême gauche également semble en reformation, après l’effondrement du PC et la non percée des LCR, PT et LO et la naissance du NRA sponsorisé par Drucker … On dirait que cette mouvance est totalement incapable d’emprunter le boulevard qui pourtant s’offre à elle (précarisation sociale, la crise financière etc etc). Est ce que ces deux “non évenements” ne seraient pas liés et finalement une “preuve” de l’absence totale d’opposition au “système” (les partis libéraux de l’établissement) ? 

Le Front national a obtenu certains succès dans le passé grâce à l’addition de deux électorats assez différents : un électorat populaire, principalement ouvrier, et un électorat provenant des couches moyennes et inférieurs des classes moyennes et de la petite-bourgeoisie. Ce deuxième électorat l’a abandonné lors de l’élection présidentielle de 2007 pour se rallier à Nicolas Sarkozy. Il est aujourd’hui déçu, mais cela ne le pousse pas à revenir au FN. Ce dernier, de son côté, n’a jamais tiré la leçon de son succès auprès des classes populaires. Les ouvriers sont remarquablement absents de ses instances dirigeantes. L’usure du parti, sa banalisation dans le paysage politique, l’âge de son chef, ses divisions incessantes, expliquent sa stagnation actuelle. L’après-Le Pen a toutes chances de voir le FN se couper définitivement en deux, avant d’être de plus en plus marginalisé.

L’extrême gauche bénéficie, dans un contexte de crise sociale aggravée, de l’espace que lui ont ouvert le ralliement du parti socialiste à la société de marché et la social-démocratisation du PC, qui n’est plus aujourd’hui qu’un fantôme. Même dans ce contexte, pourtant, elle ne marque pas autant de points qu’elle le devrait. La raison principale en est que le peuple ne se reconnaît pas dans ses prises de position. La gauche radicale, en particulier, se garde bien de reprocher au patronat de faire des immigrés un armée de réserve du capital, permettant de peser à la baisse sur les salaires des autochtones. C’est la raison pour laquelle Olivier Besancenot, pour ne citer que lui, connaît un succès médiatique qui ne se vérifie pas dans les urnes. Le pouvoir place utilise par ailleurs Besancenot et ses amis pour diviser la gauche, de la même façon que François Mitterrand avait utilisé le Front national pour diviser la droite. On en revient donc toujours au même constat : le peuple ne dispose aujourd’hui d’aucun parti dans lequel il puisse se reconnaître. 
 
4) Nous parlions de la gauche et de la droite radicale, qui empruntent souvent à la réthorique anti-européenne ou souverainiste. Ce mot à t’il un sens à l’heure de la mondialisation ? La France a t’elle une chance de survivre (démographiquement, culturellement, économiquement) sans l’Europe ? Quelle est l’avenir des nations Européenne d’après vous ? 
Les souverainistes sont des gens très sympathiques, dont je partage certaines positions (vis-à-vis des Etats-Unis d’Amérique ou de la bureaucratie bruxelloise, par exemple), mais ils n’ont pas encore saisi que nous avons changé d’époque. L’Etat-nation, qui avait été la forme politique privilégiée à l’époque de la modernité, est entré désormais dans une crise irréversible. Il est aujourd’hui dépassé par le haut (par la montée des emprises planétaires) comme par le bas (par l’émergence des réseaux et de communautés, le localisme, les exigences quotidiennes des citoyens). L’avenir n’est plus aux Etats nationaux, mais aux grands ensembles continentaux, aux creusets de culture et de civilisation, seuls capables de réguler la mondialisation et de constituer des pôles actifs dans un monde multipolaire. 
 
5) Nous assistons aujourd’hui dans le monde à une sorte de renaissance de grands espaces en Asie (Chine, Inde), dans le monde musulman (Turquie, union panafricaine ..), en Eurasie (Russie ..), en Amerique du sud (Brésil, Vénézuela ..). Le corrollaire de cette renaissance est l’affaiblissement de l’empire Américain. Comment imaginez vous la suite des évenements (dans la prochaine décennie ?). Pensez vous comme certains qu’il y ait un risque de fuite en avant (guerres déclenchées) ou au contraire que nous ne soyions qu’au début d’un processus quasi inévitable : le monde multipolaire (chaotique ou pas ?). 
La grande question est en effet de savoir aujourd’hui si nous nous dirigeons vers un monde unipolaire, qui serait dominé par l’hyperpuissance américaine, ou vers un monde multipolaire, un pluri-versum, articulé, comme je viens de le dire, autour de quelques grands blocs de civilisation. Je crois pour ma part que nous nous dirigeons, fort heureusement, vers un monde multipolaire où les pays émergents, comme l’Inde, la Chine et le Brésil, joueront un rôle de plus en plus important. Un tel monde sera nécessairement instable, car aucun ordre général des choses – aucun « Nomos de la Terre » – ne reste jamais figé. Les lois de la géopolitique déterminent très bien les lignes de fracture et les enjeux. Le grand affrontement est celui qui oppose, structurellement pourrait-on dire, la puissance des Mers (les Etats-Unis) et la puissance de la Terre (le continent eurasiatique). Dans une telle perspective, la Russie joue un rôle tout particulier, car elle correspond à ce que les géopoliticiens appellent le Heartland, c’est-à-dire le cœur même du continent eurasiatique.
 
6) Paradoxalement à cette renaissance des espaces, l’europe semble incapable d’unité politique, tant les dissensions semblent fortes entre ce que Alexandre Douguine décrivait dans ce blog comme une opposition entre la “vieille Europe” (continentale ?) et la “nouvelle Europe” (atlantiste ?). Comment l’expliquez vous ?
L’impuissance de l’Union européenne ne s’explique pas seulement par l’opposition que vous décrivez, même si celle-ci est bien réelle. Partisan de la construction européenne, je n’en constate pas moins que l’Europe, depuis le début, s’est bâtie en dépit du bon sens. Elle a donné d’emblée la priorité au commerce et à la finance au lieu de la donner à la politique et à la culture. Elle s’est édifiée sans légitimité démocratique – sans que les peuples soient consultés – et à partir du haut (la Commission de Bruxelles, qui s’est autoproclamée omnicompétente) au lieu de se bâtir à partir du bas, dans le respect du principe de subsidiarité (ou de compétence suffisante). Au lieu de chercher à approfondir ses structures politiques, elle a préféré s’élargir hâtivement et inconsidérément à des pays qui n’étaient soucieux que de bénéficier des largesses monétaires de l’Union et de se placer sous le parapluie américain en adhérant à l’OTAN. Enfin, elle n’a jamais clairement posé la question de ses finalités. S’agit-il de faire de l’Europe un grand marché aux frontières floues, appelé à s’intégrer dans une vaste zone de libre-échange euratlantique, ou au contraire de bâtir une Europe-puissance véritablement autonome, dont les frontières seraient strictement déterminées par la géopolitique ? Il est évident que ces deux finalités sont totalement opposées. 
 
7) Des voix se font entendre (mouvances d’extrême gauche, divers intellectuels Gaullistes ..) pour que la France intègre l’organisation de la coopération de Shanghai. Vous qui avez vivement critiqué le retour de la France dans le commandement armé de l’OTAN, quelle est votre opinion à ce sujet ? 
Je n’ai pas d’opinion arrêtée sur ce point. L’OTAN était une organisation défensive créée dans le contexte de la guerre froide. N’ayant plus de raison d’être après l’effondrement du système soviétique, elle aurait du disparaître en même temps que le Pacte de Varsovie. Au lieu de cela, cette organisation totalement contrôlée par les Etats-Unis s’est redéployée comme une sorte de club occidental américanocentré, ayant vocation à intervenir n’importe où dans le monde. Dans un pareil contexte, la décision de la France de réintégrer les structures intégrées de l’OTAN, d’où le général de Gaulle l’avait fait sortir en 1966, est plus qu’une faute : c’est à la fois une trahison ou un crime. De ce fait, en tout cas, sa participation à l’Organisation de la coopération de Shanghai n’est plus rien qu’une hypothèse d’école. La question, en outre, est de savoir si le groupe de Shanghai a une vocation purement régionale ou plus vaste. Mon souhait serait plutôt de voir se constituer, dans un premier temps tout au moins, une organisation européenne de la défense digne de ce nom et qui serait entièrement indépendante de l’OTAN. Mais pour l’instant, ce ne peut être qu’un vœu pieux. 
 
8) A l’heure de la crise financière, tout le monde s’accorde à dire que “peut être” que la globalisation libérale à “échoué”, et que le modèle Occidental pour l’humanité n’est peut être pas le “meilleur”. D’après vous “d’ou” viendront les nouveaux modèles civilisationnels, philosophiques et économiques ? 
La crise financière mondiale déclenchée aux Etats-Unis à l’automne 2008 a sans doute ouvert les yeux d’un certain nombre. Mais cette crise, qui est loin d’être terminée, ne suffira probablement pas à faire émerger un système alternatif. Les nouveaux modèles apparaîtront lorsque le système actuel sera véritablement à bout de souffle, sans que l’on puisse savoir quelles formes spécifiques ils revêtiront. Même si les choses peuvent aller assez vite, il y a encore beaucoup à faire pour « décoloniser » les esprits, tant nos contemporains ont pris l’habitude de vivre dans le système de la marchandise, gouverné par la dialectique de l’avoir. Toute la modernité a été portée par l’idéologie du progrès, les réserves naturelles ayant été considérées comme à la fois gratuites et inépuisables, alors qu’elles n’étaient ni l’un l’autre. La vérité est qu’une croissance matérielle infinie est impossible dans un monde fini. Lorsqu’on s’en apercevra pleinement, on commencera peut-être à sortir de l’obsession économique et de cette idéologie utilitariste qui a été l’un des principaux corollaires de l’universalisme occidental (lequel, comme tout universalisme, n’est jamais qu’un paravent de l’ethnocentrisme). 
 
9) Vous êtes très présent sur la scène géopolitique et notamment auprès du mouvement Eurasien de Alexandre DOUGUINE dont le programme politique généralement peu connu est détaillé sur ce blog. Celui ci est assez élogieux à votre égard. Pouvez nous nous en parler ? Qu’est ce que vous pensez que l’Eurasisme puisse apporter à l’Europe et à la France ? 
J’éprouve de l’amitié et de l’admiration pour Alexandre Douguine, pour sa culture, son courage, sa capacité de travail, l’ampleur de son œuvre et la grande continuité de ses efforts. On lui doit d’avoir actualisé la pensée des premiers Eurasistes et d’avoir montré l’actualité de cette pensée aujourd’hui. Il a su aussi mettre en rapport, pour en faire une synthèse suggestive, des acquis idéologiques parfois différents. Il a donné à la géopolitique une dimension spirituelle qui lui manquait. Je suis son travail avec beaucoup d’attention. Quant à l’eurasisme, il peut apporter beaucoup, non seulement à l’Europe et à la France, mais aussi aux habitants des autres continents, si l’on considère qu’au-delà de la seule Eurasie géographique, il permet d’envisager un nouveau « Nomos de la terre » ordonné à l’idée de diversité, d’autonomie des peuples, de démocratie participative et de primat des valeurs non marchandes. 
 

10)
Pour les Français et les Européens, les grandes inquiétudes du futur sont le plausible leadership économique Chinois et l’explosion démographique des populations musulmanes, notamment à l’intérieur de l’Europe. Comment estimez vous compatible / incompatible ces deux éléments ?
La Chine est de toute évidence appelée à jouer un rôle de premier plan au XXIe siècle, mais il est encore trop tôt pour dire qu’elle exercera un véritable « leadership économique ». La Chine inscrit traditionnellement son action dans la longue durée. Son modèle n’est pas exempt de contradictions, et elle doit aussi faire face à de nombreuses difficultés intérieures (ne serait-ce que la disparité de ses régions et de ses milieux sociaux). Sur le plan géostratégique, je souhaite la voir s’associer au continent eurasiatique, mais je n’ignore pas sa tendance naturelle à l’autocentrage. Vis-à-vis des Etats-Unis, par ailleurs, elle semble aujourd’hui hésiter entre plusieurs attitudes possibles. Quant à l’explosion démographique des populations musulmanes, c’est un fait réel, mais qu’il ne faut pas non plus surévaluer. En Europe, au bout d’une ou deux générations, les immigrés adoptent les comportements démographiques locaux. A l’exception de l’Afrique noire et de la zone indo-pakistanaise, la croissance démographique se ralentit d’ailleurs un peu partout. Le vrai problème tient plutôt à la dénatalité des pays européens, qui crée un appel d’air et se traduit par un vieillissement de la population. 

11)
Vous avez longtemps été un des fers de lance du GRECE, qu’en est il aujourd’hui ? 
Le Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (GRECE) est une association culturelle créée en 1969. J’ai participé régulièrement à ses activités, mais n’y ai jamais occupé de rôle dirigeant. Cette association continue aujourd’hui son travail, en liaison avec de nombreux universitaires et intellectuels européens. 
 
12) Question science fiction 🙂 : comment imaginez vous l’avenir du continent (europe et russie) en .. disons 2020 ? 
Je ne fait pas métier de prédire l’avenir, et je n’ai aucune imagination pour savoir où en seront l’Europe et la Russie en 2020. L’histoire est toujours ouverte, ce qui ne signifie d’ailleurs pas que tout est toujours possible. Bien entendu, il est toujours possible de faire des scénarios, mais la difficulté commence lorsque l’on veut leur attribuer un coefficient de probabilité. 
 
13) Le 24 mars dernier, c’était l’anniversaire des bombardements de 1999 sur la Serbie. Depuis 1 an, le Kosovo “serait” un état indépendant… Que vous inspire ces évènements et d’après vous quel est l’avenir du Kosovo ?
L’anniversaire des bombardements de 1999 sur la Serbie éveille en moi le souvenir d’une grande colère et d’une affreuse humiliation. Colère devant le déluge de contre-vérités et de mensonges diffamatoires qui ont alors déferlé dans les médias occidentaux contre le peuple serbe, humiliation d’avoir assisté au premier bombardement d’une capitale européenne par les Américains depuis la fin de la dernière guerre mondiale. L’Europe s’est à cette occasion révélée dans sa triste vérité : impuissante, quasi paralysée, n’ayant aucune conscience des enjeux globaux, objet de l’histoire des autres à défaut d’être le sujet de sa propre histoire. Quant au Kosovo, j’observe que sa proclamation d’indépendance a été soutenue par les mêmes puissances qui se sont refusées à reconnaître celle de l’Abkhazie ou de l’Ossétie du Sud : la Géorgie a eu droit au respect de son « intégrité territoriale », alors que la Serbie n’y a pas eu droit. Cela donne la pleine mesure de la logique qui prévaut aujourd’hui dans les rapports internationaux. Pour l’heure, le Kosovo me paraît être le premier Etat mafieux de l’histoire. Je doute que son avenir soit particulièrement brillant. 
 

14)
Pourriez vous conseiller 5 ouvrages clefs a lire, 5 sites / blogs a consulter ?
Je ne suis pas assez familier de l’univers des blogs pour recommander ceux qui seraient les meilleurs. Je me sens tout aussi incapables d’énumérer « cinq ouvrages-clés à lire ». Des ouvrages-clés, il y en a au moins plusieurs centaines ! Je recommanderai seulement de lire les ouvrages qui aident à comprendre le moment historique que nous vivons, et d’autre part les grands classiques de la pensée politique et géopolitique dont les enseignements peuvent encore valoir aujourd’hui, de Machiavel, Hobbes et Rousseau jusqu’à Max Weber et Carl Schmitt. Enfin, sans doute par inclinaison personnelle, je dirais que toute intelligence des choses suppose un minimum de connaissance philosophique. Heidegger, pour ne citer que lui, a joué dans ma formation un rôle qui n’a pas encore été dépassé.
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Retour de la France dans l’OTAN : un cas de haute trahison ?

Ce WE est une date noire pour l’Europe et surtout pour la France, puisque à l’occasion du 60ième anniversaire de l’OTAN notre administration politique annoncera officiellement son retour au sein du commandement intégré, Nicolas Sarkosy achevant ainsi de définitivement trahir l’héritage du Général de Gaulle.
Alain de Benoist m’a fait parvenir son texte à ce sujet, je pense qu’il résume tout ce qu’il y a à dire, l’analyse est d’une pertinence inégalée, bien au dessus de tout ce que j’ai pu lire à ce sujet ces dernières semaines.

LE RETOUR DE LA FRANCE DANS L’OTAN

Une analyse

Alain de Benoist

C’est désormais officiel, mais l’annonce en sera faite à l’occasion du sommet prévu les 3 et 4 avril prochains à Strasbourg et à Kehl, pour le 60e anniversaire de l’Alliance atlantique : la France va réintégrer les structures militaires intégrées de l’OTAN. Le premier à en être informé a été le secrétaire général de l’Alliance atlantique, le Néerlandais Jaap de Hoop Scheffer, qui a rencontré Nicolas Sarkozy en février dernier, après avoir été reçu en audition par les commissions des Affaires étrangères et de la Défense de l’Assemblée nationale.

Avec cette décision, lourde de conséquences politiques et diplomatiques, le chef de l’Etat français rompt avec une tradition d’indépendance nationale vieille de plus de quarante ans que tous ses prédécesseurs, de droite comme de gauche, avaient (plus ou moins) respectée. ’est en effet en mars 1966 que le général de Gaulle, posant clairement le problème de la compatibilité de l’OTAN avec les intérêts et l’indépendance de la France, avait pris la décision la plus importante sans doute de sa présidence, en annonçant le départ de la France des structures intégrées de l’OTAN, c’est-à-dire du dispositif plaçant les forces alliées sous l’autorité des Américains, et en exigeant le démantèlement de toutes les bases et installations américaines présentes sur le sol national. Il rejetait ainsi une tutelle faisant de la France un pays vassal des Etats-Unis.

La conviction du Général s’était faite bien avant son retour au pouvoir en mai 1958. Dès le milieu des années 1950, l’OTAN était déjà largement discréditée à ses yeux, dans la mesure où elle impliquait une inféodation inacceptable de la politique étrangère française au leadership américain. C’est la raison pour laquelle, le 17 septembre 1958, quelques mois à peine après la fondation de la Ve République, le général de Gaulle avait adressé au président américain, le général Dwight Eisenhower, et au Premier ministre anglais, Harold Macmillan, un mémorandum réclamant la création d’un « directoire » tripartite de l’Organisation composé des trois puissances américaine, britannique et française. Cette demande se heurta rapidement à une fin de non-recevoir de la part des Etats-Unis.
L’année suivante, au printemps 1959, le Général décidait de retirer du commandement de l’OTAN la flotte française de Méditerranée (elle sera également retirée en 1964 du commandement allié de l’Atlantique), puis, à l’automne 1960, de n’affecter que partiellement les forces françaises à la défense aérienne intégrée mise en place dans le cadre de l’OTAN. En 1962, il décidait également de ne pas replacer sous le commandement Centre-Europe de l’OTAN deux divisions françaises qui en avaient été retirées lors du conflit algérien, et précisait que la France se tiendrait dans un rôle de réserve par rapport à la « défense de l’avant » que l’organisation intégrée entendait alors mettre en place en Allemagne le long du rideau de fer. A partir de 1963-64, l’affirmation de l’indépendance de la France devint indissociable de la création d’une force de dissuasion nucléaire française indépendante et d’une contestation générale de la politique des blocs instaurée à Yalta. La décision de mars 1966 sera la conséquence logique de cette politique mûrement réfléchie.

Le 21 février 1966, au cours d’une conférence de presse, le général de Gaulle annonce donc le retrait de la France de l’OTAN.
Le 7 mars, il fait part au président américain Lyndon B. Johnson de l’intention de la France de recouvrer l’« exercice entier de sa souveraineté ». Deux mémorandums à l’intention des Etats membres de l’Alliance, datés des 11 et 29 mars, en détaillent les modalités. Tout en restant membre à part entière de l’Alliance atlantique, la France se retire de la structure militaire intégrée de l’OTAN. Les forces françaises affectées au commandement de l’OTAN cesseront de l’être à dater du 1er juillet 1966, et les troupes et installations militaires américaines devront avoir quitté le territoire national avant le 1er avril 1967. Les détails de la coopération future entre la France et l’OTAN seront précisés par la négociation qui s’engage à l’automne 1966 entre le général Charles Ailleret, chef d’état-major des armées françaises, et le général américain Lyman Lemnitzer, commandant suprême des forces alliées en Europe. Cette décision aura pour conséquence le transfert en Belgique du Commandement suprême de l’OTAN (SACEUR), jusqu’ici installé à Rocquencourt, près de Versailles.

Bien qu’elle représente une incontestable rupture, la décision de Nicolas Sarkozy ne surprend toutefois pas vraiment. Au cours de ces dernières années, nombre de hauts responsables de l’establishment militaire français sont devenus autant d’agents d’influence de l’atlantisme, tandis que, du côté de la classe politique, la volonté d’indépendance de la France vis-à-vis de l’OTAN s’est incontestablement affaiblie.

En 1986, on avait déjà vu une division française participer à l’exercice « Frankischer Schild », puis 20 000 soldats français engagés en 1987 dans l’exercice « Moineau hardi ». En 1990, l’Allemagne fut réunifiée dans le cadre de l’OTAN, avec l’accord de Mikhaïl Gorbatchev, et non dans le cadre d’une « grande Europe » comme le souhaitait alors François Mitterrand (déclaration de Kiev, 6 décembre 1989). En décembre 1995, la France avait déjà annoncé son retour au conseil des ministres et au comité militaire de l’OTAN (la plus haute autorité militaire de l’Alliance, qui réunit les chefs d’état-major des pays membres) – mais pas au sein du système militaire « intégré ». On sait néanmoins qu’entre 1995 et 1997, Alain Juppé étant alors Premier ministre de Jacques Chirac, la France avait envisagé sa pleine réintégration dans l’OTAN, perspective qui n’avait échoué qu’en raison de l’intransigeance américaine. La France avait en effet posé comme condition à ce retour l’obtention du commandement militaire du flanc sud de l’Alliance, à Naples, ce que les Etats-Unis, peu désireux de placer sous autorité étrangère le commandement de leur VIe flotte, avaient immédiatement refusé.

Les troupes françaises ont ensuite été partie prenante dans la guerre de l’ex-Yougoslavie, tout comme elles l’avaient été dans la première guerre du Golfe. En 1999, la crise du Kosovo donne à l’OTAN l’occasion d’intervenir au moyen d’une offensive de bombardements aériens. La même années, trois pays issus de l’ancien bloc de l’Est, la Pologne, la République tchèque et la Hongrie, adhèrent à l’OTAN. Sept autres pays d’Europe centrale et orientale (Estonie, Lettonie, Lituanie, Slovaquie, Roumanie, Bulgarie, Slovénie) les imiteront en mars 2004. Ces adhésions, nées d’une fascination pour l’Amérique et le système néolibéral, sont bien entendus encouragées par les Etats-Unis, qui souhaitent contrôler l’espace est et sud-est européen, comme pont vers la Caspienne et l’Asie centrale.

En 2003, un groupe de personnalités européennes comprenant Valéry Giscard d’Estaing, Felipe Gonzales, Douglas Hurd et Helmut Kohl, affirme solennellement que « l’Alliance atlantique renouvelée demeure le principal pilier du partenariat entre l’Europe et l’Amérique » (Le Monde, 15-16 juin 2003). A cette date, des officiers français sont déjà « insérés » au sein du SHAPE, c’est-à-dire de l’état-major des puissances alliées en Europe. Le 8 décembre 2005, les Etats-membres de l’OTAN acceptent de participer, à des degrés divers, à la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS), présente en Afghanistan sous commandement américain. Détail peu connu, durant le printemps et l’été de 2007, l’armée de l’air française a même assuré la protection du ciel des pays baltes dans le cadre de l’OTAN, situation dans laquelle le commandement de l’Organisation aurait parfaitement pu donner à un pilote français, par exemple en cas d’incursion russe, un ordre de tir contre un avion violant cet espace aérien.

Elu président de la République le 2 mai 2007, Nicolas Sarkozy, chef des armées aux termes de l’article 5 de la Constitution, et qui ne dissimule rien de sa sympathie active pour les Etats-Unis d’Amérique, se montre désireux d’aller plus loin. Dès le 27 août 2007, dans son premier grand discours de politique étrangère prononcé devant la Conférence des ambassadeurs en poste à Paris, il laisse entendre que la France reprendra bientôt « toute sa place » au sein de l’Alliance atlantique. Le mois suivant, le ministre français de la Défense, Hervé Morin, engage publiquement une réflexion sur la retour de la France dans la structure militaire intégrée de l’OTAN. « Ma conviction, déclare-t-il lors de la 5e Université d’été de la défense réunie à Toulouse, est que l’Europe de la défense ne progressera pas si nous ne changeons pas de comportement politique au sein de l’OTAN ».

En avril 2008, au sommet de l’OTAN de Bucarest, Nicolas Sarkozy – qui avait pourtant déclaré, durant sa campagne présidentielle, que la présence française dans ce pays n’était pas essentielle à nos intérêts – accepte d’envoyer, à la demande des Etats-Unis, des troupes supplémentaires en Afghanistan, où 53 000 hommes de 40 pays sont déjà déployés sous l’égide de l’OTAN, aux côtés de 36 000 soldats américains, au sein de deux forces multinationales (Coalition-Opération Enduring Freedom et Force internationale d’assistance à la sécurité).

Il faut rappeler que cette guerre interminable, perdue d’avance, a été engagée au départ à seule fin de garantir l’exploitation par la firme californienne Unocal (absorbée entre-temps par Chevron) du pipe-line devant relier la Caspienne à l’océan Indien via le Turkménistan, l’Afghanistan et le Pakistan. D’où l’installation à la tête de l’Etat afghan du président fantoche Hamid Karzaï, ex-agent de la CIA, ex-expert de l’Unocal chargé de superviser le projet de pipe-line trans-afghan. Cette guerre néocoloniale menée depuis sept ans a eu pour seul effet de stimuler les terrorisme au lieu de l’apaiser, et de renforcer les taliban au lieu de les affaiblir, tandis que la population locale se dressait de plus en plus contre l’occupation étrangère et que l’Afghanistan se transformait peu à peu en un Etat narcotrafiquant.

Le retour annoncé de la France dans l’OTAN a également servi de toile de fond aux discussions provoquées, en juin 2008, par un nouveau Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale censé dessiner les orientations stratégiques de la France pour les quinze prochaines années. La publication de ce document, qui annonçait notamment une réduction de 54 000 personnels des effectifs militaires français au cours des années à venir, a vu s’accentuer le clivage entre tenants de l’atlantisme et partisans d’une défense indépendante. On se souvient qu’un groupe d’officiers généraux et supérieurs des trois armées (terre, air, mer), regroupés anonymement dans le groupe « Surcouf », avait alors ouvertement critiqué les nouvelles orientations officielles. Un texte publié sous ce nom dans Le Figaro (19 juin 2008) parlait d’« absence de critères politico-militaires d’intervention », de « flou des priorités géopolitiques », de « dépense publique considérable pour une utilité opérationnelle faible », de « véritable déclassement militaire de notre pays, dans un monde bien plus dangereux qu’hier ». En réponse, Sarkozy a tenté de faire identifier les contestataires afin de les sanctionner, à un moment où ses relations avec l’armée s’étaient particulièrement dégradées (affaire du 3e RPIMA de Carcassonne, démission du général Cuche, etc.).

Le Livre blanc prône en fait une évolution de la stratégie de défense tendant à abandonner les moyens d’intervention externes lourds (aviation, second porte-avions) au profit des armements terrestres légers et, surtout, des techniques et des moyens de renseignement (satellites, drones, systèmes de surveillance spatiale, etc.). Le géopoliticien Aymeric Chauprade, récemment mis à la porte du Collège interarmées de défense par Hervé Morin, note que ce glissement stratégique correspond à un renoncement par la France à sa capacité d’intervention autonome afin de mieux favoriser son intégration au sein de l’OTAN. Il s’agit en fait de transformer l’infrastructure de la défense française en un système plus spécialisé mis à la disposition des Etats-Unis et, plus largement, d’une coalition politique occidentale tout à fait conforme à la doctrine américaine du « choc des civilisations », l’idée générale étant qu’il faut répondre aux « menaces » par l’intégration croissante des nations occidentales, dans un monde où il n’y a plus de différence entre défense nationale et sécurité, entre sécurité intérieure et extérieure (cf. la récente fusion de la DST avec une partie des effectifs des Renseignements généraux pour former le Renseignement intérieur).

Au ministère de la Défense, on fait par ailleurs observer que la France participe déjà à la plupart des opérations de l’Alliance, que des généraux français commandent régulièrement certaines opérations de l’OTAN, et que la France contribue aussi à hauteur de 13 % au budget de l’Organisation (elle est aujourd’hui le troisième contributeur financier pour les activités de l’OTAN auxquelles elle participe et le cinquième pour l’ensemble des opérations). La conclusion qu’on en tire est que la réintégration dans le dispositif intégré n’a pas l’importance que certains lui attribuent (« il ne s’agit pas de la révolution qu’on prétend », dit Hervé Morin). C’est évidemment sous-estimer la portée symbolique d’un tel geste. Et d’ailleurs, si c’est vraiment si peu important, pourquoi le faire ?

Nicolas Sarkozy, quant à lui, a eu recours à un argument des plus étonnants. Dans son discours aux ambassadeurs du 27 août 2007, il a déclaré que, « pendant les décennies de contrainte bipolaire, comme pendant la décennie de situation unipolaire, il était juste et souhaitable que notre pays marque sa différence par rapport à Washington », tandis qu’aujourd’hui c’est la politique inverse qui s’impose. Déclaration prononcée avec un aplomb stupéfiant, car c’est exactement à l’argument opposé que recouraient, pour condamner la décision prise en 1966 par le général de Gaulle, ceux qui professaient alors le même atlantisme que le chef d’Etat français actuel. A l’époque, à les en croire, c’est précisément parce que le monde était alors bipolaire que toute dissidence par rapport au camp américain revenait à faire le jeu de Moscou. Quant au contraste dressé par Sarkozy entre les deux époques, il est encore plus ridicule, car c’est précisément au moment où nous entrons dans un monde multipolaire qu’un alignement sur Washington devient totalement inconsidéré. En d’autres termes, si la décision du Général était en 1966, en pleine guerre froide, parfaitement justifiée, le maintien de la France en dehors de l’OTAN l’est plus encore aujourd’hui, maintenant que la guerre froide est terminée.
C’est justement dans un monde multipolaire, instable par définition, que l’on a besoin d’une défense indépendante non alignée.

Depuis la désintégration du système soviétique, l’OTAN n’a en réalité plus de raison d’être. Créée lors de la signature du traité de l’Atlantique-Nord, le 4 avril 1949, pour prémunir l’Europe occidentale contre la puissance russe, alors considérée comme une menace, cette organisation est un pur produit de la guerre froide. Lors de la chute du Mur de Berlin, elle aurait du être dissoute comme fut dissous le Pacte de Varsovie, pour une raison toute cartésienne : une alliance ne survit pas aux raisons qui l’ont fait naître. Il n’en fut rien, bien au contraire.

Loin de faire disparaître l’OTAN, les Américains ont redéfini sa mission, sans aucune concertation ni réflexion globale avec leurs alliés, en étendant toujours plus loin sa zone de compétence, et d’abord en direction de l’Europe centrale et orientale. Dans le conflit de l’ex-Yougoslavie, on vit ainsi l’Alliance atlantique prendre en main la gestion militaire de la crise, puis le contrôle de la mise en application des accords de paix. L’OTAN a ainsi complètement changé de nature. Elle projette désormais forces et puissance dans le « hors-zone », notamment à travers les programmes de « Partenariat pour la paix » et de « Dialogue méditerranéen ». Elle a parallèlement poursuivi sa marche vers l’Est, en violation formelle des assurances données par les Etats-Unis à Mikhaïl Gorbatchev lors de la réunification allemande.

Dès le 11 septembre 2001, le président George W. Bush avait d’ailleurs pris position pour une « grande OTAN […] de la Baltique à la mer Noire », afin de s’ouvrir la voie de la Caspienne et de la mer Noire. Ces orientations ont été confirmées au sommet atlantique de Prague, les 21 et 22 novembre 2002 : l’organisation atlantique passe alors clairement d’une perception géographie limitée à une perception fonctionnelle globale des enjeux de sécurité. La Déclaration de Prague stipule en effet que l’OTAN doit désormais pouvoir aligner des « forces capables de se déployer rapidement partout où elles sont nécessaires […] de mener des opérations à longue distance et dans la durée ». On passe, en d’autres termes, d’une structure relativement statique à un modèle expéditionnaire d’interventions tous azimuts, les centres de gravité de la géostratégie mondiale glissant dans le même temps vers le Moyen-Orient et l’Asie.

Pour répondre à cette nouvelle orientation, les structures de l’OTAN ont été modifiées. Jusqu’en 2003, les opérations militaires de l’OTAN se partageaient en deux grands commandements stratégiques, l’un et l’autre placés sous la direction d’un officier supérieur américain : le Commandement suprême des forces alliées en Europe (SACEUR) et le Commandement suprême des forces alliées de l’Atlantique (SACLANT). Ce dernier a aujourd’hui cédé la place à un Commandement stratégique de la transformation (ACT), les alliés étant invités à participer à la création d’une Force de réaction rapide de l’OTAN comprenant 21 000 soldats appartenant à des unités européennes et susceptibles d’intervenir « partout où il le faudra ». Quant au SACEUR, basé au quartier général du SHAPE, il désigne désormais le Commandement Allié Opérations. Il est dirigé par un général américain assurant aussi le commandement des forces armées en Europe, dont le quartier général se trouve à Stuttgart.

L’OTAN réunit aujourd’hui 24 pays européens et deux Etats nord-américains. Elle comprend 22 000 employés et 60 000 militaires permanents. Transformée en simple alliance politico-militaire des Occidentaux, cimentée par les « valeurs occidentales » et le postulat sans cesse réaffirmé d’une communauté d’intérêts « transatlantique », on peut la considérer comme une sorte de gendarme planétaire chargé de la défense des intérêts occidentaux.
Hervé Morin souscrit à ce programme : « Que doit devenir l’OTAN ? […] A mon sens, l’Alliance doit défendre un certain nombre de valeurs. Lesquelles ? Celle de la communauté euro-atlantique. Celle-ci repose sur des fondements philosophiques communs : le libéralisme, la démocratie, les droits de l’homme » (Le Nouvel Observateur ; 12 juin 2008, p. 67). Nicolas Sarkozy s’est également réclamé de ces « valeurs occidentales » dans son discours aux ambassadeurs de janvier 2008.

C’est donc à cette nouvelle OTAN, devenue une coalition occidentale de légitimation diplomatique des entreprises américaines, qui a pour but de porter la guerre aux confins de la planète à seule fin de défendre les intérêts géostratégiques des Etats-Unis, que Nicolas Sarkozy a décidé de faire pleinement adhérer la France.

La seule vraie question qui se pose alors est : pourquoi ?

Deux raisons ont été avancées. La première est qu’en revenant dans l’OTAN, la France pourra mieux peser sur ses orientations et sa réorganisation, c’est-à-dire qu’elle pourra mieux se faire entendre à Washington. La deuxième est qu’elle n’en sera que plus forte pour construire un pôle européen de la défense et désarmer les réticences de ceux de ses partenaires qui ne veulent à aucun prix d’une défense européenne indépendante de l’OTAN.

Croire qu’en étant « dedans », on pèsera mieux sur l’évolution interne de l’Alliance est en réalité une illusion. Les Britanniques ou les Allemands, fidèles partenaires des Américains, sont-ils jamais parvenus à influer en quoi que ce soit sur les stratégies de l’OTAN ? Au surplus, tout diplomate, même débutant, sait que lorsque l’on s’engage dans une négociation, les exigences que l’on entend voir satisfaites doivent être formulées avant de prendre l’engagement qui en constitue la contrepartie : c’est avant de faire une concession qu’on négocie, et non après. (Les prostituées le savent aussi : elles font payer leurs clients avant, non après).

De toute évidence, ce n’est pas la promotion de quelques dizaines d’officiers français dans les états-majors de l’OTAN, ni les postes de commandement promis aux Français – la direction de l’ACT, basée à Norfolk, en Virginie, qui est l’un des quartiers stratégiques de l’OTAN, et un commandement régional à Lisbonne, quartier général de la Force de réaction rapide (dont la direction dépend entièrement du commandement suprême américain en Europe) – qui permettront de peser en quoi que ce soit. La vérité est qu’au sein de l’OTAN, le partenariat et l’intégration se résument à la subordination, quand ce n’est pas à l’alignement automatique. L’OTAN reste plus que jamais une machine de guerre américaine, contrôlée par les Américains et destinée à asseoir leur hégémonie sur des alliés transformés en vassaux. L’OTAN n’a qu’un seul commandement opérationnel suprême, le SACEUR, qui reste entre les mains du général américain commandant les forces américaines en Europe. Au sein de l’OTAN, ce sont les Américains qui décident, les Européens étant considérés simplement comme des exécutants. Lors de sa visite à Paris, le 12 février 2009, Jaap de Hoop Scheffer a d’ailleurs bien précisé que, si la France réintégrait le commandement militaire intégré de l’OTAN, ce serait de toute façon toujours à lui qu’il reviendrait de « gérer les choses au sein de l’OTAN ». Cela montre que jamais les Etats-Unis n’admettront que soit remis en cause leur leadership. Les gains escomptés à Paris ne sont au mieux que de pieux souhaits.

L’autre raison est, elle aussi, constamment ressassée dans les milieux officiels. Sarkozy déclarait ainsi, le 17 juin 2008 : « Notre position, hors du commandement militaire [de l’OTAN], entretient une méfiance sur l’objet de notre ambition européenne ». « Depuis dix ans, ajoute Hervé Morin, l’Europe de la défense piétine parce que nos partenaires européens ont l’impression que les Français veulent en faire un substitut à l’OTAN, à laquelle ils sont viscéralement attachés ». On en conclut que, si la France rentre dans l’OTAN, ses partenaires seront plus disposés à faire progresser la défense européenne, et que les Américains verront du même coup que les efforts déployés par Paris en faveur de celle-ci ne sont en rien dirigés contre eux. Sarkozy, qui ne manque pas une occasion de mettre en parallèle son intention de revenir au sein du commandement militaire intégré de l’OTAN et son désir de « donner une nouvelle impulsion à l’Europe de la défense », cite à ce propos les déclarations de George W. Bush au sommet de l’OTAN de Bucarest : « Le président des Etats-Unis a apporté son soutien au projet de défense européenne ; il l’a fait parce qu’il était convaincu qu’en portant ce projet, la France ne souhaitait pas affaiblir l’Alliance atlantique, que les deux étaient complémentaires et non antagonistes ». Tout à la recherche de l’approbation de Washington, Sarkozy ne réalise évidemment pas que ce que beaucoup lui reprochent, en France, c’est précisément de ne pas concevoir le projet de défense européenne comme une alternative au « parapluie » américain. Et que, par de telles prises de position, il confirme au contraire son intention de transformer l’Europe de la défense en un simple « pilier européen » de l’OTAN.

Le retour de la France dans l’OTAN ne lève en fait aucune des hypothèques qui pèsent sur l’avenir de l’Europe de la défense, celle-ci restant bloquée par les vues divergentes des Etats-membres.
Malgré les progrès de la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD) instaurée en février 1992 par le traité de Maastricht, puis réaffirmée par les traités d’Amsterdam (1997) et de Nice (2000), la déclaration franco-britannique de Saint-Malo (4 décembre 1998) et le Conseil européen d’Helsinki (10-11 décembre 1999), malgré la fondation en juillet 2004 d’une Agence européenne de défense (AED) placée sous l’autorité de Javier Solana, la défense européenne n’avance pas. Elle se borne à prendre en charge la « gestion de crise » et les missions ne relevant pas de la défense collective de l’Europe, c’est-à-dire qu’elle relève moins de la défense que de la sécurité. Bien entendu, il n’existe au niveau européen aucun état-major stratégique comparable au SHAPE de l’OTAN, ce qui signifie que toute opération européenne passe par l’organisation atlantique chargée d’en assurer la planification stratégique, ainsi que ce fut le cas pour la mission « Concordia » en Macédoine (2003) ou la mission « Althéa » en Bosnie-Herzégovine (2004). Comme l’a écrit Jean-Sylvestre Mongrenier, « l’Europe de la défense n’est pas la défense de l’Europe ».

Les Etats-Unis, qui ont depuis longtemps l’habitude de répondre par des moyens militaires à des défis qui pourraient trouver des réponses d’une autre nature, politique ou diplomatique en particulier, représentent aujourd’hui plus de 50 % des dépenses militaires mondiales, ce qui signifie qu’ils dépensent à eux seuls pour leur armement plus que l’ensemble de tous les autres pays du monde. Au regard de ce formidable effort de puissance, les dépenses militaires des Européens apparaissent extraordinairement limitées. La « défense européenne » n’est actuellement qu’une juxtaposition de budgets et d’équipements nationaux souvent incompatibles entre eux. Alors que pour le seul secteur de la recherche et du développement, l’effort des Etats-Unis s’est accru de 40 % entre 1990 et 2000, il a dans le même temps diminué de 22 % chez les principales puissances militaires de l’Union européenne. Quant aux capacités de projection européennes, elles ne représentant même pas 20 % des capacités américaines.

Mais l’essentiel est ailleurs. La défense européenne ne peut résulter que d’une volonté politique européenne qui pour l’heure n’existe pas, précisément parce que la plupart des Etats-membres de l’Union européenne préfèrent s’en remettre aux Etats-Unis du soin d’assurer leur sécurité. Depuis la conférence atlantique de décembre 1991, on sait que les partenaires de la France refusent absolument d’envisager un système de défense indépendant de l’OTAN qui risquerait d’éloigner, si peu que ce soit, les Etats-Unis du théâtre européen. Les Européens ne veulent pas d’une défense européenne indépendante de l’OTAN, de même qu’ils ne veulent pas d’une Europe-puissance qui se construise en dehors de la relation atlantique. Ils ne veulent pas de ce que le général de Gaulle appelait le 23 juillet 1964 une « politique européenne indépendante ».

Au demeurant, le principe d’une défense européenne autonome a été expressément exclue par le traité de Maastricht, dont le texte précise que « l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord reste pour les Etats qui en sont membres le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en ouvre ».
La politique européenne de sécurité et de défense (PESC) ne saurait donc porter atteinte aux intérêts de l’OTAN, ni même diverger de ses orientations. En 2004, au sommet de l’OTAN d’Istanbul, Jacques Chirac était allé jusqu’à déclarer : « Il n’existe pas, il ne peut pas exister, d’opposition entre l’OTAN et l’Union européenne ». Les Européens se sont ainsi ligotés eux-mêmes, s’interdisant par avance de faire de l’Europe une puissance capable, au sein d’un monde multipolaire, de rivaliser avec les Etats-Unis, voire de s’opposer à eux.

Croire qu’en échange du retour de la France dans l’OTAN, les Etats-Unis se montreront plus disposés à accepter la mise en place d’une Europe de la défense est donc pour le moins naïf. Ils ne l’accepteront que dans la mesure où cette défense n’aura aucun caractère autonome. Présenter la réintégration de la France dans l’OTAN comme un préalable indispensable à la construction d’une véritable défense européenne est en outre un sophisme, dans la mesure où la plupart des pays européens ne veulent précisément pas d’une défense commune, considérant que tout progrès en ce sens constituerait un défi à l’OTAN et aux Américains. La défense européenne ne peut être mise en œuvre aussi longtemps que la plupart des Etats européens continueront à penser que les Etats-Unis la remplacent avantageusement. L’abandon par la France de son statut spécifique est-il de nature à les convaincre de renoncer à cette idée ? Elle ne peut, au contraire, que les renforcer dans leur conviction qu’il est bien inutile de consacrer leurs efforts à une défense européenne. Voyant la France rentrer dans le giron atlantique, ceux qui considèrent que l’armée américaine suffit à défendre l’Europe ne pourront qu’être confortés dans leur choix en faveur de la facilité et de la démission.

Loin de relancer la défense européenne, le retour de la France dans l’OTAN risque même de signer sa mort définitive en entérinant une forme de division du travail entre l’Alliance atlantique et une Union européenne incapable de prendre en charge sa propre sécurité.

François Bayrou n’a donc pas eu tort de voir dans la réintégration de l’OTAN une « défaite pour la France et l’Europe » et un « aller sans retour ». Beaucoup de socialistes ont également protesté, assez mollement toutefois, ce qui ne saurait surprendre de la part d’un parti dont la quasi-totalité des députés européens se sont engagés à Strasbourg, en mai 2008, à participer à l’instauration d’un grand « marché commun transatlantique sans entraves en 2015 ». (Ce projet, qui engage la France dans une promotion fanatique du libre-échange mondial, consacre l’évolution de l’Union européenne vers une vaste zone de libre-échange fondée sur la libre circulation des biens et des services et prélude, semble-t-il, à une véritable « Assemblée transatlantique », c’est-à-dire à la mise en place d’institutions politiques communes aux deux côtés de l’Atlantique). Jean-Pierre Chevènement, sans surprise, s’est en revanche inquiété de voir la France s’engager « dans une mécanique qui réduira obligatoirement notre marge d’indépendance », en attendant de l’entraîner « dans des guerres qui ne sont pas les nôtres ».
Pour le socialiste Jean-Michel Boucheron, « si la France entre dans l’OTAN, il n’y a plus d’espoir de politique étrangère et de sécurité commune, plus d’Europe de la défense ».

Au sein même de la majorité, plusieurs personnalités ont exprimé leurs réticences. Dominique de Villepin a laissé prévoir un « rétrécissement » de la France sur le plan diplomatique, parlant d’une « faute » susceptible de faire passer la France « sous les fourches caudines d’un autre pays ». Alain Juppé s’est inquiété d’un « marché de dupes ». L’ancien député UMP Daniel Garrigues est allé jusqu’à parler de « trahison ». Nicolas Dupont-Aignan, député de l’Essonne, évoque une « faute historique d’une gravité incalculable » et ajoute : « Nicolas Sarkozy devra assumer devant l’histoire le rôle de fossoyeur d’un symbole fort de l’identité française : la politique d’indépendance nationale instaurée par le général de Gaulle il y a plus d’un demi-siècle ». « Ce ralliement, dit Philippe de Villiers, traduit la dérive d’une large élite politique française qui n’a plus d’autre horizon que l’alignement systématique sur les Etats-Unis. L’idée que la France ait à jouer un rôle spécifique de puissance d’équilibre et de médiation, en s’appuyant sur une diplomatie libre, indépendante, non alignée, étrangère à la notion de bloc, aiguillon d’une Europe européenne, leur est devenue totalement étrangère ». Le Premier ministre François Fillon a décidé d’engager la responsabilité de son gouvernement sur cette question, mais il s’est bien gardé de céder à la demande de référendum formulée par François Bayrou ou Nicolas Dupont-Aignan.

Bien entendu, le retour de la France dans l’OTAN a en revanche été salué à Washington, notamment par Gordon Johndroe et Tom Casey, porte-parole respectifs de la Maison Blanche et du département d’Etat. Les Américains, plus que jamais demandeurs de troupes, puisqu’ils ne peuvent plus faire face seuls à tous les théâtres de conflits où ils sont présents, se réjouissent par avance d’être mieux en position d’exiger de la France qu’elle s’associe plus étroitement à eux dans les guerres présentes (Afghanistan) comme dans les combats futurs (Iran).

La décision prise en 1966 par le général de Gaulle était déjà motivée, de façon implicite, par sa volonté de maintenir la dimension multipolaire du monde. En se retirant de l’OTAN, le Général offrait la possibilité à un certain nombre de nations de se tenir aux côtés de la France sans plus souscrire à l’ordre bipolaire né des accords de Yalta. En mettant un terme à l’« exception française », Nicolas Sarkozy scelle la fin de la politique étrangère et de l’indépendance stratégique de la France, donnant ainsi le coup de grâce à toute l’œuvre diplomatique du général de Gaulle.

Il est de toute évidence irresponsable de rejoindre l’OTAN au moment où celle-ci apparaît plus que jamais comme l’alliance du monde occidental contre le reste du monde, comme une coalition ayant pour volonté d’imposer au reste du monde la supériorité des valeurs occidentales, qui ne sont en dernières analyses que des valeurs marchandes, provoquant tout à la fois la crispation de la Russie, qui se sent de plus en plus encerclée par les Occidentaux, et l’hostilité de tous les pays, notamment arabo-musulmans, rebelles instinctivement à la dimension de croisade néocoloniale affichée par l’Alliance.
C’est à une normalisation atlantiste que revient cette décision, qui sera inévitablement perçue et interprétée comme un réalignement, sinon comme une capitulation, en même temps que comme la marque d’une « banalisation » de la position de la France, d’un affaiblissement de son autonomie et d’un renoncement à ses ambitions. En s’alignant sur l’hyperpuissance américaine au sein d’un bloc occidental monolithique, amorce d’une sorte d’empire néo-occidental, la France perd tout espoir d’être entendue comme une puissance indépendante dans un certain nombre de conflits, notamment au Proche et au Moyen-Orient.

Prise sans concertation ni exigence de contrepartie, sans débat politique préalable, sans que le peuple soit consulté, à seule fin de complaire aux Etats-Unis, sur lesquels il s’est aligné dès son élection, au moment même où l’OTAN se montre incapable d’obtenir des résultats décisifs en Afghanistan et ne cesse d’attiser les tensions avec la Russie, la honteuse décision de Nicolas Sarkozy revient purement et simplement à rentrer dans le rang. Elle crée les conditions dans lesquelles il sera de plus en plus difficile de dire « non » aux Américains, car la France ne disposera plus que d’une marge de manœuvre plus réduite. Les soldats européens continueront de faire office de supplétifs de l’US Army, en se faisant tuer dans des guerres qui ne sont pas les leurs, comme aujourd’hui en Afghanistan, et demain peut-être en Iran.

Le général de Gaulle disait : « Je veux l’Europe pour qu’elle soit européenne, c’est-à-dire qu’elle ne soit pas américaine ». Nicolas Sarkozy, lui, fait cadeau de la France à l’OTAN, c’est-à-dire aux Etats-Unis.
Un cas exemplaire de haute trahison ?


Alain de Benoist

15 mars 2009

Les États-Unis utilisent l’Europe comme tête de pont pour attaquer l’Eurasie

Dans un entretien récemment publié sur Evrazia, le géopoliticen Tiberio Graziani souligne la dépendance de l’Italie en particulier et des États ouest-européens en général vis-à-vis des États-Unis. Une vassalité qui empêche Rome et Bruxelles de défendre leurs intérêts et les contraints à considérer Moscou comme un adversaire et non un partenaire.Anastasia Haydulina pour Russia Today : Les gouvernements du monde entier sont en train d’adopter des mesures protectionnistes. Ce qui produit un impact à tous les niveaux de la société. En Italie on assiste à un plus grand appui aux politiques anti-immigration de la droite. Comment va faire l’Italie, et comment ferons-nous tous, pour dépasser la crise financière mondiale ?

Tiberio Graziani : Avant tout nous devrions réfléchir sur les causes de cette crise financière, qui a atteint aussi la production au niveau industriel, d’abord aux États-Unis puis dans tout le système occidental, constitué par le triumvirat bien connu : États-Unis, Europe occidentale et Japon. La crise a influencé tout le marché mondial. Pour ce qui concerne l’Italie, les effets se sont manifestés avec un léger retard et, je crois, seront plus marqués au cours de 2009 et 2010. Car l’économie italienne est principalement fondée sur des petites et moyennes entreprises, il n’y a pas de grosse concentration industrielle, et, donc, l’Italie tend à avoir cette plus grande flexibilité qui est nécessaire pour affronter et contenir la crise. Mais la crise sera très profonde. Nous ne serons en mesure de dépasser une crise financière qu’en opérant dans un contexte géoéconomique continental. Ceci signifie que nous devrions chercher des solutions qui impliquent les économies des pays émergents comme la Russie, la Chine et l’Inde. La crise ne peut pas être dépassée qu’avec des solutions nationales ou des solutions élaborées à Bruxelles exclusivement par l’Union Européenne.RT : Parlons de la récente crise du gaz. L’Italie n’en a peut-être pas pâti comme les Balkans et l’Europe orientale mais elle était de toutes façons parmi les pays pris en otage. La vérité a cependant été gardée cachée. Quelle est la véritable raison de la dispute ?

Tiberio Graziani : La raison de la dispute du gaz entre Kiev et Moscou est de fait une réponse de l’extension de l’Otan à l’est, et de l’élargissement de l’Union Européenne aux pays de l’Europe Orientale. Ces deux mouvements simultanés d’expansion ont été vus à Moscou comme une sorte d’agression menée dans son entourage immédiat. Ce genre d’expansion a commencé en 1989 après la chute du Mur de Berlin. Depuis ce moment-là, les États-Unis ont décidé de contrôler toute la planète. Ils ont choisi l’Europe Occidentale comme point de départ pour avancer vers la Russie et l’Asie centrale. Il est en effet connu que l’Asie centrale a d’énormes gisements de gaz et de pétrole. Les États-Unis commencèrent ainsi à influencer les pays du Pacte de Varsovie et certaines ex-républiques soviétiques comme l’Ukraine. Depuis 1990, l’Ukraine a commencé à séparer son propre avenir géopolitique de son assise naturelle, et donc de Moscou. Si nous analysons ce qu’on a appelé la « Révolution orange » [1], nous pouvons nous rendre compte que derrière ces conquêtes de la soi-disant société civile ukrainienne on trouvait les intérêts de Washington. Nous ne devons pas non plus oublier le rôle des dits philanthropes tel Georges Soros non seulement dans la déstabilisation de l’Ukraine, mais aussi dans celle des ex-républiques yougoslaves. Quand l’Ukraine a abandonné ou tenté d’abandonner son propre contexte géopolitique naturel, celui de partenaire privilégié de Moscou, il est évident que Moscou a essayé de fixer le prix de son gaz sur celui du marché, étant donné que l’Ukraine n’était plus un client privilégié mais un client comme tous les autres. Évidemment la dispute a fini par toucher l’Europe, parce que les leaders ukrainiens manquent de souveraineté et sont pilotés par des intérêts occidentaux sous direction états-unienne. Au lieu de chercher un accord économique, comme on le fait habituellement entre pays souverains, l’Ukraine a aggravé la situation en soustrayant le gaz destiné aux pays européens. Cette véritable raison de la crise a été ignorée par la presse de l’Europe Occidentale, italienne comprise. Dans la dispute du gaz, la majorité des journalistes italiens s’est concentrée non pas sur les vraies raisons, mais sur la diabolisation du gouvernement russe : en disant que dans la question du gaz il avait utilisé la géopolitique comme une arme, alors que le Président Medvedev et le Premier ministre Poutine ne faisaient qu’appliquer des prix de marché à des réactions économiques normales sur le gaz.RT : L’Ukraine est au bord de la faillite. La Russie ne peut pas compter sur le fait que l’Ukraine paiera des tarifs fondés sur des prix de marché, l’an prochain.

Tiberio Graziani : Je crois qu’il est possible de trouver un accord économique. Moscou et Kiev peuvent aussi négocier des réductions. Je voudrais encore une fois souligner qu’il ne s’agit pas que d’un problème de transactions économiques, d’importation et d’exportation. C’est une question géopolitique. Il est évident que si l’Ukraine choisit de se ranger avec l’Occident sous la conduite de Washington, cela influencera non seulement le commerce du gaz, mais aussi d’autres aspects économiques. Je crois, donc, qu’il sera possible de trouver une solution économique, mais la résistance vient de Kiev, car cela dépend des intérêts de Washington.RT : À propos de Washington, parlons des bases militaires états-uniennes sur le territoire italien. Quelle est votre opinion à ce sujet ?

Tiberio Graziani : La majorité des gens est consciente de la présence des bases militaires mais n’en est pas consciente politiquement. Voila pourquoi, dans le cas de l’extension de la base militaire de Vicence, au nord-est de notre pays, on a surtout fait des considérations de caractère environnemental. Le motif principal et fondamental est par contre resté caché, alors qu’en réalité cette extension sert aux forces armées états-uniennes : dans le but de les mettre en mesure d’opérer en coordination avec une base militaire assez proche, située en Serbie (Camp Bondsteel, NdT), elle aussi dépendante de Washington. Dans l’avenir il sera possible, pour les USA, d’opérer dans des pays frontaliers et au Proche et Moyen-Orient, dans des nations comme la Syrie et l’Iran, et dans une certaine mesure, en Russie aussi. La nation yougoslave, dans ce cas la Serbie, n’a pas été choisie par hasard, mais parce qu’elle a des affinités culturelles et ethniques avec Moscou.RT : La crise du gaz a exaspéré les tensions entre la Russie et l’Union européenne, et de nombreux État européens sont déjà en train de chercher des fournisseurs alternatifs. La Russie a-t-elle une raison de s’en préoccuper ?

Tiberio Graziani : Non, je ne crois pas que la Russie doive en être préoccupée. Je pense que chaque pays doit chercher les meilleures opportunités sur le marché pour s’assurer ses fournitures énergétiques et son autosuffisance. Dans un contexte géopolitique eurasiatique plus vaste, je crois que les relations entre la Russie et l’Europe, et entre la Russie et l’Italie, devraient se fonder sur leurs intérêts économiques : sur l’échange de nouvelles technologies de frontière, de technologie militaire, de ressources énergétiques et, évidemment, des relations culturelles. Je pense que les relations culturelles entre l’Union européenne et l’Italie, et, naturellement, la Fédération russe, devraient être renforcées. Après la Seconde Guerre mondiale, il y a pus de 60 ans, ces relations ont connu un déclin parce qu’elles ont été entravées par la classe intellectuelle et politique européenne qui a soutenu l’occidentalisation ou américanisation de la culture européenne. Si nous comparons la littérature européenne et celle de l’Italie de ces dernières années avec celles des années Trente, nous pouvons remarquer que beaucoup d’écrivains utilisent une langue beaucoup plus incorrecte, avec de nombreux emprunts à l’anglais. C’est un résultat de la colonisation culturelle que Washington a mené depuis la Seconde Guerre mondiale. Il est intéressant de noter que cette tendance est aussi présente dans les pays de l’ex-bloc soviétique.RT : Quelle est la ligne italienne qui prévaut dans les rapports avec la Russie ? Les Russes peuvent-ils compter sur le fait que l’Italie joue un rôle pour améliorer les relations entre la Russie et l’Union européenne ?

Tiberio Graziani : Bien sûr, évidemment l’Italie, avec d’autres pays de l’Union Européenne, est un partenaire potentiel de la Russie. Mais pour être un véritable partenaire et pas seulement potentiel, l’Italie devrait avoir une plus grande liberté et la souveraineté politique totale, qu’elle n’a pas pour le moment. Je voudrais rappeler qu’en Italie il y a plus de 100 sites militaires qui dépendent, directement ou indirectement, des États-Unis, et qui font partie du plan états-unien d’influence et d’occupation militaires de toute la péninsule européenne. Dans ces conditions l’Italie et d’autres pays sont limités dans l’expression de leurs intérêts politiques et économiques. Mais il faut aussi reconnaître que ces dernières années la politique économique du président Poutine, d’abord, et de l’actuel président Medvedev, a jeté les bases pour que l’Italie devienne un véritable partenaire de Moscou, pas seulement d’un point de vue économique mais aussi du point de vue politique et, je crois, militaire. L’Italie est située dans la zone méditerranéenne et elle occupe une position stratégique importante. En outre sa position centrale est aussi fondamentale à un niveau géopolitique, par rapport à l’Afrique du Nord et au Proche et Moyen-Orient. Il serait juste qu’elle l’utilise à des fins d’intégration eurasiatique. Je crois que le relations entre la Russie et l’Italie vont en s’améliorant : les entrepreneurs italiens sont en train d’aller dans la bonne direction, parce qu’ils arrivent à dépasser les limites imposées par un pouvoir politique qui vient directement de Washington et Londres.RT : Vous êtes très critique à l’égard de Washington, et vous décrivez les États-Unis presque comme une nation impériale. Mais nous ne vivons plus, désormais, dans un monde unipolaire.
Tiberio Graziani : Je suis très critique à l’égard de Washington parce qu’il a inclus l’Europe dans son propre espace politique et la considère comme une tête de pont pour attaquer tout le sol eurasiatique. Cela me rend critique, mais il faut naturellement aussi toujours tenir compte de l’importance et de la signification des États-Unis. Et les États-Unis devraient comprendre aussi que l’époque où ils étaient une super-puissance est terminée. Actuellement, au 21ème siècle, nous avons au niveau géopolitique un système multipolaire avec la Russie, la Chine, l’Inde, les États-Unis et certains pays d’Amérique du Sud, qui eux aussi sont en train de créer leur entité géopolitique : je fais référence au Brésil, à l’Argentine, au Chili, au Vénézuela et évidemment aussi à la Bolivie.
En particulier, la plus grande liberté dont jouissent ces pays sud-américains peut permettre à l’Union européenne de quitter le bloc occidental dominé par les États-Unis et par la Grande-Bretagne.

RT : Vous connaissez les ponts chauds de l’Europe et les régions séparatistes. Vous avez fait partie des observateurs des élections en Transnistrie. Il y a une île au large de la Sardaigne en Italie (Malu Entu) qui vient juste de déclarer son indépendance, qui dit s’inspirer de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud. Existe-t-il une formule universelle avec laquelle on peut aborder la question du séparatisme ?
Tiberio Graziani : Les questions sont complètement diverses. En Sardaigne il y a un mouvement politique séparatiste, mais en Italie d’autres séparatistes /sécessionnistes siègent maintenant au Parlement et sont au gouvernement. Pour ce qui concerne la Transnistrie [2], il est nécessaire d’évaluer la situation du point de vue géostratégique. La Moldavie et la Roumanie ressentent le poids des États-Unis et de l’OTAN. Le conflit de la Transnistrie fait partie de ceux qu’on appelle conflits gelés. Je pense que l’indépendance de la Transnistrie serait intéressante, parce que dans ce cas-là elle deviendrait une zone où les États-Unis ne pourraient pas entrer. Ce serait un territoire libre du pont de vue eurasiatique, car la Transnistrie aurait sa souveraineté. Je n’analyse pas cette république sur la base de son gouvernement actuel. Je me borne à en analyser sa situation géostratégique et géopolitique. Car si la Transnistrie est une république autonome cela signifie que, sur son petit territoire, il n’y a pas de bases de l’OTAN.

Entretien disponible en version anglophone sur Russia Today
Version italienne traduite par Manuela Vittorelli sur Eurasia. Rivista di studi geopolitici.
Version française de Marie-Ange Patrizio.

[1] « Washington et Moscou se livrent bataille en Ukraine », par Emilia Nazarenko et la rédaction ; « Ukraine : la rue contre le peuple », Réseau Voltaire, 29 novembre 2004.
[2] Sur la Transnistrie, voir : « Au cœur de la Guerre du gaz, la petite République de Transnistrie » et « Tiraspol, base avancée de l’armée russe ? », par Arthur Lepic, Réseau Voltaire, 3 juillet et 15 août 2007 ; « En 1992, les États-Unis tentèrent d’écraser militairement la Transnistrie », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 17 juillet 2007.

Alexandre DOUGUINE par Alexandre LATSA

*

1 – Alexandre DOUGUINE, je doute que mes lecteurs ne vous connaissent pas et renvoie sinon à vos écrits et à la biographie complète de Métapedia à votre sujet. Néanmoins pouvez vous présenter et synthétiser votre combat politique et géopolitique jusqu’à ce jour ?
Je suis né le 7 janvier 1962 à Moscou, dans une famille de militaires. Mon père était officier et mère médecin. Au début des années 80 en étant dissident et ayant l’aversion pour le système communiste en peine décadence, j’ai fait connaissance des petits groupes traditionalistes et des cercles politico-littéraires de Moscou, où participaient le romancier Youri Mamleev, qui émigrera par la suite aux Etats-Unis, le poète Evgueni Golovine et l’islamiste Gueydar Djemal, fondateur en 1991 du Parti de la renaissance islamique. C’est aussi à cette époque que j’ai découvert les écrits d’Evola, de Guénon, de Coomaraswamy et de bien d’autres auteurs (en 1981, j’ai traduit en russe le livre de Julius Evola Impérialisme païen, qui sera diffusé clandestinement en samizdat).

Après la désintégration du système soviétique, au début des années 1990, j’ai crée l’association Arctogaia et le Centre d’études méta stratégiques, après les revues Milyi Angel et Elementy, qui paraîtront jusqu’en 1998-99. Mes idées ont été influencées a partir des années 80 par la Nouvelle Droite européenne et au premier lieu par Alain de Benoist que je tiens en plus grand estime jusqu’à présent. Je le considère un des meilleurs intellectuels français actuels – peut être même le meilleur.

Dernièrement je m’intéresse beaucoup à la philosophie de Martin Heidegger, à la sociologie de M.Mauss, L.Dumont, P.Sorokin et surtout à Gilbert Durand (récemment découvert par Alain de Benoist), mais également à l’anthropologie de G.Dumézil et de Claude Levy-Strauss. J’ai écrit plusieurs textes sur l’économie – entre autres sur les idées de Friedrich List, sur Schumpeter et F.Brodel.

A l’Université de l’Etat de Moscou, j’ai donné des cours de la Postphilosophie étudiant la philosophie de la postmodernité etc. Maintenant je suis professeur à la faculté sociologique et dispense les cours de Sociologie structurelle (sur la base des idées durandiennes sur l’imaginaire)

Si j’étais obligé de définir mes positions philosophiques je les décrirais comme appartenant au “traditionalisme”.
Au premier lieu, je suis le disciple de René Guenon et de Julius Evola.

Dans la grande publique en Russie et dans quelques autres pays (Turquie, Serbie, le monde arabe etc) mes écrits géopolitiques sont très connus.

Mon idée est simple: il faut combattre l’impérialisme américain, le monde unipolaire et l’universalisme des valeurs libérales, marchandes et technocrate. Comme Alternative cela devrait être l’organisation du monde multipolaire comme ensemble de grandes espaces – chacun avec ses systèmes des valeurs propres – sans aucun préjugés.

Pour réaliser ce projet il faut créer le projet eurasien – commun pour l’Europe et la Russie mais avec les alliances stratégiques avec d’autres forces et cultures qui rejettent le mondialisme américain et la dictature libérale planétaire. L’eurasisme que je défends c’est le pluralisme absolu des valeurs.

2 – Les bruits ont courus que vous seriez en quelque sorte un “conseiller” (plus ou moins proche) de Vladimir Vladimirovitch Poutine. Pouvez vous le confirmer ? Et est ce que cela a changé depuis la présidence Medvedev ?
Je travaille avec les gens qui sont assez proches de Poutine et de Medvedev.
Je crois que pour l’instant Medvedev suit la même direction que Poutine.

3 – La Russie semble sortir d’une longue hibernation et se préparer a être un acteur de premier plan. Pensez vous que ce pays est les moyens de surmonter les défis en cours ? (démographie, santé, provocations militaires occidentales, immigration très forte.. etc etc). Comment jugez vous la situation en Russie en 2009, avec la crise financière mondiale ?
L’histoire est ouverte. Personne ne connais l’avenir. Je crois que la Russie va a entrer dans la période cruciale de son histoire. La crise va avoir un grand impact sur l’économie russe qui reste, hélas, libérale.
Mais cela va peut être guérir les illusion du pouvoir quant a l’efficacité des préceptes libéraux.

4 – L’unilatéralisme totalitaire décrété en 1991 par l’Amérique semble être arrivé a son terme. On assiste à une sorte de renaissance de grands espaces auto-centrés en Asie (Chine, Inde), dans le monde musulman (Turquie, union panafricaine ..), en Eurasie (Russie ..), en Amérique du sud (Brésil, Vénézuela ..), pensez vous que l’on doive s’en réjouir et pourquoi ?
Je voudrais que cela soit ainsi, mais il est trop tôt pour fêter la victoire. Un jour les États Unis tomberont mais pas maintenant. Je crois qu’ils vont faire LA guerre – Une Troisième Guerre mondiale pure et dure – qui causera d’immenses peines a l’humanité. Les États Unis ne peuvent plus gouverner le monde c’est sur, mais ils ne peuvent pas non plus se résigner – Cela serait pour eux une catastrophe. Leur seule solution – essayer de transposer leur problèmes sur les autres. Ca veut dire la guerre. Sans la fin previsible.

5 – L’Europe semble totalement absente de cette renaissance géopolitique, tellement elle est inféodée au parapluie Américain, quelle est votre opinion sur l’Union Européenne et sur la place que devrait avoir l’Europe dans le monde, et avec avec la Russie ?
Je crois que il y a deux Europe. L’Europe continentale (Franco-Allemande) et l’Europe atlantiste (Nouvelle Europe inclue). Ces deux Europes sont géopolitiquemet opposées en tout. Cela explique le blocage. Avec Sarkozy et Merkel la position des forces continentales est devenu plus faible. Je n’ai aucune recette pour l’Europe. C’est l’affaire des européens – quoi choisir.

6 – Vous êtes membre du mouvement eurasien, pouvez vous nous présenter ce mouvement (et sa structure jeune) et en définir le projet politique ?
Quelles sont ces ramifications en Europe, et ailleurs ? Pensez vous que ce “projet Eurasien” est proprement Russe ou est adaptable et conciliable avec la pensée pan-européenne (une europe libérée des chaînes Américaines) ?
Alexandre DOUGUINE ayant eu l’amabilité de détailler le programme global du mouvement Eurasien, je renvoie mes lecteurs à ce texte extrêmement intéressant ici.

7 – Pour beaucoup de Français la Russie est un modèle pour sa capacité à proposer un contre modèle civilisationnel, autre que le modèle libéral anglo-saxon et capitaliste. Cela dépasse le clivage droite-gauche, et réunit autant des communistes que des gaullistes historiques ou encore des nationalistes. Des voix s’élèvent même pour que la France intègre l’organisation de la coopération de Shanghai et quitte l’OTAN.
Pourtant au même moment, l’administration Sarkosy semble jouer sur deux tableaux : l’adoucissement avec la Russie (cf avec la guerre en Georgie) tout en réintégrant le commandement armé de l’OTAN ! Jugez vous cette double orientation crédible, et quel en est d’après vous le sens profond ?

Le la juge non crédible et contradictoire.
Quant a la Russie il est un peu naïf de croire que notre économie fonctionne bien. Il manque chez nous le secteur réel et le développement des technologies nouvelles. La Russie a besoin de l’Europe comme l’Europe a besoin de la Russie pour avoir des économies mutuelles garanties par les ressources nécessaires et l’accès aux technologies nouvelles.


8 – Pour les Européens, les grandes inquiétudes du futur sont le plausible leadership économique Chinois et l’explosion démographique des populations musulmanes, notamment à l’intérieur de l’Europe. Comment estimez vous compatible / incompatible ces deux éléments ? Il apparaît que le sujet de l’Islam, ou celui des “relations” avec la Chine par exemple n’est pas abordé de la même façon en Europe et en Russie.
On a les mêmes soucis géopolitiques. Mais on doit commencer par hiérarchiser les dangers.

Premièrement il faut se débarrasser des américains et de la dictature de la pensée unique, et seulement après s’occuper des chinois et de musulmans. Ils faut proposer aux musulmans le modèle de l’intégration dans la culture européenne mais pour cela il faut garder – parfois sauver – cette culture-la. Les chinois sont très sympathiques quand ils vivent en Chine.

Mais pour régler cette affaire de contrôle des vagues migratoires il est de nouveau – nécessaire de se débarrasser des mondialistes, libéraux et des atlantistes. Ce cercle vicieux ne peut être brisé qu’en commençant par la lutte antiaméricaine. Les musulmans et les chinois sont des défis secondaires. C’est pareil que cela soit pour l’Europe et pour la Russie.


9 – L’amérique de Obama “semble” vouloir faire la paix avec le monde entier, j’ai lu son programme, celui ci est pourtant largement plus offensif que celui de McCain notamment en Afghanistan/Pakistan pour poursuivre la lutte contre les “Talibans”. Comment jugez vous cette élection et quels changements peux on attendre d’après vous dans les relations avec la Russie ?

Vous avez raison. Obama dépend du consortium politique et géopolitique américain. Donc il n’est pas libre de faire quoi que ce soit. Il va faire la guerre exactement comme le ferrait Mac cain.
C’est la logique des lois géopolitiques et non les opinions personnelles qui comptent dans les affaires réelles globales.

10 – Le pentagone semblait vouloir aspirer l’Ukraine dans l’OTAN (après l’échec Georgien) et installer sa flotte dans la mer noire. Ajouté aux remous politiques en cours et aux échéances électorales proches en Ukraine, peut on d’après vous imaginer un “conflit” proche dans ce pays et une scission en deux ou trois entités, a la manière yougoslave ?
En Ukraine habitent au moins deux peuples avec des orientations géopolitiques, stratégiques, culturelles et religieuses contraires. Il n’y a pas un peuple ukrainien. C’est l’appellation générale basée sur le critère territorial – les Ukrainiens ce sont littéralement « les habitants d’Ukraine » (en slave, ça veut dire « provence »). Ethniquement on les appelle « malorossy » — « petits russes » littérairement. La langue ukrainienne a été créée artificiellement dans XIX siècle par les Polonais qui ont stylisé plusieurs dialectes « malorosses » avec les formes artificielles et assez affreuses imitant maladroitement le Polonais. En créant ce monstre linguistique, on a L’Ukraine actuelle est profondément divisée. L’élite politique est orange, orientée envers OTAN, l’UE et se base sur l’appui des habitants de l’Ouest ukrainien. Cette zone n’entre pas dans l’espace eurasien, il faut le reconnaître. Mais cette élite orange veut imposer sa volonté sur les masses de l’Est où la population se considère russe, rejette l’UE et l’OTAN et veut exister dans le grand espace commun avec les Russes de la Russie. Cette masse forme le second peuple (ou le premier) de l’Ukraine. Ce peuple est chrétien orthodoxe, malorosse (petit-russe) ou velikorosse (grand-russe), il consiste pour la plupart en des descendants des cosaques, et s’identifie à l’Empire eurasien. Ce peuple vote régulièrement pour le « Parti des régions » et en faveur de Yanoukovitch. La carte électorale de l’Ukraine montre comment ce pays est devisé en deux parts.
Dans le cas de l’Ukraine les eurasistes russes et ukrainiens agissent en logique avec leur vision du monde. Nous sommes contre l’Etat-Nation ukrainien parce qu’il est pro-américain, atlantiste et anti-eurasien. Mais aussi parce que le régime du néo-nazisme orange c’est une des parts du “système à tuer les peuples”.
C’est le peuple de l’Ukraine de l’Est et de Crimée qui est maintenant en danger d’être oppressé, épuré et anéanti.

11 – L’agitation est également grande autour de l’arctique, cette zone énergétique essentielle. Récemment, les pays de l’OTAN ont organisé des manoeuvres militaires à grande échelle en Norvège (7.000 soldats de 12 pays) pour simuler une invasion de l’arctique et une sécurisation des champs pétroliers. Pensez vous que l’arctique puisse devenir la zone de conflit essentielle du 21ième siècle comme le pensent certains spécialistes en géopolitiques ?
Je pense que l’Artique devient la place centrale de la stratégie d ‘encerclement de la Russie – pour des raison stratégiques et pour la raison des ressources naturelles.

12 – Pensez vous plausible, ou souhaitable une alliance de l’hémisphère nord (amerique- europe – russie), comme l’a évoqué Dmitri Rogozine récemment pour parer à une éventuelle anarchie dans l’hémisphère “sud” ?
Je considère Rogozine comme atlantiste, opportuniste et neo-nazi antisémite. Il discrédite l’idée nationale russe et travaille toujours pour les américains. Il participait en Kiev à la révolution orange au cote des oligarques Berezovski et ses valets (tel Belkovsky).

13 – Comment voyez vous la situation mondiale en disons 2020 ? Et la Russie (alors que le Kremlin a développé ce fameux plan 2020) ?
Le plan 2020 ne vaut rien. Il n’existe pas. Je crois qu’au Kremlin maintenant prévalent les idées tactiques.
Donc j’attends la guerre et je crois que dans les prochaines années la situation changera trop pour faire quelques prévisions que ce soit.

14 – Le 24 mars dernier, c’était l’anniversaire des bombardements de 1999 sur la Serbie, que vous inspire cet évènement ?
La haine contre les américains et la solidarité avec le peuple serbe héroïque qui a eu assez de dignité de lancer ce “défi” au monstre américain.

15 – Pourriez vous conseiller 5 ouvrages clefs a lire, 5 sites / blogs a consulter ?
5 ouvrages
Alain de Benoist «Contre le libéralisme»
Gilbert Durand «Structures anthropologiques de l’imaginaire»
Julius Evola « Révolte contre le monde moderne»
Rene Guénon «La crise du monde moderne»
Alexandre Douguine «Le prophète de l’eurasisme»

5 sites
Géostrategie
GRECE
VOXNR
Eurasie en francais

Le blog d’Alexandre Latsa

16 – Avez vous quelquechose à rajouter ?
rien. Bien a Vous.

10 ans déjà, par Pierre Henri Bunel

Comme je le mentionnait dans mon article de hier (reprenant une nouvelle de l’agence NOVOpress), les Francais ont pris la parole (indirectement) au meeting du 24 mars 2009 à Belgrade. En l’espèce Mila Aleckovic Nikolic à lu la déclaration de Pierre Henri Bunel, patriote Francais qui a défendu la Serbie jusqu’au bout, écopant de 5 ans de prison pour “trahison”.


Voila ci dessous le discours de PHB à Belgrade traduit en Francais, la version Serbe étant ici

Dix ans déjà !

Il y a dix ans commençait une opération d’agression de l’Otan contre un peuple fier et libre, le peuple Serbe. Ce drame intervenait avec la complicité d’une partie des opinions publiques abusées par la propagande de l’Otan et de ses satellites.

Pour avoir pris part à une action qui visait à empêcher une telle forfaiture, c’est de l’intérieur d’une prison française que j’ai suivi tous les épisodes de cet événement qui frappera d’opprobre ses coupables pour une longue période de l’histoire.
J’ai ressenti devant ce crime annoncé un double sentiment de honte et de fierté.

D’abord la honte : celle de voir mon pays s’engager volontairement dans cette trahison. Une trahison envers lui-même d’abord parce que les raisons invoquées ne reposaient sur rien, parce que participer à cette infamie ne pouvait pas servir le peuple français et enfin, et c’est peut-être le plus grave de l’affaire, parce que nos dirigeants trahissaient ainsi une amitié traditionnelle fondée sur l’héritage de l’histoire.

En bombardant Belgrade comme l’avaient fait les nazi pendant la seconde guerre mondiale, les « alliés » ne pouvaient que ternir fortement leur image pour les temps à venir.

Mais j’ai aussi ressenti un sentiment de fierté.

J’avais appris à connaître le Peuple Serbe pendant mon déploiement en Bosnie-Herzégovine. Certes, la situation des Serbes de Bosnie-Herzégovine était difficile, mais ils ont toujours fait montre de loyauté à leur parole dans tout ce que les forces d’occupation leur demandaient.

Il ne s’agissait pas de basse « collaboration » mais de respect de la parole donnée, entérinée par la signature du diktat de Dayton. Ils sont les seuls à avoir fait preuve de tant de courage et de loyauté en cette période qui était déjà fort peu glorieuse pour les complices de l’Otan.

Et dans ma prison parisienne, je ne pouvais que ressentir un sentiment d’amitié envers les Serbes injustement frappés pour avoir voulu défendre leur existence, leur culture et leur liberté. Pour avoir défendu leurs droits les plus élémentaires, en somme. J’ai été fier de voir ces patriotes se masser sur les ponts sous les bombardements pour servir de boucliers humains à leur patrie bien aimée.

Au cours de ma détention, j’ai reçu de nombreux témoignages de sympathie venant des Serbes de France mais aussi de Serbie. J’ai dans mon bureau une carte postale représentant des militaires serbes et français lors de la campagne des Balkans en 1918. Sur cette carte postale, il est écrit, en serbe : Srpski i francuski oficiri u I svetla skom ratu et, en français dans un cartouche « Merci mon commandant Pierre-Henri BUNEL ! La Serbie prie le Dieu pour Toi en ce mars 1999. Il s’agit de la carte n° 188 des Éditions Francophiles 1999. et porte la signature Branko Vasilijević, prof. Cette carte ne me quitte pas, d’une maison à l’autre.

Lorsque je suis enfin sorti de prison le 29 août 1999, vous aviez gagné. Les coups sauvages de vos ennemis n’avaient pas réduit votre résistance, on n’entendait plus parler ni la Secrétaire d’État des États-Unis, ni le verbeux Richard Holbrooke. Tous ces « courageux » bavards avaient laissé la place à… un négociateur finnois.

Certes, les dégâts contre la Chère Serbie avaient été énormes, mais vous n’aviez pas cédé, et vous aviez gardé votre président.

Lorsqu’en 2003, invité par les Éditions Guntenberg Galaksija et sont directeur M. Mile Bverlic, qui a bien voulu éditer en serbe mon livre « Crimes de Guerre à l’Otan », j’ai enfin pu venir rendre visite à ce pays que j’aime tant et rencontrer les héros qui avaient tenu sous les bombes assassines. J’ai aussi pu franchir l’Ibar à Kosovska Mitrovica, sous les regards haineux d’Albanais suffisants mais sous la protection des Serbes restés sur la rive nord. J’ai alors mieux compris combien mon pays d’Ariège, dans les montagnes du sud de la France, est proche de cette province du sud de la Serbie. Proche par ses montagnes, proche par ses habitants qui sont eux aussi habitués au dur travail de l’agriculture de montagne, aux hivers rudes. Les gens de mon pays ont eu eux aussi à lutter contre des envahisseurs venus du nord et le haut lieu de Montségur est pour nous autres pyrénéens comme Kosovo Poljé pour la Nation Serbe.


Mais la forfaiture a continué avec l’acceptation par des satellites de Washington de l’indépendance de la province Serbe de Kosovo i Metohija.

La France aussi a connu des périodes sombres de son histoire. Elle aussi s’est trouvée amputée de l’Alsace et de la Moselle par les hordes germaniques. De 1940 à 1945, elle aussi a été envahie. Et nous en sommes sortis.

Certes, on peut penser qu’elle est à nouveau sur une pente dangereuse. Mais, à elle comme à la Serbie, il reste un espoir. Les mêmes forces qui ont conduit à la mutilation de la Serbie et qui conduisent à la mutilation de la France, conduiront aussi à la résurrection de nos deux peuples.

Mais il faut pour cela que la jeunesse serbe et la jeunesse française ne se laissent pas aveugler par les mirages de la société de consommation.

Les peuples qui n’ont pas d’histoire n’ont pas d’avenir. En revanche, ceux qui savent conserver leurs traditions, tout en prenant dans le modernisme des éléments positifs, ceux qui savent garder la conscience de ce qu’ils sont, de ce que les ont faits leurs pères, ceux-là ont de l’avenir.

L’évolution du monde prouve que les modèles que prônent nos ennemis sont éminemment fragiles parce qu’ils reposent sur la mollesse et la paresse. Dans le monde qui se dessine, l’avenir sera à ceux qui sont durs à la tâche et rustiques dans leurs aspirations. C’est notre devoir, à nous adultes de montrer le droit chemin à nos enfants. Guidés par nos popes, mais à la force de notre énergie, il nous appartient de reprendre les rênes de nos destins.

Les Serbes sont courageux, ils l’ont montré au cours de leur histoire et au moins depuis la Bataille du Champ des Merles – Kosovo poljé – de plus, ils ne sont pas seuls même si leurs frères des combats futurs sont encore contraints au silence. La foi en Dieu, en son pays et en ses traditions est la source de l’avenir glorieux.

En ce dixième anniversaire d’un malheur qui aura une fin, je voulais vous dire à tous mon amitié et l’amour que je vous porte.

Gloire et longue vie au Peuple Serbe ! Votre ami, votre frère :

Pierre-Henri BUNEL

24/03/2009 : 10.000 résistants à Belgrade !

Lu sur NOVOpress Le 24 mars dernier, à l’appel du mouvement 1389, l’association, du Parti radical serbe, des associations Liberté , Dverispske et Tchetniks du Monténégro ainsi que des mouvements nationalistes russes Obraz et Jeune Russie, près de 10 000 personnes se sont rassemblées à Belgrade pour commémorer le dixième anniversaire de la guerre déclenchée le 27 mars 1999 par l’OTAN contre la Serbie. Cette agression militaire, qui a duré 78 jours, a provoqué la mort de près de 4 000 personnes et en a blessé plus de 10 000.

Le meeting a débuté à 19 heures alors que trônaient sur la tribune un drapeau impérial serbe et un portrait de Ratko Mladic, toujours recherché par le TPI et point d’achoppement pour une avancée franche des négociations d’intégrations de la Serbie à l’UE.

Différents orateurs Russes ont pris la parole. Parmi eux, le général Leonid Ivashov, le député russe Maxim Mishchenko, le leader du mouvement nationaliste russe Narodnaya Volya, Sergei Baburin, ou encore Konstantin Zatulin, président de la commission de la CEI à la Douma russe. Se sont également exprimés le major Zoran Tmushich, un vétéran de la guerre en Bosnie, le général Milétic, le chef de la défense aérienne en 1999, ainsi que l’actrice Ivana Zhigon. Des représentants de France, du Canada et d’Allemagne étaient présents tels que l’écrivain, traducteur, scénariste et réalisateur autrichien Peter Hanke, le juriste américain Ramsey Clark ou encore le général français Pierre Marie Gallois.

Dans son discours, M. Mishenko a prévenu : « le principal danger pour la Serbie et la Russie : les organisations non gouvernementales financées par l’Ouest comme par exemple ce ministère des minorités créé en Serbie en octobre 2000 et qui est devenu une sorte de ministère de toutes les déviances, favorisant notamment la gay parade en Serbie. » « Voilà ce qui attend la Russie si les agents de l’Occident tels que Kasparov, Kassianov ou Nemtsov arrivent à des postes d’influence », a-t-il mis en garde.

A la fin du meeting, les militants du mouvement 1389, dirigés par Misa Vacic ont brûlé le drapeau de l’Union européenne.

1389 avait diffusé un communiqué prévenant que la manifestation aurait « une dimension patriotique » et que 10 ans après, les Serbes n’avaient pas oublié, que « le TPI fonctionnait toujours tout comme l’uranium appauvri que l’Amérique avait déversé sur la Serbie. » Lors de la dispersion, le Mc Donald de Belgrade a, comme il est désormais de coutume, été incendié par les militants.

Un 24 mars 2009 à Belgrade

KOSOVO IS SERBIA!
Le Kosovo est Serbie!
KOSOVO JE SRBIJA!
Косово е Сърбия!
Kosovo ist Serbien!
Το Κοσσυφοπέδιο είναι η Σερβία!
Kosovo is Servië!
Kosowo to Serbia!
O Kosovo é Sérvia!
KOSOVO ESTE SERBIA!
Kosovo es Serbia!
Kosovo är Serbien!
КОСОВО ЭТО СЕРБИЯ!
Kosovo je srbsko!
Косово є Сербія!
科索沃是塞尔维亚 !






Sources : le blog de Maxim Mishenko

1999-2009 : la lettre à mes amis Serbes

Bonjour mes amis Serbes !
C’est un honneur pour moi de vous écrire de Moscou !

Dans quelques jours nous serons le 24 mars 2009, un jour tragique puisque il y a 10 ans, une coalition militaire des pays les plus puissants de la planète, fédérés au sein de l’OTAN, entamait une campagne de bombardement militaire de 78 jours sur la Serbie. Sur Votre Serbie.
Officiellement cette opération militaire a été déclenché pour arrêter les massacres, que dis-je, le “génocide” en cours soi-disant au Kosovo. Savez vous que en France le chiffre de 1 million de morts a même été avancé au journal télévisé ?
Officieusement, nous savons tous très bien pourquoi l’OTAN a bombardé la Serbie : parce qu’elle était le seul état digne d’Europe, le seul état souverain et libre, le seul état à ne pas se plier au diktat libéral-atlantiste, et à “résister” à l’extension à l’est de l’OTAN.
Avec cette campagne nous disait on pourtant, nous allions pouvoir arrêter le génocide du Kosovo et faire de la Serbie un état “démocratique”, “libre” et “prêt à intégrer l’Union Européenne”, entendez là un état dirigé par un gouvernement de caniches prenant ses ordres à Bruxelles, c’est à dire en fait indirectement au Pentagone et prêt à vendre ses patriotes et ses héros.

10 ans plus tard, la Serbie n’a toujours pas intégré l’Union Européenne. Mieux, ceux-là même qui crièrent au génocide virtuel ont découpé le pays, refaisant les frontières comme ils l’ont fait en Afrique et en Asie dans leurs ex-colonies, arrachant à la Serbie ce qu’elle avait de plus cher : son cœur ! Depuis un peu plus d’un an en effet, le Kosovo “serait” un “état indépendant”, reconnu par moins d’un état sur trois dans le monde à ce jour, au passage en grande majorité les pays de l’OTAN (qui ont bombardé la Serbie) et leurs nouveaux “alliés” libérés (Irak, Afghanistan :).

Imagine-t-on un organisme quel qu’il soit fonctionner sans son cœur ? Pour l’OTAN, au nom du droit international, c’est possible. Ils ont enfanté un monstre, une zone de non droit ou les églises brûlent, ou l’on assassine les gens en fonction de leur race et de leur religion, un peu comme au Rwanda, mais le tout au cœur de l’Europe. De la même façon, ces puissants ont créé un pseudo-tribunal (le TPI) pour rendre justice. Réflexion miroir de la société qu’il est censé représenter, cet ersatz de tribunal juge et condamne les gens en fonction de leur race et de leur religion et assassine certains prévenus sans même les juger.

Un commentateur avisé (Arnaud Borella) affirmait ceci : “sait-on que le Kosovo est doucement en train d’être accaparé par l’Albanie ? Sait-on que l’Albanie a permis au Kosovo l’utilisation du port de Shengjin situé au nord de l’Albanie ? Que le préfixe international du Kosovo ne sera plus celui de la Serbie (+381) mais celui de l’Albanie (+355) ? Je ne suis pas non plus sûr que le monde sache que les douanes entre le Kosovo et l’Albanie ont été abolies, tandis qu’au même moment la KFOR locale renforce les taxes douanières et le contrôle aux frontières entre la Serbie et le nord du Kosovo. La guerre du Kosovo a été une guerre de conquête et non une guerre de libération. Les « Kosovars » n’existent que dans les journaux occidentaux et le Kosovo est en train de devenir ni plus ni moins qu’une région d’Albanie“.
Voilà le résultat de 10 ans d’ingérence Américaine au coeur de notre Europe.

Je lisais récemment cette histoire incroyable dans un zoo de suède ou les employés racontaient que un de leurs singes, probablement plus évolués que les autres, préparait des projectiles qu’il alignait dans sa cage et les lançait contre les touristes qui venaient l’observer de trop près. Les employés du zoo bien que surpris du geste hautement technique de ce pauvre singe affirment avoir trouvé la solution pour qu’il n’importune plus les clients, le castrer. Ainsi disent-ils celui-ci sera “plus docile“.
Voila ce qui a tenté d’être fait par l’OTAN en Serbie : une castration. Le vrai génocide est là.

En mars 2009 l’opinion mondiale constate tout ce que le Kosovo est devenu : une province occupée souillée à l’uranium appauvri, une province occupée au main de groupes mafieux blanchis par le TPI, pouvant retourner à leur occupation principale : la traite des blanches et le trafic de drogue à destination de l’Union de Bruxelles. Une province occupée ou des habitants vivent parqués dans des ghettos, sous le regard morne et vide du monde entier, comme notre singe au zoo en Suède.

 Voila le résultat de la non unité Européenne.

Mais le Kosovo n’est pas perdu !
L’OTAN et ses valets Bruxellois n’ont pas fait plier la résistance Serbe qui vient de donner au monde entier un exemple inédit de courage, de force et de détermination. Car les Serbes doivent avant tout savoir qu’ils ne sont pas seuls ! L’UE, l’ONU n’ont toujours pas reconnu le Kosovo et ne le reconnaîtront jamais ! Au cœur de l’Europe : la Grèce, l’Espagne, la Roumanie, la Slovaquie, Chypre ont refusé de céder malgré des pressions énormes. A travers le monde, la Chine, l’Inde, le brésil, le Kazakhstan, l’Argentine, la Moldavie et bien d’autres sont …. Opposés à l’indépendance du Kosovo !
Dans tous les autres pays, des centaines de milliers, des millions d’habitants soutiennent la Serbie.
Il y a aussi la Russie, cette grande sœur bienveillante qui a affirmé dès le premier jour que jamais elle ne reconnaîtrait le Kosovo. La Russie dont les dirigeants, Vladimir Poutine et Dimitri Medvedev en tête ont décidé de prendre leur destin en main. La Russie qui aujourd’hui propose aux Européens un “choix” absolument essentiel pour la survie de notre civilisation et de nos peuples.

Le temps est venu pour les Européens de prendre leur destin en main, cet avenir qui ne se situe pas par delà l’atlantique au sein de l’OTAN mais derrière l’oural, dans une gigantesque alliance militaire continentale avec la Russie.
L’unité continentale voilà le seul espace qui garantira aux Européens, Serbes en tête l’assurance de vivre en paix et en liberté sur leur terre, au Kosovo. Plus que tout, il est évident que le Kosovo doit revenir à ses propriétaires, tout comme Chypre nord.

Il est temps que l’Europe cesse d’être une terre occupée, que ce soit par l’armée Turque ou par les soldats Américains, sous bannière de l’OTAN.

Le 24 mars au soir je ne serais pas physiquement à Belgrade, mais mon cœur et mon âme seront avec vous mes amis Serbes.

Dès le lendemain, la lutte reprendra et ne s’arrêtera que lorsque l’occupation du Kosovo cessera !

Plus que jamais ce soir je vous salue et vous rappelle mon serment de fidélité à l’égard de la Serbie : vive la Serbie, vive le Kosovo Serbe !

Zivela Srbija ! Kosovo je Srbija ! Hourrah !

Alexandre LATSA

Да здравствует Сербия !

Приветствую вас, мои сербские друзья!

Для меня честь писать вам из Москвы!

Через несколько дней насупит 24 марта, 2009 г. – трагический день для всех нас, ведь десять лет назад военная коалиция мощнейших держав мира под эгидой НАТО, начала военную кампанию, длившуюся 78 дней – бомбардировки Сербии. Вашей Сербии.

Официально, эта военная операция была направлена на то, чтобы остановить «бойню» – или, лучше сказать, геноцид, который якобы имел место в Косово.

Знаете ли вы, что во Франции в новостях сообщали не менее чем о миллионе убитых? Неофициальная причина бомбежек Сербии силами НАТО нам хорошо известна: ведь это была единственная достойная европейская страна, единственное суверенное и свободное европейское государство, единственное государство, которое не склонилось перед либеральной атлантистской диктатурой.

Единственное государство, которое препятствовало расширению НАТО на восток. Эта кампания, говорили нам, европейцам, направлена на то, чтобы остановить геноцид в Косове и превратить Сербию в «демократическое», «свободное» государство, включенное в структуру Евросоюза. То есть, по правде говоря, Сербия стала бы государством с марионеточным правительством, которое бы прямо подчинялось Брюсселю, а косвенно – пентагону. Сербии пришлось бы предать своих патриотов и своих героев.

Прошло десять лет, а Сербия до сих пор не интегрирована в Евросоюз. Более того, те, кто прежде кричал о геноциде, теперь разделили страну и перекроили ее границы, как когда-то перекраивали границы своих бывших колоний в Африке и Азии.

Они вырвали у Сербии самое драгоценное: ее сердце!

Фактически, уже четь больше года Косово стало «независимым государством», которое ныне признано большинством стран НАТО (тех самых, которые бомбили Сербию), а так же их новыми освобожденными союзниками: Ираком и Афганистаном. Но можно ли себе представить, чтобы организм функционировал без сердца? Для НАТО с их «международным правом» – такое вполне возможно. НАТО породило чудовище – территорию беззакония и анархии, где горят храмы, где людей убивают за веру и цвет кожи – совсем как в Руанде, но в самом центре Европы.

Точно так же, эти доминирующие державы создали и Международный Трибунал по бывшей Югославии, наказуя и милуя по своему усмотрению. Этот эрзац-трибунал идеально отражает ситуацию в обществе: где приговоры зависят от религии и цвета кожи подсудимых, а некоторых из них даже казнят без суда и следствия.

Проницательный телеведущий Арно Борелла прокомментировал это так: «Знают ли люди, что Косово постепенно поглощается Албанией? Знают ли, что Албания предоставила Косово в свободное пользование гавань Шенгжин, находящуюся на севере страны? Знают ли, что телефонный код для Косово будет теперь не сербским (+381), а албанским (+355)? Я так же не уверен, что люди знают, что на границе Косово и Албании таможни были упразднены, зато теперь местные власти устраивают таможни на границе Сербии и северного Косова. Война за Косово была не освободительной, но завоевательной войной! «Косовары» как этнос существуют только на страницах западной прессы, пока Косово становится, не больше не меньше, районом Албании».

Таковы результаты десяти лет американского вмешательства в самом сердце Европы.

Недавно я слышал, что в одно шведском зоопарке произошла такая история: работники зоопарка рассказывали, что один самец шимпанзе, возможно самый умный среди своих родичей, готовил в клетке различные предметы, которые раскладывал ровно в ряд, а затем бросал в туристов, подходивших слишком близко к клетке. Работники зоопарка, удивленные таким неординарным проявлением интеллекта у животного, в конце концов, пришли к выводу, что бедную обезьяну следует кастрировать, чтобы она стала спокойнее.

То, что НАТО сделало с Сербией – это именно кастрация. Это и есть настоящий геноцид!

Подводя итоги, мир сам может судить, чем стало Косово к марту 2009 г.: оккупированной территорией, чья почва еще хранит память о бомбардировках; подневольной провинцией в руках мафиозных групп, на которые закрывает глаза Международный Трибунал и которые теперь занимаются своим излюбленным ремеслом: торговлей белыми рабами и трафиком наркотиков в Европу. Провинцией, где местное население загнано в гетто, на что равнодушно смотрит весь мир. Совсем как с бедной обезьяной в шведском зоопарке!
Но Косово еще не потеряно! НАТО и его брюссельские лакеи не сломили Сербское сопротивление, которое дало всему миру новый пример бесстрашия, решимости и силы духа. Пусть сербы знают, что они не одиноки. И в Евросоюзе и в ООН есть государства, которые не признали и никогда не признают Косово! В самом сердце Европы, несмотря на большое давление, все еще не признают Косово: Греция, Испания, Румыния, Молдавия, Словакия, Кипр. Что касается держав всего мира, среди них против независимости Косово были: Китай, Индия, Бразилия, Казахстан, Аргентина и многие другие! В этих странах сотни тысяч, и даже миллионы поддерживают Сербию!

Среди них так же и Россия, великая и милостивая сестра, которая с первого дня отказалась признавать Косово. Россия, чьи лидеры Владимир Путин и Дмитрий Медведев решили взять судьбу в свои руки. Россия, которая сегодня предлагает Европе уникальный шанс для выживания нашей цивилизации и наших народов.

Время пришло и европейцам взять свою судьбу в свои руки, направить взор не к Атлантике, не к НАТО, но на восток, к Уралу. Эта судьба – континентальный союз с Россией, который единственно может гарантировать, что европейцы и, прежде всего, сербы, смогут жить мирно и свободно на своей земле. Косово, как и северный Кипр, должно в первую очередь вернуться к своим законным хозяевам. Пора Европе перестать быть оккупированной землей, не важно под каким флагом идут оккупанты – под турецким флагом или флагом НАТО.

Вечером 24 марта я не смогу быть в Белграде, но мое сердце и душа будут с вами, мои сербские друзья! На следующее утро борьба продолжится и не закончится, пока Косово не будет свободным!

Сегодня, как никогда прежде, я салютую Вам и напоминаю о моей клятве верности Сербии:

Да здравствует Сербия! Да здравствует сербское Косово!

Zivela Srbija! Kosovo je Srbija!

Ура! 

1999-2009 : Vive la Serbie !

Bonjour mes amis Serbes !

C’est un honneur pour moi de vous écrire de Moscou !

Dans quelques jours nous serons le 24 mars 2009, un jour tragique puisque il y a 10 ans, une coalition militaire des pays les plus puissants de la planète, fédérés au sein de l’OTAN, entamait une campagne de bombardement militaire de 78 jours sur la Serbie. Sur Votre Serbie.

Officiellement cette opération militaire a été déclenché pour arrêter les massacres, que dis je, le “génocide” en cours soit disant au Kosovo. Savez vous que en France le chiffre de 1 millions de morts a même été avancé au journal télévisé ?

Officieusement, nous savons tous très bien pourquoi l’OTAN a bombardé la Serbie : parce qu’elle était le seul état digne d’Europe, le seul état souverain et libre, le seul état à ne pas se plier au diktat libéral-atlantiste, et à “résister” à l’extension à l’est de l’OTAN.

Avec cette campagne nous disait on pourtant, nous allions pouvoir arrêter le génocide du Kosovo et faire de la Serbie un état “démocratique“, “libre” et “prêt à intégrer l’Union Européenne“, entendez la un état dirigé par un gouvernement de caniches prenant ses ordres à Bruxelles, c’est à dire en fait indirectement au Pentagone et prêt à vendre ses patriotes et ses héros.

10 ans plus tard, la Serbie n’a toujours pas intégré l’Union Européenne. Mieux, ceux la même qui crièrent au génocide virtuel ont découpés le pays, refaisant les frontières comme ils l’ont fait en Afrique et en Asie dans leurs ex-colonies, arrachant à la Serbie ce qu’elle avait de plus cher : son coeur ! Depuis un peu plus d’un an en effet, le Kosovo “serait” un “état indépendant”, reconnu par mois d’un état sur trois dans le monde à ce jour, au passage en grande majorité les pays de l’OTAN (qui ont bombardé la Serbie) et leurs nouveaux “alliés” libérés (Irak, Afghanistan :).

Imagines t’on un organisme quel qu’il soit fonctionner sans son coeur ? Pour l’OTAN, au nom du droit international, c’est possible. Ils ont enfanté un monstre, une zone de non droit ou les églises brûlent, ou l’on assassine les gens en fonction de leur race et de leur religion, un peu comme au Rwanda, mais le tout au coeur de l’Europe. De la même façon, ces puissants ont créés un pseudo-tribunal (le TPI) pour rendre justice. Réflexion miroir de la société qu’il est censé représenter, cet ersatz de tribunal juge et condamne les gens en fonction de leur race et de leur religion et assassine certains prévenus sans même les juger.

Un commentateur avisé (Arnaud Borella) affirmait ceci : “sait on que le Kosovo est doucement en train d’être accaparé par l’Albanie ? Sait on que lAlbanie a permis au Kosovo l’utilisation du port de Shengjin situé au nord de l’Albanie? Que le préfixe international du Kosovo ne sera plus celui de la Serbie (+381) mais celui de l’Albanie (+355) ? Je ne suis pas non plus sur que le monde sache que les douanes entre le Kosovo et l’Albanie ont été abolies, tandis qu’au même moment la KFOR locale renforce les taxes douanières et le contrôle aux frontières entre la Serbie et le nord du Kosovo. La guerre du Kosovo a été une guerre de conquête et non une guerre de libération. Les « Kosovars » n’existent que dans les journaux occidentaux et le Kosovo est en train de devenir ni plus ni moins qu’une région d’Albanie“.

Voilà le résultat de 10 ans d’ingérence Américaine au coeur de notre Europe.

Je lisais récemment cette histoire incroyable dans un zoo de suède ou les employés racontaient que un de leurs singes, probablement plus évolués que les autres, préparait des projectiles qu’il alignait dans sa cage et les lançait contre les touristes qui venaient l’observer de trop près. Les employés du zoo bien que surpris du geste hautement technique de ce pauvre singe affirment avoir trouvé la solution pour qu’ils n’importent plus les clients, le castrer. Ainsi disent ils celui ci sera “plus docile“.

Voila ce qui a tenté d’être fait par l’OTAN en Serbie : une castration. Le vrai génocide est la.

En mars 2009 l’opinion mondiale constate eux tout ce que le Kosovo est devenu : une province occupée souillée à l’uranium appauvri, une province occupée au main de groupes mafieux blanchis par le TPI, pouvant retourner à leur occupation principale : la traite des blanches et le trafic de drogue à destination de l’Union de Bruxelles. Une province occupée ou des habitants vivent parqués dans des ghettos, sous le regard morne et vide du monde entier, comme notre singe au zoo en Suède.

Voila le résultat de la non unité Européenne.

Mais le Kosovo n’est pas perdu !

L’OTAN et ses valets Bruxellois n’ont pas fait plier la résistance Serbe qui vient de donner au monde entier un exemple inédit de courage, de force et de détermination. Car les Serbes doivent avant tout savoir qu’ils ne sont pas seuls ! L’UE, l’ONU n’ont toujours pas reconnu le Kosovo et ne le reconnaîtront jamais ! Au coeur de l’Europe : la Grèce, l’Espagne, la Roumanie, la Slovaquie, Chypre ont refusé de céder malgré des pressions énormes. A travers le monde, la Chine, l’Inde, le brésil, le Kazakhstan, l’Argentine, la Moldavie et bien d’autres sont …. opposés à l’indépendance du Kosovo !

Dans tous les autres pays, des centaines de milliers, des millions d’habitants soutiennent la Serbie.

Il y a aussi la Russie, cette grande soeur bienveillante qui a affirmé dès le premier jour que jamais elle ne reconnaitrait le Kosovo. La Russie dont les dirigeants, Vladimir Poutine et Dimitri Medvedev en tête ont décidé de prendre leur destin en main. La Russie qui aujourd’hui propose aux Européens un “choix” absolument essentiel pour la survie de notre civilisation et de nos peuples.

Le temps est venu pour les Européens de prendre leur destin en main, cet avenir qui ne situe pas par delà l’atlantique au sein de l’OTAN mais derrière l’oural, dans une gigantesque alliance militaire continentale avec la Russie.

L’unité continentale voila le seul espace qui garantira aux Européens, Serbes en tête l’assurance de vivre en paix et en liberté sur leur terre, au Kosovo. Plus que tout, il est le Kosovo doit revenir à ses propriétaires, tout comme Chypre nord. Il est temps que l’Europe cesse d’être une terre occupée, que ce soit par l’armée Turque ou par les soldats Américains, sous bannière de l’OTAN.

Le 24 mars au soir je ne serais pas physiquement à Belgrade, mais mon coeur et mon âme seront avec vous mes amis Serbes. Dès le lendemain, la lutte reprendra et ne s’arrêtera que lorsque l’occupation du Kosovo cessera !

Plus que jamais ce soir je vous salue et vous rappelle mon serment de fidélité à l’égard de la Serbie : vive la Serbie, vive le Kosovo Serbe !

Zivela Srbija ! Kosovo je Srbija ! Hourrah !

Alexandre LATSA

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