Category Archives: Révolutions de couleur

Help Maidan, Help Hong Kong?

Maidan : 02/2014.
A very young, pure, modern (western) and communicative ukrainian girl explains in English : “We want to be free from a dictatorship … Free from politicians who work only for themselves… We want to live a normal life, we are civilized people but our people are barbarians … This is not Soviet union … (…)  We want to be free … (…) Please help us and share this videos to your friend, families, governements …

(Support human rights in Ukraine) – (Fight for freedom and democracy).

Hong Kong : 09/2014.
A very young, pure, modern (western) and beautiful Hong kongese girl explains in English : “We want free elections … (…) We are peaceful people (…) Please help us since you have free elections choices and do have democracy which we don’t …(….)

La Russie, par-delà l’Europe ?

9eu-flag-russ-0_1

A la fin de l’année 2010, j’écrivais un texte intitulé Moscou, capitale de l’Europe dans lequel j’appelais à la réalisation d’un projet politique reposant sur la création d’une entente approfondie entre Paris, Berlin et Moscou.

 

Une entente des nations dominantes du continent afin de permettre la réalisation du projet français d’union continentale, un demi-siècle après qu’il ait été formulé par le Général De Gaulle.

Ce projet aurait eu le double intérêt historique et géopolitique de permettre le rapprochement de l’Europe de l’Ouest et de la Russie mais aussi et surtout de permettre le renforcement d’une forme d’équilibre et de multipolarité au sein de l’hémisphère nord.

Près de quatre ans après la publication de ce texte, il semble que la chance de voir se réaliser ce moment historique, destiné à permettre l’émergence d’un monde multipolaire et donc d’équilibre des puissances, soit totalement passée.

L’occupation croissante des espaces politiques, moraux, culturels et sécuritaires des nations européennes par les réseaux américains et l’Otan, processus entamé en 1945, a entrainé l’Atlantisation (on peut parler d’Otanisation) que vit l’Europe actuellement, processus qui devrait vraisemblablement s’accentuer avec la concrétisation de l’union transatlantique en 2015.

A l’Est du continent, de nouveaux signaux sont également apparus. Le réveil russe s’est accompagné d’une mise en garde à l’Occident, après la guerre en Géorgie, que l’extension de l’Otan ne pouvait pas être infinie mais était clairement ressentie par Moscou comme une pression et une agression. Les propositions russes d’architecture européenne commune de sécurité se sont-elles heurtées au mur étoilé de l’Otan, tandis que l’intégration militaire au sein de l’Eurasie n’a pour l’instant trouvé des oreilles qu’à l’Est et non à l’Ouest du continent. Continue reading

Printemps en Crimée : vers la fin du monde unipolaire ?

La visite du président américain a vraisemblablement confirmé l’improbable : le « mouvement géostratégique » russe pourrait initier la sortie du monde de l’instant unipolaire qu’il connaît depuis 1991 et marquer le coup d’arrêt de la domination totalitaire américaine (politique, économique ou militaire) en Europe et en Eurasie.

A la veille de sa tournée de six jours en Europe, le président américain assurait pourtant que les sanctions contre la Russie seraient lourdes et sévères. Sa tournée en Europe devait soi disant lui permettre de réaffirmer la totale unité entre l’Amérique et l’Europe au sein de l’OTAN (pour le « bien du monde ») et par la même l’isolement de la Russie sur la scène internationale.

Cette totale unité de l’Amérique et de l’Europe selon les règles de l’OTAN reste en réalité à sens unique et la délégation américaine n’a même pas pu contenir son mépris lors dupathétique discours du président du Conseil européen Herman Von Rompuy lors de sa conférence de presse avec le président américain à Bruxelles.

Si l’Europe a rarement semblée aussi désunie, il en va visiblement de même pour l’intangible partenariat euro-américain.

Barack Obama a en effet pu constater à quel point les nations européennes, à la grande différence de Bruxelles, refusent clairement et simplement le diktat américain contre la Russie. Certaines comme la Suisse ou la Finlande affirmant clairement leur refus d’intégrer certaines personnalités russes sur les « listes américaines » pendant que d’autres, comme la France, choisissaient souverainement de poursuivre de lourds échanges économiques (et militaires) avec la Russie, comme la livraison des Mistral.

Les nations européennes n’ont évidemment aucun intérêt à se brouiller avec la Russie alors que leurs échanges économiques réciproques sont non seulement très importants mais surtout croissants, comme c’est le cas pour la France par exemple. France qui comme lerappelait récemment Emmanuel Quidet, président de la Chambre de commerce et d’industrie franco-russe, est devenue le « 3ème investisseur étranger en Russie (…) alors qu’elle occupait la 9ème place en 2008 ».

Si le président du Conseil européen a été littéralement humilié, le président américain ne manque visiblement pas non plus d’humour lorsqu’il affirme que la Russie est aujourd’hui devenue une « puissance régionale en perte d’influence ». Cette image du colosse aux pieds d’argile qui accompagne la Russie depuis son retour dans les affaires du monde ne s’applique en effet certainement plus sur le plan politique comme les événements en Crimée viennent de le confirmer.

La Russie est au contraire en train de redevenir un modèle régional que les habitants de Crimée sont les premiers mais sans doute pas les derniers à reconnaître publiquement. Il y a sans doute une raison simple à cela. La politique américaine de prise de contrôle des pays de l’ex-espace soviétique au cours de la dernière décennie s’est avéré un échec avec des effets retors imprévisibles : la prise de pouvoir d’élites aux ordres (issues des révolutions de couleurs ou de processus politiques plus traditionnels) dans les pays voisins de la Russie a entrainé un affaissement et un appauvrissement de ces Etats.

Dans le même temps (depuis 2000) les élites russes ont elles mis fin à la récession économique, permis le doublement du PIB par habitant (en monnaie constante), créé une balance des paiements courants devenue fortement et structurellement excédentaire, réduit l’inflation à moins de 6% (contre 100% dans les années 90), réduit la dette publique de 90% à moins de 10% du PIB, réduit le taux de pauvreté de plus de 50%, permis la hausse des réserves de change par 48 fois, la nationalisation de 95% du secteur énergétique, la hausse des salaires dans le public par 18,5, la hausse des pensions par 12, l’arrêt de l’effondrement démographique et surtout stoppé le processus de décomposition politique et d’éclatement territorial qui guettait le pays.

Une situation inverse à celle que connaît par exemple l’Ukraine d’aujourd’hui (mais pas seulement) et les habitants de Crimée, en votant leur rattachement à la Russie, ont clairement exprimé leur soutien à ce modèle fort. Un modèle fondé sur la réaffirmation de l’autorité de l’Etat et dans lequel les oligarques ont été mis en prison pendant qu’en Ukraine, l’Etat s’effondre alors que les oligarques sont en train d’arriver au pouvoir, que ce soit dans les régions ou au sommet de l’Etat, les deux candidats présidentiables, Timoshenko et Porochenko étant tous deux oligarques.

Que se passera-t-il demain si des millions d’Ukrainiens supplémentaires, des millions de Kazakhes, de Biélorusses ou des dizaines de milliers de Moldaves choisissent, par pragmatisme et face à des situations économiques désespérées, de vivre comme des Russes et non comme des Grecs ?

Reparti quasi-bredouille de sa tournée européenne, le président américain a martelé l’importance des pays Baltes et de la Pologne dans le dispositif d’extension de l’OTAN sur la frontière Est de l’Europe en affirmant « qu’aujourd’hui des avions de l’Otan patrouillent dans les cieux de la Baltique, nous avons renforcé notre présence en Pologne et nous sommes prêts à faire plus ».

De plus, cela signifie visiblement pour les stratèges américains de transformer du gaz de schiste et de tenter de le vendre sous forme de gaz naturel liquéfié justement aux pays baltes et à la Pologne (dont la dépendance énergétique envers la Russie est aujourd’hui quasi totale), transformant ainsi les plus fidèles alliés européens de l’OTAN en relais militaro-énergétiques américains au cœur du continent. Une mesure qui traduit bien l’inquiétude et l’impuissance de la diplomatie américaine alors que les contributions de la plupart des pays d’Europe à l’OTAN sont elles en baisse.

A la veille de la création du marché transatlantique, pour lequel le président Obama aactivement mais prudemment plaidé lors de sa visite, cette impuissance semble parfaitement correspondre avec le besoin croissant de Russie qu’expriment pragmatiquement les nations européennes. Un besoin croissant de Russie pour, paradoxalement, avant tout tenter de surmonter au mieux les conséquences terribles sur leurs économies de la crise financière américaine de 2008.

Assistons-nous aux prémisses d’un nouvel ordre stratégique mondial ?

Une alliance orange-brune?

imagesIl y a près de deux ans, j’écrivais une tribune qui tentait d’expliquer la naissance quasi-inévitable d’un courant politique nouveau en Russie, sorte de syncrétisme entre une version modérée et occidentalisée du libéralisme des années 90 et une version 2.0 moins modérée du nationalisme russe, dans sa version la moins impériale mais la plus nationale, sur le modèle européen.

Ce courant politique nouveau a pris la succession des nationalismes préhistoriques et impériaux classiques de Russie et aussi la succession des courants ultra libéraux sans foi ni morale des années 90, en créant une nouvelle idéologie que l’on qualifie de nationale-démocrate ou nationale-libérale.

Ce courant sociopolitique a en réalité surtout émergé à Moscou et Saint Petersbourg, lors des grandes manifestations de fin 2011 qui ont fait suite aux élections nationales que ces manifestants jugeaient truquées et injustes. Cette idéologie est donc très en vogue aujourd’hui chez les jeunes russes des grandes villes modernes qui souhaitent s’identifier culturellement, moralement et politiquement à l’Europe de l’Ouest et à l’occident en général.  On a majoritairement qualifié, à tort ou à raison, de « classe créative » cette fraction de l’opinion, en quelque  sorte l’équivalent russe du Bobo Français.

Pourtant les tentatives d’entrée en politique de ce mouvement créatif, national et libéral ont jusqu’à maintenant échoué. Les figures marquantes de ce mouvement n’ont pas pu passer le barrage des urnes lors des échéances électorales qu’elles ont affronté. Continue reading

Réflexions sur les rêves de l’Est du continent

Ukrainian Parliament elections campaign

Cette année 2014 a commencé, c’est le moins que l’on puisse dire sur le plan de l’actualité, sur les chapeaux de roues. La question ukrainienne est dans beaucoup de cercles de pensée, de milieux politiques, apparue comme une nouvelle question yougoslave, au cœur de la question plus large elle de l’Europe. Sur mon humble page Facebook, des discussions au sujet de la situation en Ukraine et des conséquences pour l’Europe ont dépassé les 400 commentaires, prouvant ainsi la grande sensibilité de ces thématiques mais aussi et surtout l’apparence de nouvelles lignes de fractures.

 

Au sein d’une certaine gauche sociale-démocrate, européiste et pro américaine, on se réjouit de la situation qui démontre que l’Union de Bruxelles séduit toujours plus à l’Est. Même son de cloche à droite et au centre ou, me racontait récemment un initié, on pense qu’il faut désormais aller de l’avant et penser au futur, c’est-à-dire que l’Ukraine doit rejoindre la famille européenne. Continue reading

Les périphéries de l’UE et le rêve européen

171792180_80d29e4225_z

De 2004 à 2005, l’Union Européenne a connu une phase active d’expansion à l’Est et le « rêve européen » s’est projeté a travers les Etats Baltes et l’Europe des Balkans. Ce rêve européen a en 2005 continué son expansion à l’Est puisqu’au cœur de Kiev, une ravissante et charismatique oratrice blonde éructait sur l’émancipation nationale ukrainienne, sa sortie du joug européen et son inévitable destin européen. Huit ans plus tard, alors que l’Ukraine n’est toujours pas en Europe mais est un Etat au bord de la ruine, les manifestations ukrainiennes de ces derniers jours tendent à prouver que le « rêve ukrainien » d’une partie de la population ukrainienne existe toujours.

Pourtant, parmi les nouveaux entrants dans le club européen, les mécontents existent.

Récemment le journal Reporter décrivait les désillusions des Lettons dont le pays a rejoint l’UE en 2004. Apres l’euphorie des premières années, le pays a aujourd’hui la gueule de bois. Si l’UE a aidé au développement des infrastructures, elle a surtout aidé au développement du secteur bancaire, le commerce et la construction à crédit via un accès simplifié au crédit et la hausse provisoire des salaires. Dans le même temps, Bruxelles remplaçait la production alimentaire locale par ses propres produits et contribuait à la destruction de l’industrie lettone puisque si l’industrie représentait 38 % du PIB letton sous l’époque soviétique, elle se situe à 9 % aujourd’hui lorsque les entreprises locales ne se font pas également imposer des quotas pour limiter leur production.

Le rêve d’indépendance de la fière lettonne a tourné court : l’économie est passée sous contrôle étranger (suédois notamment) et c’est désormais les Russes qui investissent dans le pays, prouvant ainsi que l’histoire est cruellement ouverte.

Depuis 2008, ce sont près de 250.000 Lettons (sur une population de 2 millions d’habitants) qui ont quitté leur pays pour aller travailler ailleurs, surtout des jeunes et des diplômés, mettant le pays au bord d’une situation démographique catastrophique.

Ces migrations internes sont un facteur inquiétant du déséquilibre qui est en train de se créer au cœur d’une Europe minée par une immigration externe déjà conséquente. L’OCDEconstatait récemment qu’en Espagne, 70% des moins de 30 ans envisagent de quitter le pays(250.000 personnes quittent le pays chaque année), qu’un million de Portugais auraient quitté le pays depuis 14 ans dont 240.000 rien qu’en 2011, que 300 000 personnes ont quitté l’Irlande depuis le début de la crise (chiffres équivalents à ceux de la grande famine irlandaise au 19ème siècle. La tendance est bien évidemment similaire en Grèce et le rapport explique qu’au total, l’émigration des pays d’Europe du Sud a augmenté de 45% entre 2009 et 2011.

La tendance n’est d’ailleurs pas cantonnée aux pays en crise de la zone euro ni a l’Europe du Sud puisque 10% des Lettons ont quitté leur pays, et la Bulgarie comme l’Ukraine se vident littéralement de leurs habitants malgré le fait que ces pays n’appartiennent pas à la zone Schengen. Cette aspiration du capital humain du pays qui fait suite à la destruction de l’économie traduit bien ce que le Premier ministre roumain Victor Ponta appelle le « grand rêve européen de la Roumanie », c’est-à-dire d’après lui la conviction de la population du pays qu’il est finalement impossible de construire une « véritable Europe » en Roumanie, mais qu’il est possible de partir « dans la vraie Europe » pour y travailler ou y vivre grâce aux prestations sociales. On ne saurait mieux résumer la situation.

Bien sûr, le rêve d’Europe (au sens large) est compréhensible mais le rêve d’Europe de nos frères européens d’Europe de l’Est me fait penser au rêve francais de Russes d’aujourd’hui. Il n’existe plus précisément puisqu’il s’agit d’un rêve.

La France rêvée (la vieille France) n’est plus. Quand à l’Europe de la liberté, des infrastructures de qualité et des subventions, c’est celle des années 2000 et elle non plus n’existe plus.

Le rêve des Ukrainiens de voir Bruxelles par un coup de baguette magique faire apparaitre des routes de bonne qualité et des politiciens non corrompus est un rêve d’enfant aussi peu réalisable que celui de se baigner dans de l’eau chaude a Riga en février. Cela n’arrivera évidemment pas alors que les accords avec l’UE devraient par contre permettre :

1) La destruction de l’industrie et du système agricole ukrainien en échange de l’accès au marché ukrainien pour les produits européens, transformant l’Ukraine en simple pays d’écoulement pour maintenir en vie une Europe sous perfusion ;

2) L’émigration massive de jeunes Ukrainiens et Ukrainiennes vers des pays où la situation globale y est moins mauvaise qu’en Ukraine, transformant ce pays en fournisseur de bras bons marchés et aggravant au passage la situation démographique d’un pays qui sur ce plan est déjà presque en phase terminale.

Est-ce là le futur que l’on peut souhaiter à l’Ukraine ?

La bataille pour l’Eurasie va-t-elle s’accélérer?

L’article original a été publié sur RIA-Novosti

*
“Les Etats-Unis s’opposeront à des processus d’intégration dans l’espace postsoviétique”. Hillary Clinton – 2012

Les récentes déclarations de la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton sur l’intention de Washington de s’opposer aux processus d’intégration dans l’espace postsoviétique lors d’une conférence tenue à Dublin le 6 décembre 2012 ont au moins un mérite, celui de démontrer que l’Union Douanière, et donc la future Union Eurasiatique sont considérés par l’administration américaine comme le mal absolu.
Hillary Clinton n’a pas pris de gants, pour elle, l’union eurasiatique n’est ni plus ni moins que la réincarnation de l’Union Soviétique, et traduit
donc la volonté de la Russie de vouloir reprendre le contrôle du cœur del’Eurasie, que Russie et Occident, via l’Angleterre puis l’Amérique, se disputent depuis prés de 150 ans.

Un retour en arrière s’impose pour comprendre ce que signifie la bataille pour le contrôle de l’Eurasie, qui est tout sauf un fantasme ou une légende. Il s’agit au contraire d’une réalité géopolitique quiconstitue un volet important de la politique étrangère américaine et occidentale depuis la chute du mur de Berlin.

Durant la guerre froide, la puissance américaine ne luttait pas seulement pour la victoire contre son adversaire Soviétique, elle luttait aussi pour le contrôle du monde. Ce faisant, les stratèges américains restaient fidèles à la ligne tracée par les maitres de la géopolitique anglo-saxonne, particulièrement Halford Mackinder et Nicholas Spykman. Pour ces derniers, la maitrise du monde ne pouvait passer que par le contrôle de la zone ou devait se concentrer dans l’avenir tant le gros des habitants, que le gros des ressources énergétiques de la planète: l’Eurasie, encore appelée l’Ile Monde ou Heartland.
” Qui contrôle le Heartland, contrôle le monde “.  Halford John Mackinder – 1919
En ce sens, la mise sous tutelle après 1945 de l’Europe de l’ouest par l’Otan n’a été rien de plus qu’une mise en application des principes de Nicholas Spykman qui jugeait lui essentiel de maitriser l’anneau périphérique (Rimland) de cette Ile monde, de ce Heartland continental.
L’Europe de l’ouest représente la partie occidentale sous contrôle de cet anneau. Comme on peut le voir ici, La zone qui s’étend du pourtour de la caspienne jusqu’à l’Asie centrale constitue sa partie orientale et c’est précisément cette zone qui est visée par les propos d’Hillary Clinton.
” Qui contrôle le Rimland contrôle l’Eurasie. Qui dirige l’Eurasie contrôle la destinée du monde”. Nicholas J. Spykman – 1942
Les tentatives avortées du GUAM (Géorgie, Ukraine, Azerbaïdjan, Moldavie) puis la tentative de prise de contrôle de ces mêmes états (membres de cet anneau périphérique) par les révolutions de couleurs planifiées aux USA doivent être comprises et vues dans ce sens: comme une étape nouvelle du containment russe, préalable essentiel au bouclage du Rimland. D’ailleurs, dans sa déclaration Hillary Clinton a insisté sur la déception profonde que représentait l’Ukraine pour le département d’état Américain, tout un symbole lorsqu’on sait l’énergie et les moyens mis en œuvre par l’administration américaine pour faire de l’Ukraine un pion essentiel de l’Otan. Un projet ancien qui prévoyait la constitution d’un axe Allemagne-Pologne-Ukraine dont Zbigniew Brezinski rêvait déjà en 1997 et qui selon lui devait servir à repousser l’influence russe le plus à l’est possible, et renforcer l’Otan au cœur de l’Europe de l’est.

“Il est impératif qu’aucune puissance eurasienne concurrente capable de dominer l’Eurasie ne puisse émerger et ainsi contester l’Amérique”. Zbigniew Brezinski – 1997
Bien sur les déclarations d’Hillary Clinton ont provoqué les regrets de Leonid Sloutski, chef de la commission de la Douma pour les Affaires de la CEI. Celui-ci constatait que le potentiel croissant de regroupement géopolitique en Eurasie pourrait faire de cette région l’un des acteurs majeurs du monde. Une situation bien différente de celle qu’impliquait le monde unipolaire de 1991, qui ne laissait aucune place à la Russie.
Beaucoup de pays occidentaux appréciaient Eltsine surtout parce qu’il était le symbole d’une Russie faible, et le symbole de leur victoire sur l’URSS. 20 ans plus tard, alors que le centre de  gravité du monde se déplace vers l’Asie et la Chine, l’Occident américano-centré traverse une crise économique qui l’a considérablement affaibli sur la scène internationale. Pendant ce temps, à mi chemin entre l’Occident et l’Asie, la Russie s’est redressée pour redevenir aujourd’hui la puissance principale d’Eurasie.

Le monde multipolaire qui prend forme devrait vraisemblablement prendre l’aspect d’un monde d’alliances. Les grands états de ce monde
sont tous dans des logiques de regroupements économiques, politiques et militaires, que ce soit au cœur de l’Europe, par dessus l’Atlantique, en Amérique du sud  ou encore en Asie. Ces alliances pourraient rapidement voir l’émergence de blocs souverains tant sur le plan militaire, qu’économique ou politique, et la fragmentation du monde en zones d’influences souveraines.
Pourquoi les nations d’Eurasie n’auraient elle dès lors pas le droit de procéder à une intégration régionale approfondie?  Les menaces américaines contre une alliance volontaire de pays souverains semblent éloigner considérablement les possibilités d’un réel reset russo-américain. Le désaccord sur l’Affaire Syrienne, pays que l’Union Douanière envisageait du reste d’intégrer à une zone de libre échange il y a encore quelques mois, accentue encore le malaise.

Voila donc des propos belliqueux en provenance d’Amérique et prononcés à Dublin, alors même que le chef de l’état russe a pourtant récemment rappelé que la Russie devait trouver sa place géopolitique dans le monde de façon pacifique et que l’intégration eurasiatique devait elle se faire dans le respect de la souveraineté des états. Un principe de souveraineté nationale bien mis à mal durant l’époque unipolaire mais qui constitue tant le point névralgique du développement des BRICs (lire cette analyse a ce sujet) que le cœur de la politique internationale russe, notamment en Syrie.
Souveraineté VS interventionnisme, Unilatéralisme VS Multilatéralisme. Ces deux conceptions du monde diamétralement opposées vont-elles relancer la bataille pour l’Eurasie?

Bataille pour Moscou?

Le 20ème siècle a vu le remplacement de la domination anglaise par la domination américaine. Ce remplacement d’une  puissance maritime par une autre ne modifiera pas l’existence de deux contraintes incontournables: d’abord la maîtrise des mers mais aussi l’obligation d’intervenir  dans le centre  géo économique du monde. Ce deuxième objectif est inscrit dans la doctrine géopolitique anglo-saxonne, qui définit les rapports entre puissances mondiales comme une concurrence entre les puissances dites maritimes (Angleterre, Amérique), et celles dites continentales (Allemagne, Russie, Chine). Cette théorie est celle d’un des pères de la géopolitique moderne, Halford Mackinder (1861-1947), qui a défini  ’existence d’un “pivot du monde“ (Heartland) situé en Eurasie, dans une zone couvrant l’actuelle Sibérie,l’Asie centrale et le Caucase. Mackinder redoutait que cette zone du monde ne s’organise et ne devienne totalement souveraine, excluant ainsi l’Amérique de la gestion des affaires du monde. Le plus grand danger selon Mackinder aurait été une alliance des deux principaux empires continentaux que sont l’Allemagne et la Russie. Il appelle donc à la constitution d’un front d’états capable d’empêcher une telle coalition de voir le jour. Après 1945, l’URSS est vue de par sa taille et son influence comme la principale puissance susceptible d’unifier ce Heartland. Elle est donc devenue par défaut l’adversaire principal de l’Amérique. Une seconde théorie géopolitique développée par Nicholas Spykman (1893-1943) considère que la zone essentielle n’est pas tant le Heartland que  la région intermédiaire entre ce dernier et les mers riveraines. Cette seconde théorie, complétant la première, proposait d’empêcher la puissance continentale principale (URSS hier et Russie dès 1991) d’avoir accès aux mers. A cette fin, un front d’états devait également être créé mais afin de constituer et de contrôler une zone tampon entre l’URSS et les mers voisines (mer du nord, mer Caspienne, mer noire, mer méditerranée). 
Pour l’historienne Natalia Narochnitskaya, cette volonté d’endiguement est toujours d’actualité. Il s’agit surtout d’écarter la Russie du secteur nord de l’ellipse énergétique mondiale, zone qui comprend  la péninsule arabe, l’Irak, l’Iran, le Golfe persique, le Caucase nord (Caucase russe) et l’Afghanistan. Concrètement il s’agit de couper l’accès aux détroits, aux mers, aux océans ainsi qu’aux zones à fortes ressources énergétiques, et donc de repousser la Russievers le Nord et vers l’Est, loin de la méditerranée, de la mer noire, et de la mer Caspienne. Cette poussée s’exerce donc sur un premier front allant des Balkans à l’Ukraine pour le contrôle de la mer Égée et de la mer noire, et sur un deuxième front allant de l’Égypte à l’Afghanistan pour le contrôle de la mer rouge, du golfe persique et de la mer Caspienne.

Mainmise américaine sur la nouvelle Europe
A la fin de la seconde guerre mondiale, l’Amérique et l’URSS se font face, c’est la guerre froide dans un monde que l’on peut définir comme bipolaire. Cette guerre froide finira avec l’effondrement de l’URSS en 1991. Le monde d’après 1991 sera unipolaire et américano-centré,  le nouvel ordre mondial du président Bush père se concrétise dans les sables d’Irak en 1991. A l’époque beaucoup pensent que plus rien ne changera jamais, on parle de la fin des idéologies, voire de la fin de l’histoire avec une Amérique qui régnerait à jamais sur la planète. Pendant la guerre froide, l’Union européenne s’est bâtie sur des fondements transatlantiques, puisque c’est l’Amérique via le plan Marshall qui a « aidé » l’Europe ruinée à se reconstruire, avant de superviser sa transformation en Union européenne. Ambrose Evans-Pritchard, journaliste britannique du Daily Telegraph, expliquera après l’étude de documents rendus publics par les Archives nationales des États-Unis le rôle des services secrets américains dans la campagne en faveur d’une Europe unie, dans les années 1950 et 1960. Ces documents montrent que l’instrument principal de Washington dans la mise en œuvre de ce plan pour le continent était le Comité américain pour une Europe unie (American Commitee for a United Europe – ACUE), créé en en 1948. Donovan, qui se présentait alors comme un avocat en droit privé, en était le président de ce comité. Le vice-président était Allen Dulles, directeur de la CIA dans les années 50. Le conseil d’administration de l’ACUE comprenait Walter Bedell Smith, qui avait été le premier directeur de la CIA, et toute une liste d’anciennes personnalités de l’OSS et d’officiels qui faisaient des allers-retours avec la CIA. Les documents révèlent aussi que l’ACUE a financé le Mouvement Européen, qui était la plus importante organisation fédéraliste européenne pendant les années d’après-guerre. Le Département d’État joua également un rôle puisqu’une note de la direction Europe, datée du 11 juin 1965, conseille au vice-président de la communauté économique européenne [CEE, qui a précédé l’UE], Robert Marjolin, de poursuivre l’édification d’une union  monétaire européenne. Elle recommande d’empêcher tout débat jusqu’à ce que
l’adoption de telles mesures devienne pratiquement inévitable”. Enfin les documents confirment que l’Amérique œuvrait très activement dans les coulisses afin d’amener la Grande Bretagne à intégrer l’organisation européenne. Ceci permet de mieux comprendre la guérilla que l’Amérique a menée contre le général De Gaulle de  1961 à 1969 lorsque celui-ci empêchait  l’entrée de l’Angleterre dans l’Union européenne naissante.  Cette intégration transatlantique et occidentale se traduira par une solidarité anti-soviétique pendant la guerre froide. Peu à peu, l’extension de l’Otan est devenue une sorte de complément naturel de l’intégration de nouveaux états à l’Union européenne. Ainsi l’Otan empêche toute souveraineté militaire en Europe, alors même que l’organisation supranationale européenne est dépourvue de toute souveraineté politique. Cette extension vers l’Est de l’Otan, à un moment ou le pacte de Varsovie n’existe plus aura un dessein géopolitique bien précis: utiliser l’Europe comme tête de pont pour aider la percée Américaine vers le continent eurasiatique et refouler l’influence russe le plus a l’est de ce continent eurasiatique.La logique géopolitique est évidente: garder le contrôle du continent et une Europe coupée, afin d’éviter que l’Europe unifiée ne devienne un géant pôle politico-économique, concurrent de l’Amérique.

Années 2000 : La nouvelle donne
L’élection de Vladimir Poutine (qui pour l’analyste Aymeric Chauprade est un événement géopolitique majeur) et la renaissance rapide de la Russie ont modifié les rapports entre puissances pendant la dernière décennie. L’agrandissement de l’Otan en Europe orientale s’est accompagne d’une pression maintenue sur l’est de l’Europe et sur le Caucase. Plusieurs états ont été visés par des événements politiques similaires dans les années 2000: des révolutions de couleurs. Elles ont concerné principalement des états dont les régimes n’étaient pas spécialement hostiles a Moscou, ni réellement pro occidentaux. Dans le mainstream médiatique occidental on a souvent présenté ces événements comme des soulèvements spontanés et démocratiques. On sait aujourd’hui que les révolutions de couleur étaient en réalité des coups d’états démocratiques, sponsorisés et co-organisés de l’extérieur via un grand nombre d’ONGs, dont la liste est consultable ici. On a parlé « d’Orangisme » (en lien avec la révolution orange en Ukraine) pour qualifier ce courant géopolitique occidentaliste. La révolution en Ukraine a aussi pu bénéficier du soutien financier de donateurs plus inattendus comme l’oligarque libéral en exil Boris Berezovski pour qui la révolution était avant tout dirigée contre la Russie.

Le morcellement de la Russie, un objectif
géopolitique
En septembre 1997, l’un des plus influents politologues Américain, Zbigniew Brezinski a publié  un article sur la géopolitique de l’Eurasie expliquant que le maintien du leadership Américain passe par un découpage de la Russie en  trois états distincts qui seraient ensuite regroupés sous l’appellation “Confédération Russe” en affirmant dans son ouvrage « Le grand échiquier » qu’ainsi la Russie serait moins susceptible de nourrir des ambitions impériales et ne serait pas capable d’empêcher la prise de contrôle de l’Eurasie par l’Amérique.  Cette idée de démembrer la Russie en plusieurs états est ancienne. Lors du grand jeu au 19ème siècle, pendant la lutte opposant les empires russe et britannique en Asie centrale et dans le Caucase, l’Angleterre avait bien compris l’importance et Ottoman qui ouvraient à la Russie une l’accès à la méditerranée et à la mer noire. Dès 1835 l’Angleterre a donc tenté de déstabiliser la Russie notamment par des livraisons d’armes dans le Caucase, et par la création de comités Tchétchènes ou Tcherkesses lors du congrès de Paris en 1856, après la guerre de Crimée. Ce front Caucasien restera, au cours du 20ème et 21ème siècle une sorte de zone molle par laquelle l’Angleterre puis l’Amérique tenteront de déstabiliser la Russie. Au début du 20ème siècle en effet des responsables des républiques musulmanes de Russie, principalement dans le Caucase et en Asie centrale, tenteront d’organiser la bataille vers leur indépendance avec le soutien de l’Occident, c’est la naissance du Prométhéisme, un  mouvement qui a travers le siècle va lutter pour réveiller les identités et encourager divers séparatismes, afin d’affaiblir la Russie. Après la dislocation de l’URSS et la disparition du pacte de Varsovie, une partie des élites russes avait pensé avec  naïveté que la guerre froide était finie, et que l’Otan ne chercherait pas à s’agrandir.  Le soutien de Vladimir Poutine à Georges Bush en 2001 aurait pu marquer le début d’une collaboration dans l’hémisphère nord, au sein d’une alliance allant de Vancouver à Vladivostok. A cette fin, un conseil Russie-Otan  a même été créé en 2002. Mais contrairement aux promesses faites a la partie Russe, l’extension de l’Otan a continué vers l’est, dans une logique post-guerre froide, il y a eu les révolutions de couleur, et les intentions de l’Amérique dans le Caucase et en Asie centrale ne sont pas claires. Aujourd’hui l’encerclement de la Russie se poursuit avec l’installation du bouclier anti-missile aux frontières du pays. Les idées de Mackinder, de Spykman  et de Brezinski ne sont peut être pas mortes et la Russie est aujourd’hui la cible d’une pression « orangiste » visant au démembrement du pays.

Le nationalisme sécessionniste, une manipulation orange.
Les commentateurs étrangers ont souvent beaucoup de mal à interpréter et admettre la recomposition identitaire et territoriale en cours. La Russie d’aujourd’hui peut être définie comme un état eurasiatique, multiethnique et multiconfessionnel. La Russie n’est pas une nation, elle est selon Nikolaï Starikov « un alliage unique de centaines de peuples, étendu sur presque tout le continent eurasiatique ». Il n’y a pas une Russie mais des Russies, maintenues ensemble grâce à un pouvoir politique central qui compense les effets d’inertie créés par la taille du territoire, la variété des peuples qui y habitent mais également les grandes différences de mode de vies de ces peuples. Comme l’a parfaitement résumé Natalia Narochnitskaya: « La Russie vit en même temps au 19ème, au 20ème et au 21ème siècle. Elle combine l’opulence et la misère; la technologie de pointe y côtoie les conditions de vie les plus primitives; on trouve, sur son territoire, tous les climats possibles; de nombreuses religions et civilisations y cohabitent. La coexistence relativement harmonieuse de toute cette diversité confère à la Russie une expérience unique. En tout cas, nous n’avons jamais eu de guerres de religions comparables à celles qui ont sévi en Europe ».Des événements traduisent pourtant le maintien d’une agitation « orangiste » en Russie. En  2010 l’incident de la mine de Rapadskaia fut suivi par une manifestation violente qui s’est avérée être organisée, notamment via internet, avec le soutien de sites étrangers Anglais et Ukrainiens, appelant à la violence contre l’état russe. Suite à ces événements une mystérieuse  « Union des résidents du Kouzbass » est apparue sur internet, appelant rien moins qu’a la sécession de la Sibérie occidentale. Pour le député local, la piste étrangère / orangiste est la plus probable quand au déclenchement de
ces troubles. De façon très surprenante, ces appels furent repris sur des sites indépendantistes Caucasiens, et défendus par le major Dimovsky, un policier célèbre au sein du mainstream médiatique occidental pour avoir dénoncé dans une vidéo la corruption en Russie. L’enquête
avait permis d’identifier l’un des possibles sponsors de ce dernier: le comité des droits de l’homme de Novorossisk, une sous filiale de l’USAID, qui est une des principales ONGs actives dans le sponsoring des révolutions de couleurs. Celui-ci a simplement affirmé qu’il était prêt à travailler avec « l’union des résidents du Kouzbass », or cette organisation est totalement virtuelle. Comment se sont établis les liens entre eux? Et pourquoi la presse libérale a-t-elle amplement relayé ces deux affaires ? 
Mais les appels à la révolution et au séparatisme ne sont pas seulement le fait de figurants virtuels. Durant l’été 2010 un groupe appelé «frères de la forêt» à pris le maquis dans l’extrême orient Russe, après avoir participé à de nombreuses agressions, cambriolages de commissariats et même un assassinat de policier. Le groupe était composé tant de Néo-nazis que de Nazbols, ces militants anarchistes qui prônent une  révolution perpétuelle et se revendiquent du chef politique Edouard Limonov qui est un personnage controversé de la scène intellectuelle et
politique russe. Bi national franco-russe, il a depuis le début des années 2.000 rejoint l’opposition au Kremlin, en soutenant l’opposition la plus libérale et la plus pro-occidentale de Russie.
Le groupe dénonçait la corruption du système de police mais également la déliquescence  de la société. Ainsi ces révolutionnaires d’extrême droite et anarchistes soutiendraient du bout des lèvres les rebelles Islamistes et Wahhabites contre l’armée fédérale Russe.Encore une fois, la rhétorique sécessionniste et anti-fédérale se retrouve au centre des revendications. Curieusement, certaines associations de droits de l’homme ont dénoncé la brutalité policière lors de l’intervention contre ces jeunes terroristes. C’est le cas de l’association Agora qui est par ailleurs accusée de financement du terrorisme sur le territoire de la fédération de Russie, dans la république musulmane du Tatarstan. Sans surprise, cette association a été listée comme ayant bénéficié de subventions du National Endownmentfor Democracy, une autre association financée par le département d’état américain et qui supervise et refinance plusieurs centaines d’ONGs dans le monde.

L’opposant Navalny, un projet américain?
En 2010, un Dimovsky bis a fait son apparition, avec le soutien médiatique occidental. Il s’agit du blogueur Alexeï Navalny qui  e pose en parangon de vertu, dénonçant les faits de corruption d’état et de détournements financiers, une cause parfaitement séduisante au demeurant. En
novembre 2010 il publiera des informations sur un vol de 4 milliards de dollars par des officiels durant la construction d’un pipeline en Sibérie orientale, vol qui aurait été coordonné au plus haut sommet de l’état. En février 2011 c’est lui qui lancera le slogan cataloguant Russie Unie  omme un parti composé  « d’escrocs et de voleurs ». Il a également créé une sorte de Wikileaks russe (Rospil.info). Relativement populaire à l’ouest, Navalny est peu connu en Russie et relativement peu apprécié puisque seuls 6% des russes le connaissent et seulement 1% des russes lui feraient confiance. Pourquoi? Tout d’abord parce que de nombreux autres blogueurs ont et depuis longtemps dénoncé la corruption en Russie comme par exemple Ivan Begtin qui a créé le site Rosspending. Pour beaucoup, l’émergence médiatique de Navalny, le soutien direct qu’il a obtenu des medias libéraux russes (Vedomosti ou Echo de Moscou) et surtout étrangers, ses liens avec l’ambassade américaine ou son invitation
aux Etats-Unis ou il a dirigé une conférence sur la corruption devant des responsables d’ONG oranges sont des signes que celui ci ne serait qu’une marionnette destinée à affaiblir la Russie, sorte de réincarnation de Eltsine. Récemment des conversations emails privées du blogueur Navalny ont été dévoilées au grand public. Il en est ressorti que depuis 2007 celui-ci collabore activement avec la NED (ici ou la
), rappelez vous qu’il s’agit de cette ONG orange qui finance diverses associations subversives pour le compte du département d’état. Navalny serait aussi activement en lien avec Robert Bond, diplomate américain bien connu en Russie. Parmi les donateurs et informateurs de Navalny figureraient le politologue Stanislav Belkovski, proche a une époque de Boris Berezovski et des indépendantistes Tchétchènes. Comme par hasard,   Navalny se serait rendu discrètement a Londres ou il aurait rencontré Boris Berezovski et son adjoint Andrei Sidelnikov, co-fondateur du mouvement Pora,
un mouvement copié sur le Pora Ukrainien qui a conduit la révolution de couleur orange en Ukraine. Celui-ci est également l’organisateur des manifestations Strategie31 à Londres, qui rassemble tant des libéraux que des nationaux Bolcheviques comme… Edouard Limonov. Ancien militant d’Iabloko (parti d’opposition libéral), Navalny est également un nationaliste sécessionniste. Cette année Navalny a participé a la marche russe au milieu de milliers de radicaux d’extrême droite
, qui ont repris ces accusations contre « Poutine et Russie Unie », et appelé à la sécession du Caucase, une Russie sans Caucase également souhaitée par Navalny.

 « Arrêtons de nourrir le Caucase »
Cette pression sécessionniste a donc eu pour conséquence de voir l’apparition de nouveaux mouvements politiques. C’est le cas par exemple d’un nouveau mouvement de jeunesse qui se définit comme mouvement des « Nationaux Démocrates » et s’intitule les « Naz-Dems ». Cette dénomination fait étrangement penser aux « Naz-bols », impliqués dans les diverses actions précitées mais rappelez vous, Alexeï Navalny se définit lui même comme « National-démocrate », puisqu’en tant que membre libéral et pro-occidental Iabloko il avait rédigé un manifeste nationaliste et s’était défini comme un « nationaliste démocrate ». Il avait par ailleurs prédit que le changement de pouvoir en Russie ne passerait pas par la voie électorale mais bel et bien par un scenario a la Tunisienne. Ce mouvement a joué un rôle important lors des manifestations de décembre 2010. Lors de ces manifestations, il y a eu utilisation de banderoles avec des slogans et des messages en Anglais, ce qui n’était jusqu’alors qu’une spécialité de l’opposition libérale. Cette tendance n’est pas seulement symbolisée par des appels à l’indépendance du Caucase. Le mouvement appelle également à un rapprochement plus poussé avec l’UE et l’OTAN ainsi qu’à un « abandon de toute velléité impérialiste postsoviétique en Europe centrale » ou encore à une révision des traités récents signés avec la Chine (!). Enfin le mouvement a des positions hostiles au monde arabe et très pro-israéliennes. Cette idéologie « Nationale-démocrate », est l’idéologie qui a régi le réveil des états d’europe de l’est et d’europe centrale lorsqu’ils ont accompli leur réveil identitaire postsoviétique. Les membres de la nouvelle Europe (Polonais, Baltes, Tchèques, Hongrois) veulent prendre leur revanche et rétablir une justice historique. Ils veulent devenir des architectes du nouvel ordre mondial qui doit confirmer le rôle de la Russie comme le pays qui a perdu la guerre froide. Pour Dimitri Kondrachov la doctrine Brezinski, souhaite «refouler la Russie à la périphérie de l’Eurasie, dans l’arrière-cour de l’empire est-européen régi par l’idéologie nationale-démocrate ».

« Arrêtons de nourrir Moscou »
Le Caucase n’est pas la seule cible des « sécessionnistes » financés par l’occident. Des  manifestations sécessionnistes sont apparues ailleurs en Russie appelant à cesser de « nourrir Moscou ». En Sibérie notamment, à Novossibirsk, des manifestations ont eu lieu récemment sous les slogans : « la Sibérie aux Sibériens » ou encore « arrêtons de nourrirMoscou ». Les actions ont été menées par les mêmes groupes radicaux de droite en collaboration avec une frange libérale et de soutien aux droits de l’homme. La Sibérie n’est pas la seule concernée puisque dans le sud,
à  Samara sur la Volga, ou encore à Belgorod, des actions semblables ont eu lieu. Même Moscou n’a pas été épargné puisque le 25 octobre dernier
une manifestation a eu lieu, rassemblant des opposants libéraux sous les slogans : « arrêtons de nourrir le Caucase » et « ne payons pas le tribut a Moscou ». On peut noter la participation de Vladimir Milov à cette manifestation,  C’est un ex-leader de Solidarnost, aujourd’hui dirigeant de mouvement d’opposition « Choixdémocratique ». Pourtant et selon des chiffres publics, le Caucase n’est pas du tout et loin s’en faut la région la
plus subventionnée par les autorités fédérales comme c’est parfaitement démontré ici
. Tous ces rassemblements ne mobilisent pas de grandes foules, mais pourtant une forte agitation règne sur internet pour appeler à d’autres manifestations contre la politique conduite par Russie Unie. Ces appels  viennent de mystérieuses organisations dont   l’une a repris l’appellation d’une organisation dissoute après le putsch de 1991 et qui coalisait des « socialistes et des nationalistes » contre le Kremlin. Une autre est un soutien venant d’Ukraine une fois de plus

Vers une révolution des neiges en Russie?

Rappelons les faits: suite aux élections du 04 décembre 2012 qui ont entraîné une baisse de Russie Unie et une forte hausse des partis nationalistes ou de gauche, des fraudes électorales ont été dénoncées. Ces fraudes auraient permis au parti au pouvoir et disposant de la  essource administrative, de gonfler son score et de fausser les résultats. Quiconque connaît la Russie contemporaine, cette jeune démocratie souveraine et dirigée, sait que les élections y sont bon gré mal gré représentatives des tendances et des opinions populaires, et ce malgré les nombreuses irrégularités qui accompagnent chaque échéance électorale. Peu de gens a l’ouest se sont par exemple plaint du fait que le candidat du parti communiste Guennadi Ziouganov se soit sans doute fait voler sa victoire a l’élection présidentielle de 1996, un vol orchestré par les faucons de l‘entourage d’Eltsine, a savoir le clan Berezovski. Des études poussées ont été faites et différents niveaux d’irrégularités relevées. Pour autant la correspondance des sondages pré-électoraux, des enquêtes d’opinion, des exit-poll et des résultats finaux semble avant tout traduire que ces élections ont été et de loin les plus juste de la jeune histoire russe
. Après la crise financière, la situation a été relativement modifiée mais si personne en Russie n’aurait pu pronostiquer une défaite de Russie-Unie à ces élections, beaucoup avaient prévu la forte baisse de ce parti et la relative hausse des partis de gauche comme le parti communiste ou Russie juste.
Outre-Atlantique, des projets de troubles organisés frappant la Russie, ont été mis au point. Bien avant les élections et leur résultat prévisible donc, une organisation du nomde Belaya-Lenta a été imaginée et le nom de domaine du site internet lié déposé aux États-Unis en novembre 2011. Cette information est capitale, elle permet de comprendre la manœuvre par anticipation. Dès les résultats des élections et la victoire de Russie-unie, des protestations ont fusé sur internet. Des images de fraudes ont été diffusées en boucle sur différents blogs et réseaux sociaux, rappelant l’agitation internet des révolutions Facebook qui ont frappé en 2009 la Moldavie, l’Iran ou récemment le monde arabo-musulman. La population qui a défilé était à majorité jeune, masculine et éduquée, persuadée que quelque chose lui avait échappé.

Incroyablement significatif, les sondages et enquêtes concernant les participants aux manifestations ont révélées que 40% d’être eux avaient voté pour le parti libéral Iabloko, parti dont le score final a été de 7% a Moscou et de 15% a Saint Saint-Pétersbourg, mais de seulement 3% au niveau national (!). La conclusion est simple, la classe moyenne supérieure des grandes villes défile aujourd’hui contre celui par lequel elle s’est enrichie durant ces dernières années. Au plus d’état et d’ordre demandé par les électeurs et le peuple (poussée des partis étatistes de gauche et des partis nationalistes), les manifestations sont poussées par une hyper classe moyenne urbaine qui elle réclame moins d’état et plus de liberté individuelle. En surplus de ces contestataires libéraux, un front d’ultragauche et anarchiste (représenté par Serguei Udaltsov) et un front d’extrême droite (représenté par le charismatique Alexeï Navalny) ont réussi à faire une Pax anti-Poutina provisoire, délimitant les contours politiques de cette bien éclectique opposition. Un front anti-Poutine qui opère sous le parapluie financier bienveillant (on s’en doute) des ONGs américaines qui opèrent en Eurasie, et dont Hillary Clinton a assuré récemment que le congrès allait augmenter les subventions pour 2012, année d’élection présidentielle en Russie.

Bien sur la très grande majorité de ces manifestants est sans doute inconsciemment dans la rue, elle contribue sans s’en rendre compte à un mouvement beaucoup plus large destiné à créer des désordres et faire descendre un maximum de gens dans la rue pour paralyser le pays, l’affaiblir et donc accentuer la pression internationale. C’est le modus operandi des révolutions de couleurs. Une minorité d’activistes manipule une majorité naïve et dopée au Buzz sur internet.

Comme le disait le journaliste Maxime Chevtchenko: « Je ne peux pas accepter les slogans politiques utilisés dans ces meetings. D’abord ils ont été organisés par des gens qui se sont moralement discrédités. Aleksei Navalny, par exemple, a appelé à la séparation du Caucase, avec le slogan « Marre de nourrir le Caucase ! » qui met dans un même panier différentes régions du pays (Daguestan, Tchétchénie, Ossétie) qui n’ont pas eu la même histoire et dont les rapports avec le Centre sont différents. C’est une manipulation de la réalité, une provocation aussi méprisable que l’appel a la séparation du Caucase. Ensuite tous les cas de falsification doivent être relatés et présentés a la justice, ou diffuses par internet. Il ne faut pas se contenter de bruits, de racontars dont la fabrication est bien connue. On voudrait les réfuter, et puis on n’a pas envie de le faire, et puis, un jour, on commence à penser que ces bruits sont la réalité. En fait la réalité est beaucoup plus sérieuse. En effet, sur internet, on présente beaucoup de photos de scènes de fraude électorale. C’est peut-être vrai, mais c’est peut-être aussi de la falsification. La réalité de ces pièces ne peut être établie que par une expertise indépendante, par exemple une commission parlementaire avec la participation aussi bien d’accusateurs que d’opposants. C’est le seul moyen. On nous invite à croire à l’hystérie des trolls du Web. Nous y croyons, mais virtuellement, comme du Web. Cela dit, j’estime que les résultats des élections pour le pays sont assez positifs. Au niveau fédéral le cadre constitutionnel du pays a été conserve, les voix des partis d’opposition ont augmente de façon significative. Cela signifie que dans 5 ans, au niveau local, les rapports de forces seront sérieusement reconsidérés. On verra les autres partis s’affronter a « Russie Unie ». Les gens des meetings veulent gêner le développement du système parlementaire et juridique uniquement parce que leur parti – par exemple « Iabloko » – n’a pas pu entrer à la Douma et n’a pas réussi à faire annuler les élections. On aurait prive « Iabloko » de quelques ‘pourcents’? Je ne croix pas a cette musique, pas plus qu’a ces meetings. Le pays a besoin d’unité, Il faut préserver son intégrité et ses intérêts. Il faut aussi nettoyer le pays de toute la pourriture nomenclaturo-oligarquo-libéralo-criminalo-occidentale, partout, jusqu’au moindre village. Le pouvoir doit appartenir à notre peuple unique, polyethnique, polyculturel, et pas au lumpen des villes qui profite de l’argent de la spéculation ».

Alors que l’élection de mars 2012 en Russie se rapproche, la bataille pour Moscou a peut être déjà commencée.