Moscou- Buildings.
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Opération Z en Ukraine : Jour 90.
Cela fait 3 mois aujourd’hui que la Russie a entamé son opération spéciale en Ukraine.
Avant
Personne clairement n’avait prévu que la situation se développe de la façon dont elle s’est développée et personne n’avait prévu une réaction russe d’une telle dimension. Personne n’avait prévu que trois mois plus tard nous en soyons la.
Personne et peut être même pas la puissance qui avait envisagé une intervention russe le 16 février 2022 car, tout simplement, elle savait que l’armée ukrainienne allait déclencher les hostilités dans le Donbass, un déclenchement d’hostilité qui allait entraîner une réponse russe.
Ce scénario terrible d’une intervention russe était envisagé en tout dernier recours par les élites russes et sans doute un peu plus depuis que les autorités ukrainiennes il y a un an avaient clairement et publiquement établi et mis en place un plan de dés-occupation (!) de la Crimée et des républiques autonomes du Donbass, de façon militaire si nécessaire.
Le tout dans un contexte d’aide américaine permanente et accrue depuis 2014.
La fureur des combats dans le Donbass actuel et la présence de dizaines de milliers de soldats Ukrainiens qui y affrontent les forces russes et les combattants des républiques de LDNR est sans doute un indicateur clair que oui : les troupes ukrainiennes y étaient stationnées, en masse.
Comme l’a très bien démontré l’excellent Jacques Baud, la hausse de l’Intensité des activités militaires ukrainiennes au début 2022 étaient également et malheureusement, sans aucuns doutes, les prémices d’une nouvelle opération spéciale de Kiev contre le Donbass, beaucoup plus massive cette fois que celle de 2014 lancée déjà par Kiev contre le Donbass.
Les mensonges récurrents du président Zelensky et les inutiles va-et-viens de responsables politiques européens sans aucuns pouvoirs ni aucune autorité ne pouvaient rien changer au blanc-seing obtenu par les autorités ukrainiennes, du seul centre de pouvoir et de décision réel qui se situe à Washington, bien loin de l’Europe.
Cela fait pourtant huit ans que la Russie tente de ne jouer que la carte diplomatique et demande “juste” le respect des accords de Minsk qui n’impliquaient finalement que, si l’on prend les points essentiels :
- L’organisation d’une décentralisation des pouvoirs, par la mise en application d’une loi ukrainienne (loi sur le statut particulier), accordant de manière temporaire l’autonomie (et non l’indépendance) locale des Oblasts de Donetsk et de Lougansk.
- De procéder au retrait du territoire ukrainien des formations armées et du matériel militaire illicites, ainsi que des combattants irréguliers et des mercenaires.
- Faire respecter tout cela par l’OSCE.
Etait ce si catastrophique pour l’Ukraine ?
La Russie n’est pas tombée dans un piège, mais elle s’est sans doute faite acculer et contrainte d’agir. Elle aurait pu n’intervenir que dans le Donbass, mais les élites russes ont pris une décision Historique et Maximaliste.
Une décision audacieuse qui vise à inverser le cours de l’histoire des 17 dernières années et a vu l’Ukraine devenir une anti-Russie et la nouvelle tête de pont de l’OTAN pour attaquer la Russie via des opérations militaires contre certain de ses propres citoyens, les citoyens du monde russe.
Une anti-Russie dont le président en vigueur, Petr Poroshenko, en 2014, appelait à mener une guerre d’extermination économique contre les populations russophones en ces termes : “Nous aurons du travail – ils n’en ont pas. Nous aurons des retraites – ils n’en ont pas. Nous soutiendrons les gens – les enfants et les retraités – ils n’auront aucun soutien. Nos enfants iront dans des écoles et des jardins d’enfants, et les leurs seront assiégés dans des sous-sols . Ce sont des bons a rien et c’est comme cela que nous gagnerons cette guerre”
Toute ressemblance avec les propos récents d’un ministre français est un pur hasard 😉
Une anti-Russie ou, en 2014, les activistes du Maidan ont par exemple mis le feu à un bâtiment rempli de civils russophones, entraînant que 42 personnes meurent, certaines brûlées vives et d’autres abattues à l’arme à feu tandis qu’elles tentaient de s’enfuir par les fenêtres, dont des enfants. Un massacre que la télévision française avait tenté d’attribuer aux groupes armés russes à l’époque …
Ce n’est pas la Russie qui s’est fait piéger, c’est l’Ukraine, qui est tombée dans le piège terrible d’une guerre fratricide contre ses propres citoyens russophones et contre la Russie.
Ce n’est pas la Russie qui s’est fait piéger mais l’Europe, tombée elle dans le piège américain des sanctions et de la guerre économique, piège terrible que je dénonçais déjà en mai 2014 sur France 24.
Pendant
On me demande souvent comment les gens en Russie vivent cette opération spéciale.
Après la stupeur des premiers jours et l’inquiétude des disons les deux premières semaines, les choses sont revenues à une forme de nouvelle normalité.
Alors que les quelques quelques 7.300 sanctions imposées a la Russie devaient détruire l’économie russe, affamer son peuple et le faire réagir contre ses élites politiques, c’est exactement l’inverse qui s’est produit.
Les contre mesures politiques et économiques russes ont, sur ces trois premiers mois, amortis considérablement le choc des sanctions tant sur le plan de la vie de tous les jours, que sur le plan moral et psychologique.
Les russes ont rapidement repris le dessus sur leurs inquiétudes bien compréhensibles et ont refait bloc, derrière leur pays, leur armée et leurs élites.
Il est difficile d’Occident de comprendre l’incroyable complexité de ce dossier que les médias français ne sont pas capables d’expliquer, ni comprendre, ni de prés, ni de loin, et que surtout ils ne souhaitent pas expliquer pour ne pas porter atteinte au scénario narratif anti-russe en cours de création en Occident et qui verra sans doute l’anti-russisme et la russophobie devenir une idéologie politique a part entière, dans certains pays de l’OTAN.
La Russie voit cette opération spéciale Z comme une opération vitale et existentielle.
On pourrait tenter de l’imager en la comparant à l’opération d’un chirurgien qui voudrait sauver un patient malade en lui ôtant une tumeur contagieuse.
C’est tout le sens de la démilitarisation et de la dénazification qui vise à protéger en urgence la partie du corps du patient la plus exposée actuellement à la tumeur : l’est et le sud, soit le monde russe d’Ukraine.
Mais ce monde russe n’est pas menacé dans son existence que, provisoirement, par quelques dizaines de milliers de militaires et radicaux, du moins jusqu’à ce que l’opération Z règle ce premier problème définitivement.
Ce monde russe, pour les russes, est menacé de façon globale par un anti-monde russe dont l’Ukraine est devenue la pointe la plus orientale suite à sa profonde mutation entamée en 2005, par la première révolution de couleur, la seconde étant le Maidan en 2014.
La Russie n’est pas en guerre contre l’Ukraine ni contre les Ukrainiens mais estime et comprend que le dispositif militaire, politique et civilisationnel dont l’OTAN est l’ADN et l’ossature, se sert de la gouvernance artificielle ukrainienne pour la menacer et l’attaquer.
Il est acquis en Occident de penser que l’Occident a gagné la guerre froide avec l’effondrement de l’URSS et que c’est tout.
Pourtant la disparition du monde soviétique n’a pas signifié la disparition du monde russe, dont la sève a continué à couler et circuler, par delà les frontières du nouveau monde post-soviétique.
L’opération Z n’est pas comme le disent nombre d’experts français une guerre de territoire ou de ressources dont la Russie ne manque pas, non c’est une grosse erreur d’analyse. L’opération Z est un acte civilisationnel pour la Russie, qui vise à repousser l’anti-monde russe et pour le droit et la justice historique des russes à exister et vivre en paix au sein du monde russe.
Après
Il est impossible de savoir quelles seront les conséquences économiques à court, moyen et long terme d’un tel niveau de sanctions car aucun pays au monde n’a jamais vécu une telle situation et une telle expérience.
Il est plausible que 2022 et 2023 soient des années difficiles pour la Russie et que le grand réajustement économique soit bien plus complexe et difficile qu’il n’y paraisse aujourd’hui.
La Russie de ce printemps 2022, est sur ce point, un laboratoire à ciel ouvert.
Il ne fait plus aucun doute que la Russie gagnera, même s’il est aujourd’hui difficile d’imaginer la forme de cette victoire sur le plan militaire et politique.
La Russie devra gagner tout simplement car une victoire est pour elle une question existentielle.
Il ne fait plus non plus aucun doute que le monde de l’après opération Z sera un nouveau monde.
Les conséquences de cette opération militaire seront sans doute aussi fondamentales et totales que celles qui ont résultées de la disparition de l’URSS.
Une nouvelle architecture mondiale apparaîtra, avec de nouveaux équilibres et déséquilibres, de nouvelles alliances et de nouvelles zones d’influences, une grande reconfiguration qui pourrait, pourquoi pas, voir un retour des blocs et une opposition entre un bloc Occidental, plus américano-centré que jamais, et un bloc Eurasio-asiatique, autour du tandem Moscou / Pékin.
Le retour des Blocs, comme entre 1945 et 1991 ?
Dans ces deux mondes, des visions quasi diamétriquements opposées sur l’histoire, le présent et le futur se sont développées, des visions et des conceptions qui ne sont plus compatibles.
Le cœur de cette grande reconfiguration sera sans doute la grande rupture entre la Russie et l’Ouest qui a commencé avec le printemps de Crimée en 2014.
Une grande rupture totale et systémique : politique, économique, morale et civilisationnelle.
Une grande rupture qui est la manifestation la plus parfaite des incroyables prédictions de l’ancienne éminence grise du Kremlin, Vladislav Sourkov, qui annonçait au printemps 2018 que la Russie allait rentrer dans une nouvelle ère qu’il qualifiait ainsi :
« L’annexion de la Crimée représente l’achèvement du voyage épique de la Russie vers l’ouest, le terme de ses nombreuses tentatives infructueuses d’être incorporée dans la civilisation occidentale, de s’apparenter avec la “bonne famille” des peuples européens et que désormais, Moscou devrait assumer sa « solitude géopolitique ».
Moscou, le 25 mai 2022
Ouverture de representation diplomatique de LDNR en Russie
Des ambassades des Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk (DNR et LNR) ouvriront en Russie d’ici un à deux mois.
Selon les MAE des republiques, nombres de pays seraient prêts à reconnaître l’indépendance des républiques du Donbass et etablir des relations diplomatiques avec elles, en premier lieu l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie qui avaient été les premières à reconnaître les republiques mais aussi par exemple la Syrie, des pays d’Amérique latine, et notamment le Venezuela, Cuba, le Nicaragua, ainsi que la République centrafricaine
La fin du siège d’Azovstal
Azovstal est tombé, quelques 2. 439 combattants d’Azovstal sont en détention, dont 78 femmes et parmi eux des étrangers.
Le drapeau russe et rouge a été hissé sur Azovstal qui selon Dénis Pouchiline, président de la république de Donetsk , sera détruit.
Opération spéciale en image : jour 85
Illustration de l’opération spéciale russe en Images.
Quelque part en Ukraine … Un combattant pro-russe (Z) en mode surfer et soldat.
Source : Telegram
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La reddition d’Azov à l’armée russe
Presque tous les derniers combattants enterrés dans les sous sols de l’usine d’Azovstal de Marioupol (je parlais de quelques 2.000/ 2.500 au 01 mai dernier) se sont finalement rendus, contraints par la faim, les blessures ou peut être une tardive prise de conscience que le miracle n’arrivera pas.
Ni leurs messages au président Erdogan, ni les visites de leurs épouses au pape François, ni les appels au secours au fondateur de SpaceX Elon Musk, ni la communication magique faisant passer ces racailles en anges (voir ci dessous) n’ont pu changer la donne, la sérieuse déculotté militaire qu’ils ont pris en quelques semaines, les contraignant à s’enterrer puis se rendre, pour s’éviter de n’avoir recours au cannibalisme pour survivre.
Quelques vidéos de ce grand moment ou une armée régulière, l’armée russe, prouve au monde entier qu’elle traite de façon normale même des bataillons de racailles tels qu’Azov.
Des militants capturés d'”Azov” et des Forces armées ukrainiennes sont emmenés au centre de détention provisoire par le fonds d’Akhmat Kadyrov, les russes ont de l’humour mais c’est fort en symbole.
Les employés de la Croix-Rouge ont pu vérifier les conditions de détention des militants d’Azov qui se sont rendus d’Azovstal et sont à Yelenovka, en DNR. Lors de l’inspection, les représentants de l’organisation caritative n’ont constaté aucune violation, après avoir visité la cuisine et les toilettes de l’armée ukrainienne et le représentant des Forces armées ukrainiennes a confirmé la présence de conditions de détention acceptables, ont loué la qualité de la nourriture et assuré qu’ils étaient bien traités, sans aucune violence à leur encontre.
En Occident, cette reddition a été, dans la presse française, qualifiée de Victoire ….
les Azovites de Héros (exemple ci dessous) ….
Tandis que pour la presse américaine il s’agit d’une manœuvre tactique 🙂
Un son de cloche confirmé par le président ukrainien Zelensky pour lequel : “La mission d’évacuation d’Azovstal se poursuit. Elle est dirigée par nos officiers militaires et de renseignement.” ;0
Les Azovites doivent être contents d’apprendre que leur évacuation vers les centre de détention provisoire des républiques pro-russes d’Ukraine et vers la Russie a lieu sous la houlette des Forces armées Ukrainiennes ;0
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En ce soir du 19/05, quelques 1 800 combattants ennemis se seraient rendus,ils ne resteraient donc que quelques centaines de racailles dans Azovstal.
A Marioupol, dans le monde réel, nous assistons à une Colossale Victoire russe, quoi qu’en dise la propagande occidentale.
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Record de mariages enregistrés à Moscou en avril 2022
En avril, environ 9 000 couples se sont marié à Moscou, ce qui est un record, de tels chiffres n’ayant été enregistrés depuis 1926 qu’en 2010 avec 9.700 mariages.
Le 30 avril, quelques 1 000 couples se sont mariés à Moscou, contre 650 le 29 avril et 600 le 22 avril.
En moyenne sur le mois d’avril entre 2016 et 2021, la moyenne des mariages ne dépassait pas 7.500.
La retraite de Russie de McDonald’s
31 ans après avoir eu raison du communisme, la Russie aura donc eu raison de McDonald’s comme pressenti sur ce blog le 14 mars dernier 🙂
La marque, qui avait annoncé geler ses activités sur le marché russe, vient d’annoncer dans un communiqué que : “La crise humanitaire provoquée par la guerre en Ukraine et l’accélération de l’incertitude dans l’environnement des affaires ont conduit McDonald’s à conclure que continuer à posséder une entreprise en Russie n’est plus viable et est incompatible avec les valeurs de McDonald’s“.
McDonald’s a annoncé l’arrêt de ses activités en Russie courant mars mais l’entreprise a continué à payer le loyer de ces 850 magasins en Russie (41.000 dans le monde) et les salaires des 62.000 employés.
Malgré cela, quelque 15% des restaurants du pays sont encore ouverts aujourd’hui.
La perte résultant de la sortie du marché russe pourrait atteindre de 1,2 milliard de dollars à 1,4 milliard de dollars pour McDonald’s.
La retraite de Russie de McDonald’s ne signifie cependant pas que les points de vente eux-mêmes fermeront.
Comme les autorités russes l’avaient annoncé dès le 14 mars, les magasins rouvriront et reprendront le travail sous une autre marque et ce plausiblement dès la mi-juin.
Ce nouveau réseau conservera les équipes, les menus et le maintien de la coopération avec les fournisseurs existants dont plus de 90 % d’entre eux sont des entreprises russes.
La Russie rejoint donc la petite centaine de pays qui vivent sans McDonald’s comme en Europe l’Islande ou le Monténégro et dans son étranger proche le Kirghizstan, le Tajikistan, l’Ouzbékistan,le Turkménistan ou l’Arménie.
«Toute ma vie est ici, je n’ai plus rien en France» : ces «irréductibles» qui restent en Russie, envers et contre tout
Expatriés de longue date, de nombreux Français font fi de l’appel du Quai d’Orsay pour un rapatriement, et adaptent leur quotidien bousculé par les sanctions.
«On a déjà survécu à toutes les crises, 1998, 2004, 2009, puis 2014… On était habitués. Même si celle-ci, on ne l’attendait pas». Pour les Français expatriés en Russie, le premier temps a été la sidération.
Poutine a attaqué en Ukraine, il l’a fait ! Et maintenant ? Faut-il rester, partir ? Quelques jours plus tard, le Quai d’Orsay statuait pour eux : il était «fortement» conseillé aux expatriés «non essentiels» de quitter le pays. Sur ce, le lycée français fermait ses portes, renvoyait ses professeurs. Nombreux ont plié bagage.
Tous ? Non. Un groupe d’«irréductibles» est resté, envers et contre tout. Irréductibles, c’est le nom qu’ils ont donné au groupe Télégram sur lequel ils se sont regroupés, qui rassemble désormais quelque 500 personnes. Les discussions vont bon train. Cela discute organisation, actualités, informations pratiques. Pour désamorcer la tension ambiante, l’humour est de mise. «Savez-vous quel est le dernier modèle iphone en Russie ?» demande l’un. «Celui dans votre poche», devine un autre. Ici, l’heure est à la résilience.
En «décalage»
Parmi eux, Antoine*, entrepreneur à Moscou, explique au Figaro. «Il y a les expatriés présents depuis trois, quatre ans, des fonctionnaires ou employés de grands groupes. Ce sont les personnes qui, rapidement déboussolées, vont généralement répondre aux injonctions du Quai. Et puis, il y a les anciens». Des entrepreneurs, détaille-t-il, détachés de PME françaises, indépendants. Des couples binationaux aussi. Qui ont désormais en Russie leurs racines.
«Est-ce que nous sommes essentiels en Russie ? En tout cas, nous ne le sommes plus en France», tacle le Moscovite.
Cécile Rogue, en Russie depuis vingt-six ans, a trouvé «décalée, limite malhonnête» la déclaration du ministère des Affaires étrangères. «D’abord, qu’appelle-t-on par essentiel ? Ensuite, cela a instauré un sentiment de panique, qui n’a pas lieu d’être. Ou bien ils sont au courant de quelque chose qu’ils ne nous disent pas, ou il n’y a aucune raison de pousser les gens à rentrer», pointe-t-elle. De son côté, la Russe d’adoption n’a pas hésité. Toute sa vie est ici. «En France je n’ai plus rien, sauf mes parents. Mon mari, mon business, mes clients sont russes», explique Cécile, qui a créé sa société de tourisme haut de gamme pour faire découvrir l’Hexagone à la classe russe aisée. «Je ne me considère pas comme expatriée, mais comme immigrée. Beaucoup de Français sont dans mon cas. Pour l’instant, il n’y a aucune menace sécuritaire, on n’envisage pas de rentrer», élude–elle.
«Chaque matin, on se lève en consultant le cours du rouble»
En trois semaines à peine, leur pays d’adoption est devenu le plus sanctionné de la planète, devant la Syrie et la Corée du Nord. Face à cet isolement progressif, au fil des sites proscrits et des liaisons bancaires suspendues, les «irréductibles» se réorganisent. «Bonsoir, j’ai vu passer sur ce fil des noms de sites alternatifs à AirB&B et Booking.com pour les locations à Moscou. Quelqu’un les a ?». Continue aussi de circuler la pétition pour rouvrir le lycée français de Moscou, dont les cours se tiendront désormais à distance.
«On se réorganise», raconte au Figaro Alexandre Stefanesco, membre de la Chambre de commerce et d’Industrie France Russie, qui a fondé son agence franco-russe de conseils en ressources humaines à Moscou.
«On se lève le matin en regardant les news, et en consultant le cours du rouble. On a tous fait nos réserves en produits essentiels».
Pour l’entrepreneur, c’est 50 bouteilles de vin français stockées dans sa cave, confie-t-il en riant.
Chaque jour, le CCI France Russie organise un «éclairage sur l’actualité» sur Zoom.
Tous s’attendent à une inflation forte pendant les mois à venir, à une chute du PIB et, pour la plupart, de leur chiffre d’affaires.
Mais Alexandre Stefanesco se dit confiant en la «résilience» russe. «On envisage déjà des business parallèles. Il y a des gens qui meurent en Ukraine, on ne va pas se dire malheureux».
«On voit déjà l’inflation dans les commerces, mais c’est surtout les sanctions bancaires qui sont pénibles», estime de son côté André Chauclu, installé à Kaliningrad, petite enclave russe la plus occidentale du territoire. «La carte visa est inopérante, on ne peut plus retirer d’argent, ni payer dans les magasins».
Même chose à Kazan, ville de 1,2 million d’habitants le long de la Volga. «Avant, on pouvait demander de l’argent à notre famille en France par exemple, il y avait toujours un coup de pouce en cas de crise. Maintenant, c’est fini.
Nous sommes tous au même régime que les Russes», explique Alexandra*, 31 ans. La jeune fille n’en est pas à sa première crise. En 2014 déjà, lors de la crise de Crimée, elle avait perdu son poste dans l’import-export de denrées européennes, fromage, fruits, vin. Pas de chance, après avoir patienté jusqu’à la fin de la crise sanitaire, elle est enfin parvenue à rejoindre son mari, russe, le mois dernier.
Financièrement, les choses s’annoncent compliquées pour le couple qui complétait la très maigre retraite en roubles de la belle-mère à Moscou. «On ne peut plus lui faire de virement. Je n’ai pas encore trouvé de travail de mon côté, et je n’ai plus accès à mon compte en euros. Nous avons désormais un salaire pour trois». Hormis cela, la vie à Kazan n’a pas vraiment changé. «Malgré une présence policière renforcée au début, tout est revenu à la normale». Juste un petit détail, l’assemblage des couleurs bleues et jaunes qu’il vaut mieux éviter. «C’est tout bête, mais il faut faire attention en s’habillant !».
Le sentiment d’un deux poids, deux mesures
Quant aux réseaux sociaux, il y a la solution du VPN, qui, pour le moment, sauve la mise. Ou l’alternative des plateformes made in Russia, que certains estiment moins sexy, tels que VKontakte, le clone de Facebook. Côté professionnel, si Whatsapp n’est pas encore banni, on commence à migrer les groupes de travail vers Télégram, par prudence.
Après Facebook, TikTok et Twitter, Instagram est désormais suspendu depuis lundi. En cause, la décision du groupe Meta (ex-Facebook) de faire «preuve d’indulgence pour des formes d’expression politique qui enfreindraient normalement leurs règles sur les discours violents, telles que « mort aux envahisseurs russes »». Sur Instagram, les utilisateurs peuvent ainsi appeler à la haine contre les soldats russes, contre Vladimir Poutine ou encore le président biélorusse Alexandre Loukachenko, comme l’a rapporté le Washington Post.
«Meta a déconné», confie l’un des expatriés au Figaro, disant tout haut ce que beaucoup expriment dans les espaces d’échanges entre expatriés. «Je ne veux pas défendre les Russes, mais si on avait fait la même chose quand Bush est allé en Irak», soupire une autre.
Dans la communauté expat’, le sentiment d’un deux poids, deux mesures est prégnant. «Décalée», «maladroite», sont les qualificatifs pour évoquer les discours politiques de l’Hexagone, Bruno Le Maire en tête.
Antoine a été désolé de voir des artistes russes renvoyés, la suspension de concerts, une véritable «chasse aux sorcières», dénonce-t-il. «Ici, nous sommes un peu à front renversé.
Il n’y a pas de poutinisme à deux balles, on est chacun libres de nos opinions et de nos choix, mais seulement une relation d’amitié avec les Russes, hors du champ politique, que nous voulons préserver à tout prix».
De même, certains ont été agacés par l’hypothèse du magazine Marianne, avançant que la collection Morozov, à laquelle Vladimir Poutine est très attaché, allait servir de monnaie d’échange en cas de menace envers les ressortissants Français. «Une monnaie d’échange pour quoi, au juste ? On est au même régime que les Russes, pas plus, pas moins», s’impatiente Alexandra.
Qu’à cela ne tienne. Les «irréductibles» ne songent même pas à partir, peu importe si l’isolement dure des mois, des années.
«C’est darwinien : un petit groupe ni tout à fait français, ni tout à fait russe, qui va évoluer différemment», résume Antoine.
*Ces prénoms ont été modifiés
Ou en sont les réserves de changes russes au 01/05/2022 ?
Le volume total des réserves internationales de la Russie au 01/05/2022 s’élevait à 593,052 milliards de dollars selon la Banque centrale de Russie.
Au 01/04/2022, le volume des réserves internationales s’élevait à 606,409 milliards de dollars.
Au 01/03/2022, le volume des réserves internationales s’élevait à 617,133 milliards de dollars.
Au 01/02/2022 soit avant le début de l’opération militaire russe en Ukraine, le volume des réserves internationales s’élevait à 630,207 milliards de dollars.
Il faut noter que les sanctions russes ont eu pour conséquence le gel de quelques 300 milliards de dollars sur ces 604.4 milliards de dollars restants.