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Système antimissile : une polémique à l’origine d’un nouvel axe politique?
discours de Munich en 2007 à l’article pour le Moskovskie Novosti en 2012: Un
retour à la case départ !
du bouclier antimissile en Europe a été posée sur la table des négociations de
Lisbonne, lors du sommet Russie-Otan en novembre 2010. Lors de ce sommet,
auquel participait le président russe Dimitri Medvedev, Moscou avait accepté de
collaborer au projet avec l’Alliance Atlantique. De nombreux observateurs
avaient parlé du résultat positif de la rencontre. Les relations entre Medvedev
et Obama avaient alors été qualifiées de « cordiales » par le président russe,
et le premier ministre italien Berlusconi s’était même risqué à jouer la carte
de l’optimisme, en annonçant « un grand pas en avant mettant définitivement un
terme à la guerre froide ». Les craintes dénoncées lors de la conférence sur la
sécurité à Munich en 2007, par le président Poutine semblaient n’être qu’un
mauvais souvenir. Et les signes encourageants d’un nouveau départ entre Moscou
et les États-Unis, envoyés lors de la signature du traité sur les armes
stratégiques (START-3) quelques mois auparavant, semblaient se confirmer.
L’heure était à la détente et au réchauffement diplomatique.
Moskovskie Novosti consacré à sa politique étrangère, le candidat Poutine
réitère les critiques de 2007. Il y dénonce à nouveau l’attitude de l’Otan, des
États-Unis ainsi que l’architecture du bouclier antimissile en Europe. Ces propos qui rappellent étrangement ceux tenus quelques années
auparavant lors de son discours musclé de Munich, marquent l’échec des
négociations entre la Russie et le Bloc Américaniste Occidentaliste (BAO) sur
les principaux points de sécurité internationale.
raisons d’un échec
2001, le président Bush s’était retiré de façon unilatérale du traité ABM de
1972 ; traité qui interdisait dans ses statuts aussi bien le déploiement du
système global anti-missile, que le déploiement des systèmes ABM en dehors des
frontières du pays signataire. Libérée des
différentes contraintes juridiques, l’administration américaine s’est alors
employée à développer des partenariats stratégiques avec un certain nombre de
pays européens, de façon à obtenir des accords visant à implanter des systèmes
ABM sur leurs sols. Des discussions sous forme de négociations sont toujours en
cours avec la Bulgarie, la République Tchèque, la Lituanie et même la Géorgie.
Des accords ont en revanche déjà été trouvés en 2011 avec la Turquie – qui
possède un radar couvrant une partie de l’espace russe – la Pologne (2008), et
la Roumanie (2011)- qui devrait accueillir un radar couvrant le territoire
russe jusqu’en Oural.
très claire. La coopération sera pleine et entière ou elle ne sera pas.
système, intégrant les dispositifs des deux parties, Russie et Otan. Cette
proposition avait l’avantage, malgré le désengagement des États-Unis sur le traité
ABM de 1972, de conserver un statu quo et ainsi garantir un bon équilibre
stratégique et géopolitique entre les puissances. L’Otan,
seule force décisionnelle en la matière n’ayant alors pas jugé bon de prendre
en considération les demandes répétées du Kremlin, l’ex-président Dimitri
Medvedev mit en garde les États-Unis et l’Alliance Atlantique, sur les mesures
de rétorsion qu’il pourrait mettre en œuvre si de tels agissements persistaient
: déploiement de missiles de type Iskander dans la région de Kaliningrad qui,
rappelons le, vient de mettre en service un radar capable de contrôler jusqu’à
500 cibles dans un rayon de 6000 km (soit l’ensemble de l’Europe et de
l’Atlantique) ; mise en place dans le sud et l’ouest du pays, de systèmes
offensifs modernes capables de détruire les installations du bouclier antimissile ; abandon, si nécessaire, du traité russo-américain de désarmement
nucléaire, START, entré en vigueur en février 2011 et considéré comme le
symbole du réchauffement des relations entre les deux pays.
une rupture de l’équilibre fragile des forces dans le domaine nucléaire : la
parité stratégique en serait modifiée et l’équilibre militaire et politique
s’en trouverait ébranlé.
l’actuel développement du système ABM ne sera jamais accepté par la Russie ?
l’implantation du bouclier antimissile en Europe, consiste à répéter que cette
installation est nécessaire pour assurer la protection des populations contre
les menaces balistiques des pays qualifiés selon leurs critères de « voyous »,
notamment l’Iran. Vis à vis de la Russie, le caractère uniquement défensif du
bouclier revient comme un leitmotiv pour apaiser Moscou, qui selon l’Otan n’a
rien à craindre d’un « ennemi imaginaire ».
ministre déclarait « le bouclier antimissile américain qui est en train d’être
déployé en Europe, vise la Russie ». Le maintien de la position russe sur le
dossier s’explique pour les raisons suivantes :
– Un bouclier antimissile même défensif, procure, comme tout
bouclier un avantage certain sur l’adversaire qui en serait dépourvu.
Lapalissade ? peut-être. Mais il est utile de rappeler que celui qui a l’arme
et le bouclier est maître d’un jeu dont il peut déclencher le signal à sa
convenance, face à celui qui n’a que l’arme. Le système offensif/défensif
contre le système défensif seul, entraîne un déséquilibre évident dans le rapport
des forces.
– La grille de lecture des États-Unis en ce qui concerne le
ciblage des menaces potentielles ne saurait être un argument recevable pour les
Russes qui ne prennent au sérieux ni la raison invoquée, ni la menace
balistique iranienne. Tout d’abord parce que la Russie a proposé à plusieurs
reprises une alternative plus efficace consistant au déploiement de missiles
intercepteurs à proximité immédiate des frontières de l’Iran, en Turquie, au
Koweït, ou même encore en Irak. Propositions restées lettres mortes. Ensuite
parce que la Russie ne partage pas les craintes des États-Unis concernant la
politique extérieure iranienne. Enfin, parce que nombre de spécialistes
s’accordent à dire que l’Iran ne possède ni la technologie ni le potentiel
industriel permettant de concevoir et de fabriquer des missiles
intercontinentaux capables de parcourir les quelques 10000 Km qui les séparent
des États-Unis.
– La confiance que la Russie accorde aux États-Unis et à l’Otan
est aujourd’hui sapée par de lourds antécédents. La Russie n’a toujours pas
oublié que, contrairement aux promesses faites en 1989 à Gorbatchev, l’Otan a
continué de s’étendre vers l’Europe de l’est et notamment vers les pays du
Pacte de Varsovie. Elle n’a pas apprécié non plus le retrait unilatéral du
traité ABM par les États-Unis en 2002. Plus récemment, elle n’a pas digéré les
libertés que l’Otan a pu prendre en Libye pour renverser le gouvernement en
place. Enfin, la Russie reste méfiante sur la politique étrangère du BAO, à qui
elle reproche une attitude générale belliciste et d’ingérence.
– Les nombreuses tergiversations et revirements concernant les
négociations avec les pays comme la Pologne ou la République tchèque sur
l’adoption du bouclier antimissile ne sont pas de nature à rassurer la Russie.
De même que le refus de l’administration américaine de fournir des garanties
juridiques attestant que le système déployé ne sera pas dirigé contre les
forces de dissuasions russes, inquiète le Kremlin.
du bouclier antimissile en Europe est une tentative de prendre un avantage
stratégique structurel décisif sur la Russie au profit de la puissance
américaine.
un nouvel axe politique : sino-russo-iranien
d’hier. En revanche les récents rapprochements entre la Russie et les deux
pays, Chine et Iran, sont liés aux rapports de force qui ont animé les
relations entre le Kremlin et la Maison Blanche au moment de la chute de
l’URSS.
Russo-Chinoises
l’est, la Russie a vu sa zone d’influence géopolitique diminuer d‘autant. Afin
de contrer cet encerclement stratégique, la Russie finit par se tourner vers la
Chine, inquiète elle aussi de son isolement croissant sur la scène
internationale. En 2001, les deux pays mettent en place l’Organisation de
coopération de Shanghai. La même année, la Russie et la Chine signent le traité
de bon voisinage, d’amitié et de coopération, dont l’article 12 stipule que la
Chine et la Russie respecteront « les accords fondamentaux relatifs à la
sauvegarde et au maintien de la stabilité stratégique ». Cet article est
symboliquement important. Il est à la fois un signe fort envoyé aux États-Unis
et à l’Otan, et un marqueur de séparation entre deux blocs.
Russo-Iraniennes
retrouve dans une situation de fragilité économique importante. La survie de
celle-ci dépend en partie de la santé de son complexe militaro-industriel qui
tient traditionnellement une place économiquement importante aussi bien dans
l’ex-URSS que dans la Russie d’aujourd’hui. C’est ainsi que la Russie va se
tourner vers l’Iran, qui deviendra l’un de ses trois plus grands marchés
extérieurs avec l’Inde et la Chine. Les relations bilatérales vont se renforcer
petit à petit avec la mise en place, en 1995, d’une coopération nucléaire et la
signature d’un partenariat pour la construction de la centrale nucléaire de
Bouchehr. En 2001, Poutine signe également avec son homologue iranien un «
pacte de coopération civile et militaire». Au-delà de ces relations économiques
et énergétiques, l’Iran est aussi l’un des membres observateurs de l’OSC, lui
conférant de facto une position au moins diplomatique dans cette organisation.
trilatérale conjoncturelle à la création d’un axe structurel
étaient surtout d’ordre diplomatique, économique, énergétique et elles étaient
motivées, au moins dans leur démarrage, par des causes circonstancielles. Mais
en réaction au durcissement de la stratégie européenne et eurasiatique des
États-Unis et de l’Otan, les relations trilatérales de ces trois pays sont en
passe de rentrer dans une phase d’alliance objective.
aujourd’hui bien conscience de la volonté du bloc BAO d’instaurer un nouvel
ordre mondial (ou monde unipolaire), en totale opposition avec leurs intérêts
propres et leur conception multipolaire du monde. Cette conscience maintes fois
exprimée aux travers des discours de Vladimir Poutine peut se résumer dans
cette phrase tenue devant les étudiants de l’université polytechnique de Tomsk lors
de sa campagne présidentielle « ils (ndlr : les Américains) veulent tout
contrôler (…). J’ai parfois l’impression que les États-Unis n’ont pas besoin
d’alliés mais de vassaux, et qu’ils préfèrent la domination à un partenariat
d’égal à égal ». Ensuite parce que le double veto sino-russe dans le dossier
syrien a rapproché les deux pays non seulement pour des raisons intrinsèques
(accord sur la stratégie à suivre et succès diplomatique commun) mais aussi
pour des raisons extrinsèques (schéma particulier du « Seuls contre tous »).
Les succès dans ce dossier renforcent évidemment la position de l’Iran qui n’a
jamais caché son soutien au gouvernement syrien en place.
ces trois pays comme un danger mortel : l’Iran, parce qu’il craint que ce
bouclier défensif ne puisse se transformer en un bouclier offensif pour une
future attaque contre son territoire. La Russie par sa crainte de voir son
potentiel stratégique neutralisé et donc son influence sur la scène
internationale diminuer. Et enfin la Chine, qui craint avec l’affaiblissement
de ses principaux alliés, de se retrouver dans une situation d’isolement à la
fois économique et stratégique.
devenir, au-delà du rapport de force militaire et stratégique entre nations, le
symbole d’une ligne de démarcation, voire même de fracture entre deux
conceptions du monde qui s’affrontent aujourd’hui sur la scène internationale.
D’un côté celle des américains soutenue par l’Alliance Atlantique, perçue par
de plus en plus de pays, comme interventionniste et unipolaire. Et d’un autre
côté, celle des pays comme la Russie, la Chine ou encore l’Iran, favorable à un
monde multipolaire et à un équilibre des forces.
La nouvelle Europe
Je conseille sincèrement la lecture de l’ouvrage a tous mes lecteurs !
Le traité de sécurité paneuropéen : une fontaine de jouvence pour l’Europe?
Cette clause, négociable comme toutes les autres, permettrait à la Russie d’empêcher l’OTAN d’agir unilatéralement. L’ennemi d’hier se verrait affaibli, et les alliés « indésirables » de Moscou (Syrie, Belarus, Iran) seraient dès lors à l’abri de toute offensive européenne. Un autre mécanisme, comparable à celui régissant l’Alliance Atlantique, poussera les pays membres à tous se considérer comme attaqués si au moins un des pays l’est.
La pensée stratégique russe
Tel est le titre du dernier livre de Jean GERONIMO, dont je recommande la lecture et que vous pouvez consulter ici
Sergey Lavrov, realpolitik.
Extrait: “Je pense que, nous les Russes, avons eu assez de révolutions dans notre histoire et je ne pense pas que notre conseil à nos amis soit d’avoir leur propre révolution. C’est toujours sanglant, désordonné, cela ramène toujours le pays en arrière dans son développement”.
La Russie des année 90 ? Un bordel géant..
Le magazine Flash à eu l’amabilité de m’interroger en tant que Français de Russie, sur les raisons motivant nos concitoyens à s’installer en Russie. Je reproduis donc mon interview ci dessous.
La scène se passe dans une boite de nuit de la rue Arbat, célèbre rue du centre de Moscou, pendant que des beautés slaves se déhanchent sur la piste de danse, les yeux rougis par la drogue. Voila ce qu’était dans les années 90 l’image de la nouvelle Russie « libérale » et « libérée » du communisme : un bordel géant, un pays dont les ressources, énergétiques, financières et génétiques étaient pillées, livrées à diverses mafias et aux grandes corporations étrangères. Cette histoire vous la connaissez plus ou moins, la Russie pour beaucoup rimant avec « armes », « mafia », « filles/Putes » , « pollution» et « vodka ».
Et surtout, maintenant les Russes (femmes et hommes) peuvent regarder avec fierté leur pays, qui se développe à une vitesse météorique. Un développement soutenu par l’explosion du prix des matières premières mais également et surtout par un pouvoir politique efficace qui a su parfaitement utiliser les bénéfices de la croissance. Conséquence directe ? Aujourd’hui des milliers de francais résident à Moscou ou Saint Petersbourg principalement mais également dans des villes de Sibérie et Il n’est plus rare de rencontrer des couples franco-russes ou franco-français, qui après avoir vécu a l’ouest, ont délibérément choisi de s’installer en Russie. Bien sur il y a l’amour, le travail, ou un réel intérêt pour le pays mais ce n’est pas tout. Pour nombre de Français de Russie, désormais vivre « chez Poutine », c’est bien.
En opposition aux villes, les villages ont su préserver une atmosphère très traditionnelle et hors du temps. La Russie d’aujourd’hui est un subtil mélange de modernité et de tradition, on y trouve à la fois le 19ième siècle, le 20ième et le 21ième siècle. Le pays est réellement multiculturel et multiconfessionnel mais contrairement aux sociétés occidentales , les tensions ethnico-religieuses n’y existent quasiment pas. J’ajoute que les étrangers qui font l’effort d’apprendre la langue y sont très bien acceptés.
Enfin la Russie est un pays qui offre un cadre de vie très varié, on y trouve des parfums d’orient comme d’occident, le Caucase chaud et l’Arctique glacial, ainsi qu’un mélange d’Europe et d’Asie. Cette variété reflète la taille du pays qui s’étale sur 11 fuseaux horaires. La sensation d’être dans un pays fort, qui sait ou il va et dans lequel la situation s’améliore, change énormément de la situation Française par exemple et de la sensation de déclin omniprésente que l’on y ressent. Enfin disons le, se sentir en accord avec la grande majorité des décisions prises par l’élite politique du pays est un sentiment fort plaisant.
Si il y a 15 ans, les Russes, femmes en tête, fuyaient la Russie à la recherche de meilleures conditions de vie, alors que leur pays était en totale décomposition. Aujourd’hui, de nombreux Russes de l’étranger sont déjà revenus en Russie et des centaines de milliers de citoyens de l’OCDE y résident.
On pense que ce nombre devrait sensiblement augmenter dans la prochaine décennie, au vu des prévisions économiques solides en Eurasie (Russie, Biélorussie et Kazakhstan, les 3 pays de la nouvelle union douanière) et relativement faibles en Occident (Amérique et Europe de l’ouest). Déjà la Russie se classe devant la France et juste derrière l’Allemagne selon le FMI, dans le classement des pays selon leur PIB à parité de pouvoir d’achat. Pour ma part, en tant que Français d’Eurasie, c’est décidé, je suis très bien «chez Poutine » et pour rien au monde ne souhaite rentrer à l’ouest !
L’effondrement de l’empire du Mal
En 1990, Boris Eltsine proclamait l’indépendance de la Russie qui, dorénavant, ne ferait plus partie de l’Union soviétique. A la surprise générale, se fracturait un pays que le président Ronald Reagan avait, quelques années auparavant, surnommé « l’empire du Mal ». Cet événement majeur de l’histoire contemporaine a fait couler beaucoup d’encre mais, vingt ans plus tard, il n’a toujours pas été compris. Comprendre un phénomène d’une telle ampleur et d’une telle complexité exige une approche théorique de la société communiste. Cette théorie existe et a été élaborée dans les années 1970-1980 par le sociologue et logicien russe : Alexandre Zinoviev. Dans cet article, je vous propose un bref aperçu de l’analyse zinovievienne de la crise du communisme réel.
A l’instar du capitalisme, note Alexandre Zinoviev, le communisme est un système, c’est-à-dire une manière de faire vivre les hommes ensemble, de génération en génération. Selon le philosophe russe, les rapports spécifiques du communisme réel sont des rapports sociaux structurant les grandes collectivités humaines (3) : la division des hommes en chefs et subordonnés, la hiérarchie des chefs, le commandement et la subordination, le pouvoir du groupe sur l’individu etc. Ces relations sociales existent dans tous les ensembles humains, y compris dans les pays occidentaux, mais ne deviennent dominantes que lorsqu’un certain nombre de conditions sont remplies : la nationalisation des moyens de production, une gestion centralisée de la vie de l’ensemble social, une économie et une culture complexes etc. Dans les années 70, élaborant sa théorie sociologique de la société communiste, le philosophe russe avait établi l’inéluctabilité de l’existence de crises au sein des systèmes sociaux. Ce dernier point est absolument essentiel pour le sujet qui nous intéresse.
La théorie zinovievienne constitue un puissant éclairage en direction de l’avenir.
En résumé, les innombrables petits ruisseaux constitués par les dérogations à la norme se sont joints pour former un fleuve puissant : celui de la tendance à la crise.
Dans les années 70-80, le modèle soviétique fait l’objet d’une très forte attaque de la part des médias occidentaux ; soviétologues, sociologues, politiciens et journalistes imposent peu à peu l’idée selon laquelle communisme et capitalisme représentent une division du monde en deux parties : un immense Goulag (un empire du Mal) d’un côté, et une démocratie parée de toutes les vertus, de l’autre. L’idéologie occidentale ne se contente pas d’exercer son action sur les esprits des Occidentaux mais pénètre à l’Est par les canaux les plus divers. Jeans, musique rock, appareils sophistiqués accessibles à tous et films fabriqués aux Etats-Unis offrent une image séduisante de l’Ouest et font partie du processus d’occidentalisation au même titre que l’extrême valorisation de la démocratie parlementaire et du capitalisme, pudiquement rebaptisé : libéralisme. Vers la fin de l’ère brejnévienne, note Alexandre Zinoviev, l’idéologie occidentale exerçait une action corrosive sur les différentes couches de la société soviétique en général, et sur les couches supérieures en particulier. Causes et conditions de la crise idéologique se sont donc entremêlées en un inextricable écheveau : si l’influence occidentale pénétrait si facilement les esprits des citoyens du bloc de l’Est, c’est bien parce que l’idéologie soviétique avait perdu une partie de sa puissance, laissant en quelque sorte la place vacante. Des phénomènes tels que la rupture avec la Chine communiste ou la naissance de l’eurocommunisme contribuent aussi à affaiblir l’Union soviétique. A l’époque où Mikhaïl Gorbatchev et son équipe accèdent aux plus hautes instances du pouvoir soviétique, il est clair aux yeux de beaucoup que le plateau de la balance commence à pencher très nettement du côté occidental.
Boris Eltsine, haut fonctionnaire de l’Union soviétique et membre du parti communiste, proclame l’indépendance de la Russie dont il prend la tête. L’ancien membre suppléant du politburo de l’Union soviétique promet aux dirigeants occidentaux de rompre avec l’odieux passé communiste et d’adopter le système occidental. Les Soviétiques plaisantent : nous détruisons le communisme sous la direction … des communistes.
La direction gorbatchévienne elle-même, effrayée par l’ampleur du bouleversement social, essaye de reprendre en main le système administratif soviétique composé d’un nombre gigantesque d’institutions et d’organismes. Comme Joseph Staline l’avait fait en son temps, Mikhaïl Gorbatchev tente de mettre en place un appareil de pouvoir personnel chapeautant l’appareil du Parti, d’où la volonté de renforcer les pouvoirs du « président »(7), c’est-à-dire de lui-même. Alexandre Zinoviev explique que ces manœuvres de la direction soviétique ne relèvent pas de la volonté subjective de Gorbatchev et de ses amis, mais sont l’unique façon de sortir le pays du marasme dans lequel il est plongé. Si ce super pouvoir personnel avait été mis en place, il aurait permis au « président » et à son équipe de reprendre en main l’appareil du Parti dans un premier temps, puis l’appareil d’Etat tout entier dans un deuxième temps, mais cette contre-perestroïka n’est pas menée à son terme. Mikhaïl Gorbatchev, oscillant sans cesse entre son désir de plaire aux Occidentaux et la volonté de reprendre en main le pays, finit par être évincé par Boris Eltsine qui engage définitivement la Russie sur la voie de l’occidentalisation.
L’empire du Mal éclate de toutes parts et le soir du 8 décembre 1991, date officielle de la mort de l’Union des républiques socialistes soviétiques, le président Ronald Reagan, enfin rasséréné, peut dormir paisiblement sur ses deux oreilles.
Dans ses ouvrages consacrés à la société communiste (9), Alexandre Zinoviev explique que l’économie d’un pays socialiste est gérée par des principes autres que ceux de l’exigence de profit ou de rentabilité ; cette économie a pour mission, par exemple, de fournir du travail à l’ensemble de la population. Avant l’effondrement du pays, la quasi-totalité des entreprises appartenaient au secteur public et les instances planificatrices géraient la vie économique. Sous la direction des « réformateurs » dorénavant installés au Kremlin, s’opère un véritable bradage des entreprises publiques ; un certain nombre d’entre elles deviennent la propriété d’individus extrêmement riches (les « oligarques ») liés au pouvoir d’Etat. Le chômage fait son apparition, le niveau de vie d’une large partie de la population baisse, des firmes occidentales s’établissent dans le pays et le dollar circule librement comme monnaie d’échange. Les Soviétiques plaisantent une nouvelle fois : les communistes nous mentaient toujours, sauf lorsqu’ils affirmaient que le capitalisme … c’est encore pire. Nec plus ultra de l’occidentalisation : la démocratie parlementaire s’installe dans les murs du Kremlin, mais de quelle démocratie s’agit-il exactement ?
Les années passant, cette idée a acquis la force d’un axiome. Dans ses écrits consacrés à la société occidentale (10), Alexandre Zinoviev souligne que la démocratie parlementaire est un type de pouvoir intrinsèquement lié à la structure des Etats-nations ; le philosophe ajoute que, contrairement à ce qu’affirme l’idéologie occidentale, ce type de pouvoir n’est pas transposable sous tous les cieux et à toutes les époques. Sur le continent américain, la démocratie parlementaire s’est construite en même temps que se développait une économie capitaliste et que naissait une nation nouvelle : les Etats-Unis. Lors d’un voyage sur le nouveau continent, un sociologue hors pair, Alexis de Tocqueville, avait d’ailleurs pressenti la force potentielle de cette jeune nation qui se construisait sous ses yeux. Afin d’approfondir le sujet qui nous préoccupe, répertorions d’abord quelques termes couramment associés à l’expression « démocratie parlementaire » : élections libres, séparation des pouvoirs, partis politiques, élus du peuple, régimes présidentiel ou parlementaire. Arrêtons-nous ensuite sur le cas des principaux partis politiques présents sur la scène d’un pays occidental contemporain. Ces partis sont le produit d’une longue histoire et représentent des couches et des catégories sociales bien précises ; ils ont évolué avec le temps et ont acquis aujourd’hui une grande expérience de la relation avec le pouvoir d’Etat auquel ils fournissent des cadres. A l’heure actuelle, ces partis politiques sont devenus des éléments majeurs de la structure du pouvoir d’un pays occidental. Qu’y a-t-il de tout cela dans la Russie issue de la fragmentation de l’empire du Mal ?
Une multitude de partis ont certes poussé comme champignons après la pluie durant la période gorbatchévienne, mais ils ne reposaient sur aucune base historique et ne représentaient aucune couche sociale. La Russie n’a pas de tradition dans ce domaine que les Occidentaux nomment : la vie politique. Le parti communiste de l’Union soviétique n’était pas un parti politique au sens occidental du terme, mais l’axe central d’un pouvoir d’Etat fortement hiérarchisé dont la fonction était de gérer la société tout entière. A ce propos, Alexandre Zinoviev souligne que l’Etat a joué un rôle essentiel dans l’histoire de la Russie, dès le début de l’existence de ce pays, et que le communisme représente en quelque sorte le couronnement de la tendance russe à l’étatisme. A l’évidence, n’existe dans l’actuelle Russie qu’une caricature de démocratie parlementaire, élément d’une occidentalisation imposée par les vainqueurs de la guerre froide.
A l’évidence, la constitution d’un large secteur économique privé en Russie est un pas en direction de l’occidentalisation du pays. A l’opposé de cette tendance, la volonté du Kremlin de reprendre en main de grandes entreprises russes appartenant au secteur énergétique est très clairement la manifestation d’un retour à une politique économique de type soviétique. Dans le domaine idéologique et religieux, la situation paraît elle aussi très complexe. En accordant leur soutien au christianisme orthodoxe, les autorités russes manifestent leur intention « d’enterrer » définitivement le marxisme-léninisme, mais aussi leur volonté de promouvoir le nationalisme russe et de ressusciter des éléments du passé tsariste dont fait partie l’orthodoxie. Au sujet de cette dernière, Alexandre Zinoviev note que la « renaissance » de la religion en Russie est une opération organisée par le pouvoir ainsi que par la hiérarchie ecclésiastique et qu’elle ne repose sur aucune assise populaire. En résumé, plusieurs facteurs hétéroclites de différentes origines forment à l’heure actuelle l’ossature de cet étrange animal qu’est un lièvre avec des cornes. Le philosophe explique enfin qu’il est difficile de prédire la durée de vie de cet organisme social hybride dont la qualité principale, aux yeux des dirigeants occidentaux, est de constituer un rempart protégeant la Russie d’un retour à la norme communiste.
Affaiblir le système social d’un pays signifie affaiblir ce pays lui-même. Cette attaque a été couronnée d’un succès inespéré : l’empire du Mal en proie à une violente crise interne s’est effondré à la façon d’un château de cartes. Les conséquences de cet écroulement furent nombreuses et diverses. Arrêtons-nous un instant sur ce dernier point. En modifiant en profondeur les rapports entre les principaux acteurs de notre planète, l’écroulement du bloc de l’Est mit fin à une époque née au sortir de la seconde guerre mondiale. La guerre froide s’éteignit d’elle-même sans se transformer en un terrible conflit armé qui aurait ensanglanté une grande partie de l’humanité. La chute de l’empire du Mal eut aussi pour effet d’ouvrir grande la voie à l’épanouissement d’une période nouvelle caractérisée par la domination, à l’échelle mondiale, d’un autre empire que le président Ronald Reagan, j’en suis convaincu, n’aurait pas hésité une seule seconde à surnommer … l’empire du Bien. (12)
A very clear analysis from Timothy Post
These guys are all on the same team and want the same thing- to ensure that Russia is self-sufficient (economically and militarily), a full partner amongst the leading nations of the world, and to improve living standards.
Les Européens ne nous comprennent pas
” L’Abkhazie n’entend nullement ne rester orientée que vers la Russie. Nous voulons construire une politique étrangère multidirectionnelle. C’est une priorité stratégique que nous envisageons en trois temps, à court, moyen et long terme. A court terme, il s’agit essentiellement de se rapprocher de la Biélorussie. A moyen terme, il faudra construire un partenariat privilégié avec la Turquie, certains Etats du Moyen-orient et d’Amérique latine, c’est-à-dire, à l’exception du voisin turc, la plupart des pays indépendants de l’OTAN. Enfin, à long terme, évidemment, c’est vers l’Union européenne qu’il sera nécessaire de se tourner”.
” Il faut que les Européens comprennent que l’intégrité territoriale de la Géorgie est une illusion depuis 15 ans maintenant. En fait ils défendent une conception très arrièrée de la Géorgie, la conception stalinienne, qui a pris forme en 1931, lorsque le maître de l’Union Soviétique a décidé de faire de la Géorgie, ce qu’Andreï Sakharov a appelé un « petit empire », façonné sur le modèle de l’URSS. Les Abkhazes à cette époque avaient déjà violemment réagi avant d’être écrasés. L’Europe au fond veut et promeut la Géorgie de Staline. Ils ne nous comprennent pas ! C’est une erreur historique. Il est erroné de croire que l’Abkhazie n’a pas ses propres intérêts et qu’elle est de toute façon manipulée par la Russie”.
” L’un de nos objectifs stratégiques à court terme est d’ouvrir des voies de communication directe par la mer et par les airs avec la Turquie. Actuellement, 60% de nos échanges se font avec la Russie, 30% avec la Turquie et 10% avec la Roumanie et la Bulgarie.”
“Il semble que la Turquie souhaite nous rapprocher de la Géorgie. Elle a en tête, je crois, un rôle de médiateur entre Tbilissi et nous. Si cela doit nous éloigner de la Russie, ce n’est pas un bon calcul. La Russie est évidemment notre partenaire privilégié mais nous souhaitons comme je l’ai dit, développer d’autres partenariats privilégiés en toute souveraineté. Donc, la Turquie a tout intérêt à soutenir notre indépendance, ni Géorgie, ni Russie, mais l’Abkhazie indépendante. Ainsi elle remplirait ses objectifs dans le Caucase Sud. Nous ne demandons même pas dans l’immédiat de reconnaissance officiellement mais un engagement concret avec nous. Cela renforcerait clairement le rôle et l’influence de la Turquie dans la région”.
“L’Abkhazie est sans doute l’un des Etats les plus démocratiques du Caucase. La presse est libre ; les partis sont indépendants. L’élection présidentielle en 2004 en a donné un exemple significatif. Celle de décembre 2009 n’a pas dérogé à la règle”.
“La société abkhaze est très politisée. Il est vrai qu’il existe en son sein une tendance assez nationaliste, qui craint qu’en ouvrant trop le pays, y compris aux Russes, les Abkhazes perdent leur identité. Compte tenu des menaces récurrentes d’assimilation et du problème démographique actuel, cette posture gagne en popularité”.
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