Réponse au Réseau Voltaire

Le réseau Voltaire a cet été lancé une campagne de communication assez offensive contre le président Russe, Dimitri Medvedev, affirmant que le tandem au pouvoir était en conflit pour la prise de pouvoir des prochaines présidentielles Russes qui auront lieu en 2012.  J’ai déjà écrit à ce sujet en juillet dernier ici, je reviens sur ces accusations et tente de démontrer à quel point elles sont à mon sens relativement infondées. 

 

23/07/21010 – A lire la :
Le président français Nicolas Sarkozy a annoncé, le 23 juillet 2010, aux ouvriers des chantiers navals franco-coréens STX de Saint-Nazaire qu’ils construiront deux navires de classe Mistral pour la Russie (…) Selon le président français, le principe du contrat a été décidé par son homologue russe, Dmitry Medvedev, mais les « détails » sont en cours de négociations. En d’autres termes, le contrat n’est pas encore signé. A Moscou, cette annonce a provoqué la fureur de Vladimir Poutine. Le Premier ministre avait tenté de s’immiscer dans la transaction et avait désigné son adjoint Igor Sechin pour la « négocier ». En fait, sa mission était de faire échouer la transaction imaginée par les présidents russe et français (…) Selon une source moscovite proche du dossier, M. Medvedev aurait convenu avec M. Sarkozy d’importantes commissions et rétro-commissions (de l’ordre de 8 % du montant total de la vente). M.Medvedev pourrait ainsi financer sa prochaine campagne électorale contre « son ami de trente ans » et désormais rival M. Poutine, tandis que M. Sarkozy pourrait financer sa réélection“.

L’affaire des frégates à été initiée et développée par Vladimir Poutine, pour des raisons bien “autres” que celle de pseudos rétro commissions (qui sont d’ailleurs quasi systématiques et d’usage lors de tout achat de matériel militaire à cette échelle) : permettre aux Russes de briser le “verrou” d’acquisition de technologies “made in nato” mais également et surtout d’entamer la lente acquisition de technologies étrangères  en vue de se constituer une flotte de porte-avions vers la moitié du siècle. Il n’y a donc sur ce dossier “aucune” tension entre les deux hommes, qui avancent de concert pour que ce “deal” est lieu, deal qui est de très bon augure, puisqu’il dessert l’OTAN plus que la Russie et ressoude un couple Franco-Russe essentiel, ainsi l’Europe va provisoirement de l’Atlantique au pacifique. Je rajoute que l’acquisition de matériel militaire à des pays étrangers, voir de l’otan n’est pas une “nouveauté”, la Russie à déjà par exemple acquis des drones Israéliens, à fait publiquement “part” de l’approfondissement des relations militaires avec la France et devrait acheter du matériel militaire à l’étranger, par exemple aux états-unis.

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27/07/2010 – A lire la : 
A la Douma, certains partisans de Vladimir Poutine militent pour la destitution du président Dmitry Medevedev. Entre autres motifs, ils évoquent sa responsabilité dans certains aspects de cette affaire. Étrangement, en violation de la Constitution, il n’a pas retiré la nationalité russe à un des agents Etats-Uniens lors de l’échange d’espions effectué le 9 juillet”.

L’échange d’espions était en fait une provocation déstabilisante du côté Américain, puisqu’elle a été initiée une semaine après la visite constructive du président Russe en juin 2010. Elle était visiblement destinée à “brouiller” un embryon de relation stabilisée, qui gênait visiblement certains stratèges US. Il est très curieux que l’on parle encore beaucoup des soi disant “agents Russes” aux États Unis alors que plus personne ne parle des “agents” pro Américains en Russie, notamment le fait que le président Russe à libéré 19 personnes en Russie soupçonnées d’espionnage. De plus le non retrait de nationalité n’a aucun sens, des milliers de Russes recherchés par l’état Russe et en fuite à l’étranger ne se sont pas fait retirer leur nationalité. Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison que la constitution Russe dans son article 6 paragraphe 3 ne permet pas de déchoir de sa nationalité Russe un citoyen Russe (Гражданин Российской Федерации не может быть лишен своего гражданства или права изменить его). En outre il à également décoré personnellement les “espions”.
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28/07/2010 : A lire la :
Happée par le conflit qui fait rage entre son président et son Premier ministre, la Russie est en train de laisser passer une chance historique de se déployer au Proche-Orient. Les élites russes n’ont pas su élaborer de stratégie dans cette région lorsqu’elles en avaient la possibilité et ne sont plus en mesure de la définir aujourd’hui. Pour Thierry Meyssan, Moscou est paralysé (…) La Russie est paralysée par un conflit au sommet. C’est en réalité, semble t-il, ce qui se passe : le tandem Medvedev-Poutine s’est lentement dégradé et la relation entre les deux hommes a tourné brutalement à la guerre fratricide“. 
(…)
 En définitive, ce sont les atermoiements à propos du nucléaire iranien qui surprennent le plus. Il est vrai que les marchands iraniens n’ont cessé de contester les factures de la construction de la centrale nucléaire de Busher
(…)
Mais le Kremlin n’a cessé de souffler le chaud et le froid. Dmitry Medvedev discute avec les Occidentaux et les assure du soutien russe pour voter des sanctions au Conseil de sécurité. Tandis que Vladimir Poutine assure aux Iraniens que la Russie ne les laissera pas sans défense s’ils jouent le jeu de la transparence. Sur place, les responsables se demandent si les deux dirigeants se sont répartis les rôles selon les interlocuteurs et font ainsi monter les enchères. Ou si la Russie est paralysée par un conflit au sommet. C’est en réalité, semble t-il, ce qui se passe : le tandem Medvedev-Poutine s’est lentement dégradé et la relation entre les deux hommes a tourné brutalement à la guerre fratricide
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Quelques erreurs d’interprétations il me semble, au contraire, la décision de “bloquer” la vente de S-300 à couplée à celle de vendre des missiles Iakhont à la Syrie témoigne au contraire de la position très équilibrée de la Russie au proche/moyen orient. La Russie n’est pas du tout paralysée, et le “doute” entretenu volontairement par Moscou dans la “vente” des S-300 était volontaire. En outre, je doute que des transferts de technologie n’aient pas déjà eu lieu, à un moment ou un autre, vu la longue présence de la Russie en Iran et on peut même envisager que peut être que le système similaire que l’IRAN affirme être en train de développer est « d’inspiration » Russe. Après tout une agence Iranienne a affirmé il y a quelques mois que : « l’Iran disposait de quatre missiles destinés à doter les systèmes de DCA S-300, dont deux lui ont été vendus par la Biélorussie et deux par un vendeur resté inconnu ». Intox ou réalité ?  
 Enfin Comme le souligne le très brillant analyste Dmitri Babitch les propos d’Ahmadinejad déclarant que son homologue russe Dmitri Medvedev “était devenu le messager des plans des ennemis de l’Iran”, en participant, soi-disant, à la campagne visant à ‘’ intimider ‘’État perse dans l’intérêt de l’Etat juif” datent de juin 2010, et précèdent donc largement l’interruption du contrat avec la Russie pour l’approvisionnement en S-300.
Qui doit être accusé de la rupture des relations après cela?

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18/09/2010 – A lire la :
Les amis du président Dmitry Medvedev devraient constituer une association parlementaire trans-partis le 25 septembre prochain. Ce groupe, nommé Go Russia (….) devrait être présidé par Gennady Gudkov, un ancien officier du KGB reconverti dans les affaires et devenu un député très influent. Des commentateurs voient dans cette initiative l’embryon d’un futur parti medvedevien en vue d’un second mandat présidentiel (…) visant prioritairement à priver le Premier ministre Vladimir Poutine de son principal moyen de pression face à son rival. Si le président Medvedev décidait de limoger le Premier ministre, la Douma (Parlement) pourrait le destituer à la majorité des deux-tiers jusqu’ici détenue par les amis de M. Poutine. Il n’est donc pas utile pour le moment que Go Russia réunisse de nombreux députés, il suffit qu’il affaiblisse légèrement les Poutiniens pour que les relations au sommet de l’Etat s’adoucissent“.
Des commentateurs voient dans cette initiative l’embryon d’un futur parti Medvedevien en vue d’un second mandat présidentiel“. 

Il faudrait nous préciser quels commentateurs … Il est curieux que l’article ne mentionne pas que le même jour un sosie de cette association “Go Russia” (dont l’idée directrice avait déjà été soulevée par Poutine lors de ses précédents mandats) a été créé au sein de Russie Unie, le “sosie” de Russie Juste. Si la première association est représentée par l’aile libérale de Russie Juste (et d’ex “libéraux” qui ont plus ou moins rejoint la coalition centrale de gouvernance du Kremlin), la seconde a été crée par Boris Gryzlov et est soutenue par Medvedev. Bien sur Medvedev pourrait “théoriquement” (et légalement en tant que président) congédier son premier ministre (conformément à la constitution) .. Mais dans quels interet alors même que il est plausible que ce soit lui qui soit le prochain président, comme des commentateurs réellement sérieux (ceux la) et proches du pouvoir l’envisagent déjà ?
En outre, il est difficile d’imaginer Russie Juste ‘utilisé’ par Medvedev, le parti ayant obtenu  moins de 12% aux élections de octobre et décidé de fusionner a court terme avec le parti communiste. Par contre Russie Unie va désormais utiliser les termes “Go Russia” et “Russie en avant”, Россия, вперед en Russe qui était par ailleurs le nom d’un parti politique “libéral-conservateur” créé en 1994 par Boris Grigoryevich Fyodorov, à l’époque ou il était “ministre des finances.
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 21/08/2010 – A lire la :
Dans le contexte de guerre des chefs qui fait rage à Moscou, plusieurs décisions manifestent un avantage du Premier ministre Vladimir Poutine sur son « ami de trente ans » et désormais rival, le président Dmitry Medvedev“.

“Guerre des chefs” ?
“Plusieurs décisions manifestent un avantage du premier ministre sur son ami de 30 ans et désormais rival”
Quelle guerre ? Quelles décisions ? 

En outre Dimitri Medvedev ayant 45 ans, je doute qu’il fréquente Vladimir Poutine depuis 30  ans soit depuis ses 15 ans ))
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23/09/2010 – A lire la :
Le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, a reçu le 19 août 2010 Sergei Kiriyenko, directeur général de la société publique Rosatom (…) L’objet de l’entretien était de montrer au Etats-Unis, à Israël, au Canada, et à l’Union européenne, qu’il avait personnellement ordonné la livraison définitive de la centrale de Bushehr à l’Iran malgré leur opposition et celle du président Medvedev“.

Peut t-on “une seconde” imaginer que le président Russe s’oppose à cette décision mais qu’elle soit prise par Vladimir Poutine ? Que veut dire l’opposition qui est faite dans cet article entre “Poutine et l’Iran d’un côté” et ” les États-Unis, Israël, le Canada et l’Union européenne” de l’autre côté ? 
On a pu lire ça ou là des analyses alarmistes imaginant que la Russie pourrait soutenir l’Iran par anti-américanisme, et même devenir une espèce de porte parole du monde musulman anti-sioniste, mais les choses doivent être observées avec moins de manichéisme. Aujourd’hui la Russie pense d’abord à ses intérêts, comme tout pays souverain. Son intérêt dans la région est une « realpolitique », pragmatique et équilibrée et qui a pour but de consolider sa position politique et économique. Malgré ce refus de livraison des missiles à l’Iran, la relation entre les deux pays devrait rester relativement stable, la Russie continuant de soutenir diplomatiquement l’Iran. Du reste, lorsque les manifestations de 2009 contre le pouvoir ont eu lieu en Iran (le réseau Voltaire ayant d’ailleurs à ce moment habilement parlé de tentative de révolution de couleur), les meetings de l’opposition ont vu de très violents slogans anti Russes clamés par cette opposition libérale, ce qui en dit très long. 
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28/09/2010 – A lire la : 
Le président Dmitry Medvedev a débuté une purge au sein de l’appareil régional de la Fédération de Russie pour éliminer les poutiniens. Première victime, le maire de la capitale, Iouri Loujkov, qui avait osé critiquer le président dans un article paru début septembre et avait appelé de ses voeux la réélection de Vladimir Poutine.  (..) De nombreuses personnalités du monde de la culture lui ont apporté leur soutien. Mardi 28 septembre 2010, il a été démis de ses fonctions par décret présidentiel au seul motif « d’avoir perdu la confiance » de M. Medvedev.  Personnalité haute en couleur, M. Loujkov a transformé en 14 ans la capitale de la Fédération de Russie, jadis une agglomération terne et dépressive, en une des villes les plus dynamiques et prospères de la planète.  En sa qualité de maire de Moscou, Iouri Loujkov était un allié indispensable de M. Poutine pour éviter son propre limogeage et son éventuelle arrestation.Poursuivant la purge, le président Medvedev devrait maintenant démettre les gouverneurs régionaux Boris Gromov (Moscou), Dmitry Zelenin (Tver), Leonid Polezhayev (Omsk) et Viktor Kress (Tomsk), avant de s’en prendre directement au Premier ministre Vladimir Poutine et à son gouvernement“.

Aucune « purge » n’a commencé, il ne s’agit que de fantasme. La modernisation de l’état Russe, thème Poutinien,  passe par la démission des dinausores, en place depuis 1,2 ou 3 décennies. Le mouvement a commencé cette année avec le président du Tatarstan, puis du Bachokorstan, et enfin de l’inoxydables Loujkov. Le but est de renouveller les têtes et de remplacer l’ancienne génération par une nouvelle génération.
Loujkov n’est en aucun cas un « allié » de Poutine mais a supplié ce dernier de le laisser en place en 2000. Il est de notoriété publique en Russie que Loujkov ne passait pas l’année, et que celui-ci allait être « remplacé » rapidement. Personne n’a soutenu spécialement Loujkov si ce n’est Iosif Kobzon, ou Loukachenko, pardonnez du peu :). 
En outre 66% des citoyens soutiennent cette décision du président Russe de “congédier” Iouri Loujkov. Enfin personne n’a dit que Moscou a été mal tenu sous les mandats Loujkov, ni le président Russe, ni le premier ministre, mais il est évident et c’est inconstestable que la capitale était tenue par un clan relativement familial, et que la corruption dans certains domaines comme la construction était vraiment excessive. D’ailleurs en ce mois d’octobre, près de 25% des décrets municipaux de construction ont été annulés.
Je rajoute que la nomination du “très Poutinien” Sobyanine comme maire de Moscou  par le président Medvedev démontre bien au contraire la totale unité du tandem au pouvoir et casse l’argument d’une “purge” des Poutiniens.

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 29/09/2010 – A lire la : 
L’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS) a conduit son exercice militaire annuel, du 9 au 25 septembre 2010, au Kazakhstan (..) L’exercice a permis de démontrer le niveau croissant et bien réel de coordination entre les forces russes et chinoises, mais aussi l’actuelle désorganisation des armées russes. Celles- ci sont en effet beaucoup trop longues à déplacer, comme on l’avait déjà constaté lors du coup d’Etat au Kirghizistan. Moscou avait alors renoncé à intervenir militairement simplement parce qu’il ne le pouvait pas. L’Organisation de Coopération de Shanghai gagne chaque année en  crédibilité, bien que la cohabitation explosive au sein du pouvoir russe fasse naître le doute quant aux capacités militaires et à la volonté politique russe sur le long terme“.

Il n’a jamais été question que les troupes Russes se déplacent au Kirghizstan. Cette option impérialiste n’a jamais été envisagée, même lorsque les ressortissants Russes ont été un peu menacés, au plus fort des émeutes ce qui est parfaitement cohérent, la Russie dispose d’une base militaire au Kirghizstan qui est un état “indépendant”.  
Cette contre révolution de couleur naturelle a été observé avec attention par la Russie, et ne venait que confirmer un mouvement de fond qui s’est traduit par le renversement de tous les gouvernements colorés ou affiliés, sponsorisés par des réseaux Américains actifs et qui visaient à déstabiliser les régimes jugés trop pro Russes dans son étranger proche. 
Le nouveau gouvernement Intérimaire du Kirghizstan sous l’égide de Rosa Otounbaïev à globalement bien géré la situation, et la transition actuelle se passe en  très bonne intelligence avec la Russie, qui aide le Kirghizstan économiquement et diplomatiquement. La Russie doit développer cette nouvelle doctrine de Soft-Power en vue d’établir des partenariats  bilatéraux poussés avec les pays proches d’Asie centrale.

2 thoughts on “Réponse au Réseau Voltaire

  1. Anonymous

    Curieux que Thierry Meyson ne soit pas dans le mille ; j’ai un immense respect pour cet homme car sa clairvoyance et surtout le courage de l’exprimer sont très rares en occident.
    Cette petite erreur de jugement le rendra plus fort à l’avenir ; avez-vous pensé à lui envoyer votre analyse ?

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  2. Anonymous

    Ce que je perçois à distance sur le sujet se rapproche effectivement d’une tempête dans un verre d’eau.Sauf sur un point.

    Les relations entre les deux hommes sont excellentes mais diffèrent sur la question iranienne.

    Khamenei a fait ses études à Moscou.Il parle le russe.
    Vladimir Poutine et lui ont d’excellentes relations.Fondées sur une confiance mutuelle.

    La prérogative des relations internationales appartient au Président , ce qui explique la prééminence du point de vue de Dimitri Medvedev.

    Dans deux ans , une orientation nouvelle plus conforme à l’attente de Thierry Meyssian devrait être impulsée.

    Pour le reste l’entente entre les deux hommes est remarquable car elle a résisté à beaucoup d’intrigues à l’intérieur et à l’extérieur de la Russie.

    LG.

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