Category Archives: Voix de la Russie

Réflexions sur l’émigration et sur l’immigration

Вручение дипломов с отличием выпускникам МГУ им. М.В.ЛомоносоваDans le courant de l’année 2011 une violente campagne médiatique a frappé la Russie pour rappeler a quel point le pays était sans avenir. Divers médias francophones, tel que le Figaro, laTribune de GenèveLe soir, ont commenté les résultats d’un sondage qui expliquait « qu’un cinquième des Russes (22 %) souhaiterait émigrer de Russie », des résultats qui « mettaient à mal les mots d’ordre patriotiques et les projets ambitieux du Kremlin » écrivait même Europe1.

En effet comment imaginer que le pays ait un quelconque avenir si un jeune cerveau sur cinq souhaite quitter le pays ? De nombreux journalistes et commentateurs, lorsque les manifestations de fin 2011 ont fait descendre la « classe créative » dans la rue, y ont vu la confirmation d’une tendance de fond. Continue reading

Des nouvelles de Benghazi et de la « Libye soi-disant libérée »

L’article original a été publié sur Voix de la Russie

Certains intellectuels français nous promettaient encore jusqu’à très récemment que le risque islamiste serait en quelque sorte emporté dans la fougue démocratique du printemps arabe et du grand changement en Libye. Les Libyens, affirmaient-ils, allaient démontrer « qu’on peut être à la fois un musulman pieux et s’inscrire dans la liberté d’expression, la démocratie, l’égalité des sexes » pendant que le président Sarkozy dans cette affaire aurait lui « été exemplaire ».

Continue reading

Une petite histoire du surf en Russie

WakeboarderAlors que la Russie apparaît de plus en plus comme un pays qui remporte des médailles et des coupes dans le domaine des sports de glisse sur neige, le pays semble se tourner dans une autre direction : les sports de glisse aquatiques et notamment le surf.

En 2001, le très célèbre Surfer’s journal, que seuls les surfeurs connaissent, avait en effet publié un étonnant reportage ou quelques Californiens illuminés avaient eu l’idée de venir en Russie et longer la baie d’Okhotsk pour y chercher le Saint Graal : des spots de surf encore vierges et des vagues parfaites. Le reportage nous apprenait qu’en Russe une planche de surf se dit Doskaet rendait bien compte des impressions de nos jeunes Californiens, qui découvrait l’état de délabrement de l’Extrême-Orient d’une Russie postsoviétique, durant l’an I de l’ère Poutine. Continue reading

Réflexions sur les valeurs traditionnelles, de l’Italie à L’Extrême-Orient

venice-785Venise, ville célèbre dans le monde entier, vient de rompre son jumelage à la fin du mois de janvier ses relations avec Saint-Pétersbourg et ainsi briser la grande relation, historique et privilégiée que cette dernière entretient avec cette ville et l’Italie. Saint-Pétersbourg est en effet souvent appelée la Venise du Nord et les ressemblances avec sa cousine du Sud-Ouest de l’Europe sont nombreuses. Les deux villes ont voulues être, et sont devenues des pôles commerciaux, politiques et culturels, mais aussi des symboles forts de leurs pays respectifs. Nombre d’architectes qui ont contribué à la grandeur de Saint-Pétersbourg sont en outre Italiens, que l’on pense par exemple à Trezzini, Micchetti ou Rastrelli. Continue reading

Réflexions sur la « Russie de Poutine » et la « France sans De Gaulle »

L’article original a été publié sur Voix de la Russie
Début 2002, un clip avait fait relativement parlé de lui durant la campagne présidentielle russe. Un trio de jeunes filles intitulé Поющие Вместе (littéralement Chantant ensemble) avait en effet interprété un titre intitulé : Je veux un homme comme Poutine (Takogo, kak Putin).
La chanson se voulait une ode au président russe et aux vertus que celui-ci représentait en tant que président mais aussi et surtout en tant qu’homme. Certes Vladimir Poutine n’avait pas à l’époque affirmé son image autant qu’aujourd’hui 10 ans plus tard mais celui-ci avait déjà exprimé son image d’homme fort et de dirigeant à poigne.
Il y a 10 ans la Russie sortait de 11 ans de désintégration post-soviétique, de 11 ans  d’anarchie politico-sociale et de règne des mafias, d’une crise
financière et d’une banqueroute de l’Etat (en 1998) mais aussi d’une crise morale et sanitaire sans précédent. La Russie s’était retrouvée au
bord de l’implosion et beaucoup, tant Russes qu’étrangers, avaient pensé que le pays n’y survivrait pas. Le très célèbre Atlantic magazine avait même dramatiquement annoncé en mai 2001 la disparition de la Russie dans les prochaines années. Pourtant, au cœur du pays, des forces
travaillaient à ce que la Russie ne disparaisse pas, un souhait que la majorité des citoyens russes partageaient bien évidemment.

10 ans plus tard la Russie affiche un tableau de bord plus que correct et que peu avaient prévu. La situation démographique y est rétablie et la
tragique croix russe (faible natalité et forte mortalité) inversée pour la première fois depuis 1991. L’assainissement des finances publiques et de l’économie russe est confirmé après 10 ans de forte croissance économique et de gouvernance stable et sans alternance, permettant la réalisation de reformes sur la durée. Le pays est aujourd’hui l’un des moins endetté de la planète et l’un de ceux qui a le plus de réserves financières, le taux de chômage y est très bas et le revenu par habitant augmente, tout comme le moral des citoyens.
La Russie est devenue une grosse PME bien gérée
Il y a 10 ans, le clip (Takogo, kak Putin) avait suscité beaucoup de moqueries des médias français qui commençaient tout juste leur campagne de diffamation de la gouvernance russe (elle dure depuis) en dénonçant l’apparition d’un culte de la personnalité, ombre de la dictature. A l’époque l’Euro venait d’être mis en circulation, la France et les Français vivaient l’ascenseur européen et on leur avait juré que tout irait bien, que l’Europe allait garantir leur avenir, la paix (lire à ce sujet cet excellent article de mon collègue Laurent Brayard) et aussi la sécurité.
10 ans plus tard il est pourtant inévitable de constater que la situation en France s’est aggravée à un tel point que les dissimulations statistiques de l’Etat ne servent plus à rien. L’Etat est ruiné et sa dette a été évaluée à la fin du troisième trimestre 2012 à 1 818,1 milliards d’euros, soit 90 % du PIB, contre 663,5 milliards d’euros fin 1995, (55,5 % du PIB). Près de 30 % des actifs (9 millions de personnes) ne travaillent pas à temps plein et les soldats sont désormais désarmés lorsque le président visite des casernes, preuve que la situation sociale s’électrise fortement.
La France est devenue une moyenne PME très mal gérée.
Comment être surpris d’apprendre récemment que les français sont 64 % à être mécontent de la situation ? Je profite au passage de montrer la perfidie de certains médias qui dans le même temps titrent ces jours-ci sur la chute de popularité du président Poutine. Celui-ci serait à son niveau le plus bas depuis 2000 : seulement 62 % des sondés seraient satisfait du travail du président, les lecteurs français apprécieront le « seulement » j’en suis certain.
Comment être surpris également que la société française montre des signes de « crispations alarmantes » ? Le Monde peut faire semblant de s’effrayer mais regardons en détails ces sondages et tentons d’en comprendre le sens profond:
– 89 % des sondés pensent que la France décline.
– 87 % des sondés pensent que la France a besoin d’un vrai chef d’Etat.
– 86 % des sondés pensent que l’autorité est une valeur trop critiquée aujourd’hui.
– 72 % des sondés trouvent que le système démocratique fonctionne mal en France.
– 60 % des sondés voient la mondialisation comme une menace et souhaitent que le pays se protège.
Résumons : les Français veulent un vrai chef d’Etat, qui restaure un peu d’ordre et d’autorité, et qui protège la France contre les dangers de la
globalisation. Bref il faut être clair : un nouveau général De Gaulle ! On pourrait du reste même comparer le souhait des français de 2012 avec
celui des russes en 2002.
Mais si les premiers ont volontairement chassé De Gaulle, les seconds sont pour l’instant visiblement assez sages pour garder Poutine, l’avenir proche dira s’ils  ont eu raison ou pas…

La Russie face au problème de l’immigration (Рartie 2)

L’article original a été publié sur le site de Voix de la Russie

*
Русскую версию можно прочитать Здесь
 
 
Certes la Russie a une très longue tradition migratoire et est même aujourd’hui le second pays au monde pour le nombre d’immigrés en comparaison de la population totale, après les Etats-Unis. Selon les données officielles du FMS, en 2011 sont entrés en Russie pour travailler 13,6 millions d’étrangers.
 
Parmi eux et a titre informatif 22% d’Ukrainiens, 14% d’Uzbeks, 11% de Kazaques, 7% de Tadjiks, 4% de Kirghizes, 3,6% de Chinois et 3% d’Arméniens. La grande majorité de ces étrangers (prés de 10 millions) travaillent de façon plus ou moins illégale. Sur les quelques 30.000 spécialistes qualifiés qui sont entres dans le pays en 2011, 1.100 allemands, 888 anglais, 856 américains, 805 français, 534 Turcs. Enfin entre 4 et 5 millions de clandestins se trouveraient également sur le territoire russe, dont une grande majorité a Moscou et banlieue.

 

 
La Russie est en effet face a un double problème tant d’immigration que d’un besoin de main d’œuvre pour les deux décennies a venir, besoin de main d’œuvres destiné a permettre au pays de maintenir sa croissance économique malgré le déficit humain créé par l’effondrement  démographique de la période 1995-2005.
 

Continue reading

La Russie face au problème de l’immigration (Partie 1)

L’article original a été publié sur le site de Voix de la Russie

*
Русскую версию можно прочитать Здесь  

*
Récemment, une ville russe a décidé de simplement interdire l’immigration sur son territoire. Il s’agit de Novy Urengoi, la capitale russe du gaz, située dans l’oblast de Tioumen, dans l’extrême nord de la Russie.
 
La ville a été fondée en 1973, à la suite de l’ouverture du riche gisement gazier d’Ourengoï et est devenue une de ces « villes énergétiques » de la Russie d’aujourd’hui. Ce fort développement a entraine une croissance démographique importante, la population de la ville a été multipliée par 13 depuis 1979 pour atteindre 120.000 habitants en 2010 selon le dernier recensement. Mais la croissance démographique de la ville  continuerait à augmenter puisque l’immigration vers la ville aurait en effet augmenté de 20% en 2012 selon les premiers chiffres officiels, pendant que le nombre de crimes et délits aurait lui augmenté de 64% en 2011 (sources).

Face a cet afflux important d’immigrants et au bouleversement de l’équilibre social lié, les autorités municipales ont réagi de façon radicale puisqu’elles viennent d’adopter des mesures qui réglementent drastiquement le droit de tout simplement émigrer à Novy Urengoi, mesures qui s’appliquent tant aux russes qu’aux étrangers. Désormais pour juste visiter la ville, il faut obtenir un permis spécial, par le biais d’une invitation émise par une compagnie locale ou un résident de la ville. Ce processus prend quatre semaines pour un citoyen russe et huit semaines pour un étranger. Quand à aller travailler dans la ville, il faut impérativement obtenir une invitation professionnelle d’une société installée dans la ville, il n’est donc plus possible de rentrer dans la ville et d’y chercher un travail sur place. Continue reading

Russie et Allemagne : les poids lourds de l’Europe sont ils des sosies démographiques? /

kollaj_f4d5f45dffdffSuite au second volet de mon article sur l’immigration en Russie, un lecteur m’a indiqué sa grande surprise quand a ce chiffre de 10 millions de travailleurs nécessaires d’ici à 2020 en Russie, soit 770.000 / an.

D’après lui ce chiffre est surestimé et pondérable puisque dans de nombreuses industries russes, la marge d’optimisation des gains de productivité est réelle, ce qui pourrait faire baisser le besoin en capital humain.

C’est sans doute vrai, mais le creux démographique de la période 1992 – 2008 va se faire sentir et entrainera malheureusement qu’en 2025 par exemple, le nombre de jeunes russes de 25 ans devrait être de 30% inférieur à aujourd’hui. D’où un besoin crucial en capital humain pour compenser ce gap démographique. Pourtant le catastrophisme mystico-médiatique qui entoure la situation démographique et migratoire russe ne concerne curieusement pas la situation de l’Allemagne, frappée elle aussi d’un double manque de main d’œuvre, et d’une crise démographique avancée. Continue reading

Obélix en Russie?

L’article original a été publié sur le site de Voix de la Russie
*

 

Récemment une affaire a fait scandale en France lorsque le très célèbre Gérard Depardieu a décidé non seulement de quitter le pays, mais aussi ouvertement menacé de rendre son passeport français, après avoir été traité de « minable » par le premier ministre Jean-Marc Ayrault.
L’acteur a décidé de s’installer à la frontière Belge, a seulement quelques kilomètres de l’hexagone, plus précisément dans la petite ville de Néchin. L’affaire s’est rapidement envenimée et surtout très politisée puisque l’acteur a souhaité montrer son désaccord à devoir payer 75% d’impôts.


Dans une tribune libre, l’acteur Philippe Torreton, engagé politiquement à gauche, a lui fortement condamné le choix de Gérard Depardieu, tout comme Line Renault ou Michel Sardou. Gérard Depardieu a en revanche obtenu le soutien de Catherine Deneuve, Brigitte Bardot, Fabrice Luchini ou encore Philippe De Villiers. Mais c’est de Russie que sont venus les soutiens les plus inattendus puisque le président Vladimir Poutine tout comme le premier ministre Dmitri Medvedev ont invité l’acteur à venir s’installer en Russie, lui promettant diverses facilitées ou encore en affirmant que « En Russie, l’impôt sur le revenu est de 13 % et nous n’allons pas le modifier ».
 
L’affaire Depardieu a en effet mis le doigt sur un des problèmes récurrents auquel fait face la France: l’émigration de ses « riches ». Car Gérard Depardieu n’est pas le seul bien évidemment à avoir quitté l’hexagone pour des raisons fiscales. De nombreuses célébrités françaises ont choisi l’exil fiscal, que l’on pense par exemple à Yannick Noah, d’ailleurs en litige avec le Fisc français, Johnny Halliday, Florent Pagny, Alain Delon ou Paul Loup Sulitzer. Les sportifs aussi sont nombreux a s’être défiscalisés, par exemple Marion Bartoli, Richard Gasquet, Gilles Simon, Jo-Wilfried Tsonga, Sébastien Loeb ou encore Amélie Mauresmo. Et que dire des familles Meunier (Carrefour, domiciliée en Belgique), Castel (Nicolas, Vichy Célestins, domiciliée en Suisse) ou Weirtheimer (Chanel, domiciliée en Suisse) ou Mulliez (Auchan et Décathlon, domiciliée en Belgique), ou encore de Bernard Arnault qui souhaite devenir Belge?
 
Obélix du reste suit le chemin d’Astérix (Chistian Clavier) lui aussi parti de France et « refugié » à Londres en 2010, tant pour des raisons fiscales que politiques, s’estimant victime d’attaques suite à son soutien à Nicolas Sarkozy. L’affaire pourrait être tragi-comique mais elle est plutôt grave et traduit une réalité économique et migratoire assez inquiétante. Si plus de 5.000 entrepreneurs quittent la France chaque année pour des raisons fiscales, chaque année ce sont en tout prés de 250.000 français qui partent de France. Si une majorité revient, le solde reste négatif et en moyenne la France perd annuellement 60 a 70.000 de ses ressortissants, qui vont chercher une vie meilleure a l’étranger. Nos concitoyens sont déjà plus de deux millions à vivre à l’étranger et malheureusement pour l’hexagone cette tendance lourde devrait s’accentuer, notamment chez les jeunes, qui font face a une situation économique qui semble sur le chemin Grec ou Espagnol. Cette émigration, ajoutée à celle des sociétés, couterait ainsi chaque année prés de 50 milliards d’euros à l’état français.
 
Contrairement aux idées véhiculées par les medias Mainstream, les pays ou les jeunes sont les plus optimistes sur leurs avenirs ne sont pas ceux que l’on croit. La foisonnante enquête menée cette année par la Fondation pour l’innovation politique (25 pays sondés, et 32.700 personnes consultées) montre en effet que les moins de 29 ans les plus optimistes quand à l’avenir de leurs pays sont les russes, les mexicains, les sud-africains, les israéliens et les américains ! Quand aux jeunes les plus optimistes quand à l’avenir de leur pays, il s’agit des chinois, des canadiens, des marocains, des australiens et des russes!
La France dans ces deux classements est en queue de peloton, l’indice de confiance national dans l’avenir du pays étant au même niveau chez les jeunes français que chez les jeunes grecs.
Et si la fuite d’Obélix de Gaule était le symbole que finalement on quitte la France parce qu’elle est devenue tout simplement insupportable?

La grande Albanie : un projet américain contre le monde orthodoxe ?

L’article original a été publié sur le site de Voix de la Russie
*

Mercredi dernier, le Premier ministre albanais Sali Berisha a prôné l’octroi de la nationalité albanaise à tous les Albanais, où qu’ils résident. Cette déclaration a été faite lors d’une visite de la ville de Vlora où l’indépendance de l’Etat Albanais a été prononcée, il y a juste 100 ans. A l’époque l’Albanie venait tout juste de se libérer du joug ottoman.

Cette déclaration fait suite a une autre déclaration, commune cette fois, que Sali Berisha avait fait avec son homologue  Kosovar Hashim Thaçi il y a quelques semaines, promettant l’union detous les Albanais. L’endroit était, il faut le dire bien choisi, puisque l’immense majorité des habitants du Kosovo y est aujourd’hui d’origine albanaise, ce qui n’a pas toujours été le cas. Lors de la guerre des Balkans en 1913, les serbes constituent encore la majorité de la population. En 1941, le Kosovo est rattaché à la Grande Albanie (déjà) sous protectorat fasciste italien. Après la guerre, lemaréchal Tito interdira l’immigration albanaise car la Yougoslavie ne pouvait selon lui être forte qu’avec une Serbie la plus faible possible.En 1974, c’est du reste lui qui attribue au Kosovo le statut deprovince autonome, statut qui sera supprimé par Slobodan Milosevic en 1989, alors que les Serbes ne représentent déjà plus que 15 % de la population.

Lorsqu’en 2008 le Kosovo se déclare indépendant, prés  d’une décennie après l’intervention militaire occidentale, peu de commentateurs mettent le doigt sur l’Albanité dominante de ce nouveau petit état. L’heure est au contraire à la fête pour ce peuple soi disant oppressé et qui accède enfin à la liberté. Au sein de la plupart des pays Occidentaux et de l’Union Européenne, la reconnaissance est instantanée, sans que ne se pose la question du traitement de la minorité serbe et de l’avenir qui lui était réservé, malgré le terrible précédent de 2004, lorsque les chrétiens avaient été victimes de pogroms, les églises brulées, et les droits  humains les plus élémentaires bafoués. Il est vrai que l’Europe, pardon l’UE, avait à cette époque d’autres priorités : l’organisation essentielle d’une gaypride a Belgrade.

Il aura donc fallu seulement quatre ans pour que la farce de l’indépendance du Kosovo apparaisse enfin publiquement. Seulement quatre ans pour que le Premier ministre albanais donne raison aux nationalistes serbes qui ont eux toujours affirmé affronter non pas les Kosovars (les habitants de la région du Kosovo étant des serbes) mais bel et bien des Shqiptars, dans un nouvel épisode du conflit ancestral qui oppose depuis prés de 6 siècles dans les Balkans les Slaves orthodoxes aux fils de convertis de l’empire Ottoman. Le soutien occidental à la création du Kosovo et l’acharnement contre la Serbie peuvent sembler complètements inexplicables. Pourtant de 1991 à 2008, une seule et même logique a animé les stratèges américains: la destruction de la Serbie, afin que celle-ci soit la plus faible possible a l’avenir, au moment historique inévitable ou elle allait de nouveau se tourner vers la Russie. Bien sûr, il fallait dans le même temps une Russie également affaiblie au maximum. Si de 1991 à 2000 une guerre militaire et médiatique a été menée contre la Serbie de Milosevic en vue de son anéantissement, dans le même temps, c’est une guerre économique et morale qui était menée contre la Russie d’Eltsine. La croisade contre le monde communiste s’est transformée en croisade contre le monde orthodoxe, et contre son centre névralgique et politique le plus souverain : la Russie. Le théoricien du containment russe en Eurasie, Zbigniew Brezinski, affirmait lui-même en 2007 que: « Le principal ennemi de l’Amérique était désormais l’église orthodoxe russe».  
La création de la grande Albanie peut sans doute être vue dans ce sens historique et géostratégique. Elle est une nouvelle allumette jetée, une
allumette qui pourrait créer une étincelle et déclencher un nouvel incendie dans le brasier balkanique. Cet incendie aurait pour conséquence d’affaiblir un peu plus l’Europe, mais aussi de déstabiliser un peu plus le monde orthodoxe (Macédoine, Grèce, Monténégro, Serbie…)
et de freiner son rapprochement avec la Russie. Par ricochet, c’est donc l’influence russe en Europe de l’Est qui serait remise en cause, et
donc son rapprochement avec l’Europe de l’Ouest. 
Ce faisant, l’Amérique aurait atteint une nouvelle fois son objectif essentiel: éviter un rapprochement continental et européen entre les mondes catholiques et orthodoxes.