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La Russie représente un « modèle réduit » du monde

Dans la foulée de la publication de notre article sur le lancement du projet « Bienvenue en Russie » nous interrogeons aujourd’hui l’un des co-fondateurs de cette nouvelle ONG, Alexandre Stefanesco.

IR : Bonjour Alexandre, pourriez-vous vous présenter ?

Alexandre : je suis un Français devenu Russe qui réside et travaille en Russie depuis 2008. Je suis un entrepreneur géopolitique, marié et père de 2 enfants.

Mon activité principale en Russie est un cabinet de conseils en ressources humaines et recrutement que j’ai créé en 2012 et qui aide les entreprises sur la dimension RH.

Je suis également blogueur et explique les réalités de la vie dans ce pays, que ce soit sur ma chaine YouTube ou sur mon canal sur Telegram

En 2020, j’ai développé une activité d’accompagnement des étrangers (occidentaux) qui souhaitent venir vivre en Russie, la Ruspatriation. C’est un programme d’accompagnement par lequel nous accompagnons les francophones d’occident qui souhaitent vivre en Russie et ce sur tous les aspects : migratoires, professionnels et économiques, scolaires et universitaires (pour les enfants), sur l’immobilier, l’apprentissage du russe etc.

Nous avons des formations en ligne, faisons aussi des consultations individuelles sur mesures pour construire le projet Russie et mettre en place la bonne stratégie, définir l’agenda et le budget et enfin nous faisons des accompagnements personnalisés de découverte du pays, ce que j’appelle le tourisme migratoire, qui précède en général l’installation définitive.

Nous organisons également depuis cette année, des voyages de tourisme migratoire « en groupe », les Ruspatours, qui sont les premiers voyages à caractère touristique de groupes depuis le début de l’opération militaire spéciale.

Au total, nous avons aujourd’hui 5 personnes à temps plein sur la Ruspatriation.

Enfin, en novembre dernier, nous avons co-fondé, avec 3 autres étrangers qui résident dans le pays, l’ONG de « Bienvenue en Russie » qui est soutenue par le fonds Maria Boutina, la député en charge du visa idéologique et que vous avez du reste déjà interviewée sur IR.

IR : Quel est le sens de ce projet et le but de cette ONG ?

Alexandre : Les autorités russes ont en 2024 créé un nouveau mécanisme migratoire destiné aux citoyens étrangers des 47 pays « non amicaux » envers Moscou ; ce mécanisme leur donne la possibilité de s’installer en fédération de Russie et d’y obtenir un permis de séjour temporaire de 3 ans sur le motif du rejet des politiques mises en œuvre par les États dont ils ont la citoyenneté ou la résidence permanente et qui imposent une idéologie qui contredit les valeurs spirituelles et morales traditionnelles russes.

Quelles sont ces valeurs ? La Vie, la Dignité, les Droits et libertés de l’homme, le Patriotisme, le Civisme, le Service à la patrie, les Idéaux moraux élevés, une Famille forte, la Priorité du spirituel sur le matériel, l’Humanisme, la Charité, le Sens de la justice, l’Esprit collectif, l’Entraide, le Respect mutuel, la Mémoire historique et l’Unité des peuples de la Russie.

Donc l’idée de cette immigration qualifiée et choisie pour des raisons de valeurs partagées est juste extraordinaire mais à ce jour, rien n’est encore techniquement mis en place pour absorber les flux d’occidentaux qui sont en train de se former et d’arriver en Russie et surtout accompagner leur bonne intégration.

On constate qu’il y a deux difficultés principales :

La première est qu’il est difficile de « dehors » de trouver de l’information juste, à jour et efficace sur la Russie pour pouvoir se projeter et bâtir son projet de déménagement en Russie. A contrario, ce flou laisse place a des représentations souvent erronées sur ce que sont les réalités de la Russie d’aujourd’hui.

La seconde est qu’aujourd’hui « au sein » de la fédération de Russie, peu est prévu et organisé pour permettre à de potentiels immigrants occidentaux de visiter pratiquement la Russie (en vue de s’y installer), que ce soit sur le plan administratif, migratoire et professionnel. Il n’existe aucun parcours d’immigration comme au Canada par exemple, alors que les autorités veulent pourtant accueillir des dizaines de milliers d’immigrants idéologiques.

L’ONG « Bienvenue en Russie » se donne donc pour mission de promouvoir et accompagner cette immigration spirituelle et morale occidentale en apportant des solutions aux problèmes existants.

Il y aura dans les premiers temps 4 directions principales :

  1. L’information : l’ONG offrira des ressources détaillées sur l’immigration, les démarches légales à suivre mais aussi les nombreux avantages de s’établir en Russie.
  2. Fournir de l’assistance : L’ONG répondra aux interrogations spécifiques, établira des connexions avec les interlocuteurs clés en Russie et facilitera la communication avec les autorités et organisations pertinentes nécessaires lors du parcours d’immigration.
  3. Optimiser les processus migratoires : L’ONG travaillera en synergie avec les régions russes pour concevoir des stratégies adaptées, garantissant une immigration fluide et sur mesure.
  4. L’organisation de séjours : L’ONG accompagnera et promouvra l’organisation de voyages en Russie en apportant une aide pratique et des conseils personnalisés.

IR : Pourquoi choisir d’habiter en Russie ?

Après le chaos qui a suivi la disparition de l’Union soviétique, est apparue la fédération de Russie.

C’est un pays qui est depuis 25 ans en redressement continu que ce soit sur le plan moral, économique, spirituel … Et ce malgré les sanctions de 2014 et 2022 et l’opération militaire en cours.

La Russie d’aujourd’hui est un pays plutôt européen, mais aussi eurasiatique, qui refuse l’agenda wokiste et son logiciel d’exploitation politique est un mélange de tradition et modernité. C’est un pays dans lequel les élites politiques promeuvent activement les valeurs traditionnelles et le patriotisme.

La Russie est un pays de la taille d’un continent, il y a donc de grandes disparités intérieures. La Russie représente un « modèle réduit » du monde, bien plus que les États-Unis. Le pays vit en même temps au XIXe, au XXe et au XXIe siècle

Il y a « des Russies » plus qu’une Russie.

Une Russie des grandes villes telles que Moscou, Saint-Pétersbourg, Samara, Nijni Novgorod ou Ekaterinbourg. C’est une Russie en hyper développement. Elle comprend 25% des habitants et est le centre politique de la Russie. C’est une Russie assez riche, connectée, moderne et souvent en avance sur l’Europe du point de vue technologique.

Une autre Russie est celle des villes industrielles de 25 000 à 500 000 habitants. Ces villes industrielles ont un peu plus conservé une philosophie et un mode de vie un peu plus soviétiques. Ces villes comptent un grand nombre de cols bleus et d’employés du secteur public, et certaines villes sont mono-industrielles. C’est une Russie qui est plus conservatrice qui comprend 35% des habitants du pays.

Une autre Russie est le vaste territoire périphérique des villages, des villages semi-urbains et des toutes petites villes qui abritent 35% de la population russe. Cette troisième Russie vit de la terre et est assez indifférente à la politique car le calendrier agricole n’est pas, ou est peu affecté par les changements au sommet.

Enfin il y a une Russie des républiques ethniques et religieuses, du Caucase du Nord et, dans une moindre mesure, au sud de la Sibérie (les régions de Touva et de l’Altaï) qui abritent environ 5% de la population totale du pays. Ces républiques n’ont pas d’industrie.

75% de la population de Russie habite dans la partie Ouest du pays, qui ne fait que 25% du territoire. Il faut comprendre que 80% du territoire russe est un territoire pas développé et inhabité.

Du point de vue de la vie pratique dans la Russie d’aujourd’hui pour un européen, le pays est une expérience absolument unique.

Enfin c’est un pays qui reste, pour les européens, le seul BRICS européen.

IR : Quel est le flux d’immigration occidentale actuel vers la Russie ?

Le mécanisme d’obtention de permis de séjour temporaire pour motif de soutien aux valeurs spirituelles et morales traditionnelles russes vient d’apparaître, par conséquent il est encore trop tôt pour évaluer son impact réel.

Également, le « déménagement » est quelque chose de long, il faut du temps pour construire son parcours, du temps pour organiser son déménagement, quitter son travail, vendre ses biens ou son business, s’installer etc.

Donc on verra sans doute dans 2 ou 3 ans quel volume d’occidentaux aura choisi la Russie et surtout aura réussi à s’intégrer dans le pays.

C’est tout l’enjeu de ce mécanisme et de ce nouvel outil qu’est « Bienvenue en Russie ».

SOURCE : International Reporters