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Une petite histoire de l’immigration en Russie, de 1990 à 2030

La Russie a souvent une image de pays fermé, et dont la population serait hostile aux étrangers. Pourtant, la Russie est l’un des pays au monde qui acceuille le plus d’étrangers sur la planète. Cette tradition d’accueil de la Russie est, contrairement aux préjugés, très ancienne et notamment sous l’URSS, avec les échanges de population des républiques de l’Union. Beaucoup de fantasmes circulent sur la Russie et l’immigration en Russie, les quelques éléments factuels ci-dessous ont pour but de permettre d’y voir un peu plus clair sur ce sujet si complexe.


Flux migratoires à l’ effondrement de l’URSS


Depuis la chute de l’URSS et “l’ouverture” des frontières, la “Russie” a tout d’abord été victime d’une grosse émigration, concentrée vers quelques pays : Allemagne, Israël, États unis .. On estime qu’entre 1990 et 2003, près de 5 millions de personnes ont quitté la Russie.


En parallèle et de façon continue, la Russie a connu une assez grosse immigration,
composée essentiellement de Russes de l’espace post-soviétique, (l’immigration dite des pieds rouges) mais aussi et d’Ukrainiens, d’Arméniens et de Tatars. 

Les pieds rouges, soit les Russes de l’ex-URSS (hors Russie) étaient estimés à 25 millions à la fin des années 80 (voir cette carte de 1994). Ces derniers ne sont cependant pas tous rentrés en Russie, on estime qu’il reste aujourd’hui près de 17 millions de russes dans les états de l’ex-URSS, principalement en Ukraine (8 millions), au Kazakhstan (4,5 millions), en BiéloRussie (1,2 million), dans les pays Baltes (1 million), en Ouzbékistan (800.000), au Kirgystan (500.000) et au Tadjikistan (400.000).

Immigration dans la Russie les années 2000


Dans les années 2000, l’accélération de l‘effondrement démographique s’est couplé à une forte croissance économique qui a créé un appel d’air migratoire sans précédent, de Russes de l’extérieur, de Russophones de la CEI mais aussi une immigration internationale, d’Europe, d’Asie, d’Amérique, mais également du proche orient et d’Afrique. L’étude de ces flux migratoires permet d’imaginer des scénarios migratoires pour la Russie de 2010 à 2030.


Dès 1995 et jusqu’à 2005, l’émigration a diminué et l’immigration légale également. Dès 2005, alors que l’émigration à continué à baisser, l’immigration (légale) elle a recommencé à augmenter.


De 1990 à 2008, l’immigration en Russie de ressortissants de pays étrangers a atteint 5.347.027 personnes. Tous ne sont pas restés, 4.168.980 seraient restés en Russie, soit 75%. Cela correspond à un apport net moyen de 231.610 personnes / an. Je rappelle que la population de la Russie étant de 142 millions d’habitants, cela fait annuellement moins de 0,2% de la population du pays. Bien sur il s’agit de l’immigration officielle, contrôlée et « publique » et d’informations basées sur un recensement fédéral qui date de 2002, le prochain étant en préparation et devrait avoir lieu à l’automne 2010.
 

D’où vient cette immigration ?


A 90% des pays de la CEI comme on peut le voir sous le graphique ci-dessous.

L’apport net pour l’année 2009 est donc réparti de la façon suivante : 241.200 ressortissants supplémentaires en provenance de la CEI et 6.300 du reste du monde. On peut donc bien constater que si 90% des ressortissants de la CEI « restent » (au moins un an) en Russie, ce taux n’est que de 30% pour les migrants du reste du monde.

Le gros de l’immigration est donc une population Russophone, issue de l’ex espace Soviétique. Le graphique ci-dessous donne une estimation de l’évolution des migrants sur 15 ans, répartis en 5 catégories de l’ex espace Soviétique : le Kazakstan, l’Asie centrale, les pays Baltes, la Transcaucasie et la zone Européenne de cet espace (Ukraine,Biélorussie, Moldavie).



En y regardant de plus près, on peut voir que de 1992 à 1998 le « gros » de cet apport migratoire vient donc du Kazakstan et d‘Ukraine, et dans une moindre mesure de l’Ouzbékistan et de la Kirghizie. Soit d’Ukraine et d’Asie centrale. Depuis 2006 c’est l’ Ukraine qui devenu est le principal pays « fournisseur d’immigrés », devant le Kazakhstan et l’Arménie.

De 1992 à 2007, le gros de l’immigration vers la Russie est composé de Russes ethniques (pieds rouges) à 65%, et de citoyens des minorités de Russie, qui rentrent au pays (11%).


Cette structure de l’immigration évolue néanmoins, comme le graphique ci-dessous nous le montre. En 2003, la part de Russes ethniques était de 65%, et de Slaves (incluant l’Ukraine et la Biélorussie) de 72%.

En 2007, la part de Slaves est tombée à 50%, la part de ressortissants du Caucase a augmenté de 9 à 21%, et d’Asie centrale de 4 à 14%.


Un autre détail de cette immigration ci-dessous : l’analyse des migrants, de 2002 à 2007, puis sur cette période, selon leur(s) nationalité(s). On voit que plus de 65% ont la nationalité Russe, près de 15% ont la nationalité Russe « et » une seconde nationalité (du pays de résidence ?), enfin près de 20% ont une nationalité de la CEI.



Le centre de sondages GKS nous donne le détail de la répartition de cette immigration via les entrées sur les années 2003 à 2008.  

Idem, les sorties du territoire de la fédération :

 
L’immigration clandestine, estimations


«Le nombre de migrants illégaux en Russie pourrait atteindre le chiffre de 15 millions. C’est plus qu’en Amérique et en Europe prises ensemble … D’après les évaluations actuelles, on compte 500.000 personnes enregistrées sur les 10 millions d’étrangers travaillant dans notre pays. Pourtant, a-t-il dit, 10 millions ce n’est pas un chiffre définitif car ‘personne ne sait au juste combien ils sont à travailler chez nous’, ils peuvent très bien être 15 millions».

Vladimir Poutine – Agence de presse «Novosti», décembre 2006


En 2008, selon les chiffres du service fédéral de l’immigration (FMS), il y aurait 9,2 millions de citoyens étrangers en Russie, dont 80% viendraient d’un pays de la CEI. De ces 9 millions , les 2/3 travailleraient illégalement.


Quelques chiffres avant de poursuivre : 

– 1,74 million : le nombre de citoyens étrangers officiellement enregistrés à Moscou en 2006.

– Entre 70.000 et 2.000.000 : le nombre d’immigrés illégaux dans la capitale, Moscou en 2008.

– 1,3 million de permis de travail vont être attribué à des étrangers en 2010 en Russie. La prévision était de 3,9 million pour 2009 mais la crise a fait baisser le nombre d’attributions.


A moscou, les autorités souhaiteraient enrayer totalement l’immigration en ne proposant « que » 100.000 permis de travail pour étrangers, bien que les quotas ont été fixés à 200.000 pour cette année. Le maire de la capitale souhaite inciter des Russes de province, de petites villes, voir de l’étranger à occuper les postes « vacants ». Pour ce faire, la mairie de Moscou devrait investir 1,2 milliards de roubles (un peu moins de 35 millions d’euros).


La Russie semble aussi se diriger vers une immigration « choisie » et de « qualité » en cherchant à faciliter les conditions d’immigrations des étrangers qualifiés.


Ces 15 millions de clandestins représenteraient 28% de tous les travailleurs de Russie, surtout concentrés pour les postes de moyenne et basse qualification.



De 2000 à 2007, le ratio entre travailleurs immigrés Réguliers et clandestins tend à s’améliorer :



car le nombre de travailleurs étrangers réguliers en Russie augmente considérablement :

Sur une estimation de 2006 de 7 millions d’étrangers :1/3 sont en règle, 50% ont le droit de séjour mais travaillent sans autorisations et 20% sont en totale irrégularité.



La projection de ratio de salaires ci-dessous illustre bien l’aspect économique de l’immigration, pour le même travail, un travailleur Ukrainien coûte 1/3 de moins qu’un Russe, un Moldave 2 fois moins, et un travailleur d’Asie centrale 3 fois moins. 


Conclusion


La Russie a comporte 142 millions d’habitants. Le gros de l’immigration de 1989 à 2005 a été composé de la population Russe ethnique de l’étranger, et de citoyens des minorités Russes. Depuis 2005, ces flots de Russes de l’étranger  se sont « taris » pour diverses raisons, et bien que ce réservoir de migrants potentiels avoisine les 12 ou 15 millions. Parmi ces raisons, on peut citer : une stabilisation des statuts de ces ressortissants dans leurs pays de résidence ou sans doute une amélioration économique de la situation de ces pays, et de leurs relations avec la Russie.


Depuis  2005, 2006, le gros de l’immigration est plutôt une immigration composée d’Ukrainiens, de ressortissants du Caucase mais également d’Asie centrale. Les deux dernières catégories étant probablement celles qui fournissent le « gros » de la main d’œuvre clandestine, surtout  l’Asie centrale, avec les Gaustarbeiters Tadjiks, Ouzbeks, Kirghizes …


Aujourd’hui, la Russie a une population officielle de 142 millions mais qui pourrait être en réalité plus proche de 150 millions,  avec l’immigration clandestine.





Toujours moins de mariages mixtes en Russie

Le nombre de mariages conclus entre ressortissants russes et étrangers sur le territoire russe est en baisse régulière ces trois dernières années, selon les données du ministère de la Justice citées lors d’une table ronde à la Douma lundi.

Si 68.499 mariages internationaux ont été enregistrés en Russie en 2007, leur nombre s’est élevé à 60.627 en 2008 et à 29.317 au cours de la première moitié de 2009.

D’après les données ministérielles, les Russes préfèrent épouser des habitants d’ex-républiques soviétiques, dont l’Ukraine (18.984 mariages en 2007, 16.143 en 2008 et 7.298 au cours du premier semestre de 2009) et l’Arménie (9.452 en 2007, 8.851 en 2008 et 4.144 au cours des six premiers mois de l’année).

Le Tadjikistan, l’Azerbaïdjan, l’Ouzbékistan, la Moldavie, la Biélorussie, le Kazakhstan, la Géorgie et le Kirghizstan font partie du Top 10 des pays dont les ressortissants s’unissent dans les liens du mariage avec des Russes.

Côté Europe, ce sont les Allemands, les Britanniques, les Lituaniens, les Italiens et les Français qui viennent le plus souvent se marier en Russie.
Les ressortissants turcs, israéliens, américains et chinois officialisent souvent leurs relations avec des Russes.