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Alors que la Russie se prépare à des élections législatives en décembre prochain, puis à une élection présidentielle en mars 2012, la question qui hante les commentateurs et observateurs politiques est toujours sans réponse : Qui sera candidat à la présidentielle, Dimitri Medvedev ou Vladimir Poutine? Le suspense est plus fort que jamais. Ci et là des personnalités russes ont parfois déjà exprimé leur préférence pour l’un ou l’autre des candidats, sans que toutefois n’émerge de ligne de fracture vraiment visible dans l’opinion, hormis pour quelques analystes soit zélés, soit extra-lucides. Pour autant, certains commentateurs ont déjà appelé à ce que les deux hommes forts du régime
s’affrontent, ce qui serait la preuve d’une réelle pluralité de la scène politique russe.
Lors d’une interview donnée récemment au journal français le courrier de Russie, Maxime Mishenko, député de Russie Unie, rappelait lui l’importance des élections législatives qui: « définissent les présidentielles et c’est une des spécificités russes. Si le parti au pouvoir remportait ces élections, alors les élections présidentielles vont être très calmes (…) Bien sûr, les deux leaders Medvedev et Poutine vont se mettre d’accord au préalable sur la personne qui va poser sa candidature: ils ont une force politique commune qu’ils doivent mettre au service des ces élections ». Officiellement donc, et cela avait été confirmé par le président Medvedev, Russie Unie devrait présenter un candidat pour le prochain mandat de président qui , c’est une première, durera 6 ans (2012 – 2018) contre 4 auparavant. Les deux hommes forts du régime n’ont en effet pas exclu leur participation à l’élection présidentielle et ils ont jusqu’à présent toujours affirmé que la décision serait prise conjointement, et ce dans le but de proposer un seul candidat de Russie Unie à la présidence.
Quoi qu’il en soit, malgré les affirmations pessimistes de nombre de commentateurs sur l’effritement du soutien populaire à Russie unie et au tandem Medvedev – Poutine, en cet été 2012 les dirigeants russes actuels ont raison de croire en leur victoire commune aux prochaines élections législatives de cette fin d’année. Le centre de sondages Wciom a en effet
récemment interrogé 1600 personnes dans près de 138 communes afin d’évaluer les intentions de vote. Qu’en ressort t-il ? Que le parti Russie Unie devrait recueillir 58% des voix (contre 64% aux législatives de 2007), le parti Communiste (KPRF) est crédité de 14 ,7% (contre 11,7% aux législatives de 2007) et le parti nationaliste libéral-démocrate (LDPR) de 9,8% (contre 8,14% aux législatives de 2007). Le parti de centre gauche Russie Juste est lui crédité de 7,3% (contre 7,74% aux législatives de 2007) et enfin l’opposition libérale est-elle créditée de 2,8% (contre 1,59% aux législatives de 2007). A noter un nouveau venu dans la politique russe, le parti Cause Juste de l’oligarque
Michael Prokhorov, que l’on peut qualifier de national-libéral, et crédité cependant de seulement 4,1% des voix, alors que ce parti récent a été
considéré comme un potentiel futur contrepoids à Russie Unie.
Ces deux échéances électorales sont très importantes car elles devraient permettre de choisir les leaders qui dirigeront la Russie jusqu’à quasiment 2020. Si Vladimir Poutine, âgé de 59 ans en 2012 n’était pas candidat, il semble peu probable qu’il puisse revenir à ce poste après 2018, alors qu’il est évident que la carrière de Dimitri Medvedev, seulement âgé de 47 ans en 2012, est par contre loin d’être terminée quoi qu’il arrive. Celui-ci avait du reste récemment affirmé qu’il se voyait bien un jour
diriger un parti politique. Etait-ce une boutade, suite à l’affirmation de la direction du parti dominant (Russie unie) qui a dit
préférer une candidature de Vladimir Poutine en 2012? Ou alors un énième message destiné à brouiller les cartes ? Dimitri Medvedev est cependant pour l’instant le seul des deux candidats à avoir déclaré qu’il fallait
s’attendre à ce qu’il se représente en 2012. En 2007, Vladimir Poutine alors président avait attendu le mois de décembre pour désigner son successeur et candidat à la présidentielle de mars 2008, Dimitri Medvedev. Par conséquent tout est encore possible, mais le choix de Russie Unie est visiblement de garder la décision secrète le plus longtemps possible, pour des raisons tactiques évidentes. Cette méthode empêche pour le moment les autres partis politiques de développer des arguments contre Russie Unie. Le premier ministre Vladimir Poutine, jouissant d’une côte de popularité intacte dans le pays, aurait sans doute toutes les chances d’être élu, quel que soit son adversaire. Il semble donc que la clef du résultat de l’élection de 2012 dépende en très grande partie de lui, ce qui n’est pas une surprise pour
les lecteurs de Ria Novosti.
L’humour s’est introduit dans la campagne électorale en cours. Vladimir Poutine bénéficie d’un nouveau soutien de poids, puisque récemment une ligue de jeunes filles s’est constituée pour encourager l’homme fort de la Russie. Dans un
clip déjà visionné 1,5 millions de fois, une russe du nom de Diana explique qu’elle est prête à tout déchirer pour Poutine, y compris ses vêtements. Ces derniers jours des actions de ces jeunes filles ont eu lieu à Moscou, pour le plus grand plaisir des moscovites. Place Pouskinskaia tout d’abord, quelques dizaines de militantes
se sont rassemblées, mais également dans le
sud ouest de la ville et elles ont organisé des nettoyages gratuits de voitures pour monter leur soutien au premier ministre mais également à l’industrie automobile russe. Contrairement aux
affirmations de certains, qui ont vu dans ces actions un témoignage du culte de la personnalité qui se créé autour de Poutine, ou encore comparé ces jeunes filles a la variante russe des amazones de Kadhafi, le premier ministre n’est pas le seul concerné par ces témoignages affectueux des jeunes russes. Au début du mois des activistes féminines avaient déjà organisé une action “embrasse le président Medvedev” et s’étaient rassemblées sur la place rouge pour
embrasser une effigie du président Medvedev. Cette action avait lieu pendant la journée du baiser en Russie.
Ces manifestations politico-érotiques de groupes féminins ne sont pas du reste propres à la Russie. En Ukraine le mouvement nationaliste et traditionaliste
Femen organise souvent des actions coup de poing de protestation en petite tenue (voir
ici ou
la). Les militantes de Femen ont du reste publiquement affirmé leur soutien aux activistes féminines moscovites en organisant une manifestation de soutien en Ukraine, seins à l’air. Elles ont aussi décidé de fonder un parti politique féminin en 2012. Et si ces jeunes femmes Slaves préparaient une révolution dans la manière de faire de la politique?