La nouvelle est tombée telle une météorite informative sur la planète France. C’est le site Médiapart, sans doute l’un des derniers outils d’investigation de France, qui a « lâché » le morceau en se servant des dernières révélations de la galaxie Wikileaks, galaxie dont les tréfonds sont visiblement loin d’avoir été explorés.
Ce manque de confiance des « alliés » américains est sans aucun doute lié aux très faibles manifestations d’indépendance de la politique internationale française, que l’on pense à l’Irak, à la politique à l’égard de la Russie ou aux risques (pour les Américains) qu’un tandem européen emmené par Paris et Berlin ne finisse par émerger du chaos et de la zizanie que Washington n’en finit pas de semer sur le flan oriental de l’Europe, c’est-à-dire aux frontières russes.
Sans surprise, ce scandale des écoutes ne concerne pas que la France. Il y a près de deux ans, c’est l’Allemagne qui apprenait avec « surprise » que le téléphone d’Angela Merkel figurait sur la liste des numéros sous surveillance des services de renseignement américains, alors qu’elle n’était pas encore chancelière.Sur le fond comme sur la forme, les affaires françaises et allemandes se ressemblent étonnamment, puisqu’à Berlin, les écoutes étaient pilotées depuis l’ambassade américaine, qui se situe en face de la porte de Brandebourg, à 850 mètres de la Chancellerie et du Bundestag. En France, on apprend ce jour que c’est derrière une immense bâche sur laquelle sont peintes des fenêtres en trompe-l’œil située au dernier étage du bâtiment de l’ambassade, qui donne sur la place de la Concorde, dans le 8e arrondissement de Paris, que ce centre d’écoutes est dissimulé depuis 2004. Pourquoi se gêner?
Paris et Berlin ne sont pas les seuls concernés, puisque ce seraient plus de 80 sites de ce type qui existeraient dans le monde dont 19 pays d’Europe, confirmant la prise de contrôle et la mise sur écoute totales du continent, écoutes qui ont commencé dès l’après-guerre, notamment avec le déploiement du fameux réseau échelon qui permettait au monde anglo-saxon d’épier l’Europe.
Ces derniers mois, la presse française n’a cessé de hurler aux « espions russes », dont l’activité serait soi-disant en forte augmentation sur notre territoire, bien qu’à ce jour aucun scandale n’ait vu le jour. Pendant que les journalistes traquaient d’hypothétiques agents russes, les « amis » américains préparaient la mise en place d’une zone de libre-échange transatlantique (TAFTA), non sans avoir pris, en en amont, le contrôle de l’information et mis sous écoutes les dirigeants européens, c’est-à-dire leurs futurs partenaires.Une traduction on ne peut plus limpide de l’objectif qui est le leur: mettre en place une Otan économique dans laquelle les Européens n’auront pas leur mot à dire et destinée à surtout empêcher toute alliance politique et économique avec la Russie, obsession de Washington.
En effet l’alliance entre l’Europe et la Russie permettrait l’apparition de deux trajectoires stratégiques novatrices qui bouleverseraient l’équilibre mondial:
1/ Elle permettait à l’Europe d’avoir accès à l’Eurasie et, en scellant un partenariat pacifique avec la Russie, rendrait caduque toute raison d’être de l’Otan, réduisant d’autant l’influence déstabilisatrice des Etats-Unis sur l’Europe.2/ Cette alliance permettrait aussi à la Russie et à la Chine d’étendre leur modèle alternatif sur le continent eurasiatique vers l’Europe, au cœur de la zone continentale, en accélérant la multipolarisation du monde.
Mais actuellement, l’heure à la déconvenue et à la gueule de bois au sommet de l’Etat français. Alors que le président Hollande a convoqué un conseil des ministres ce mercredi 24 juin pour évoquer ces écoutes, les Français sont eux de plus en plus confrontés à la Réalité avec une grand R: nos « élites » politiques de droite comme de gauche ne sont pas souveraines, et l’intégration au sein du TAFTA devrait considérablement accentuer cette dynamique.