Lorsque l’on parle de l’Ukraine, on a souvent tendance à aborder sa situation économique catastrophique, en négligeant d’aborder l’état démographique du pays.
Ukraine et France avaient respectivement 41,5 et 41,3 millions d’habitants en 1939, soit juste avant le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, pour un territoire d’une superficie quasi-équivalente. Apres la Seconde Guerre mondiale la population de la France est passée à 39.660.000 habitants tandis que celle de l’Ukraine, qui a terriblement souffert du conflit s’est réduite de près de 7,5 millions d’habitants, pour atteindre un peu plus de 34 millions d’habitants.
Au cours de sa période soviétique, la population de l’Ukraine augmentera de près de 18 millions de personne en 46 ans, soit une hausse moyenne de 319.000 habitants/an, pour arriver à presque 52 millions d’habitants en 1991.Ensuite, pendant la période d’indépendance qui a débuté en 1991, l’évolution démographique est devenue catastrophique et l’Ukraine est entrée dans un long hiver démographique dont elle n’est pas encore sortie, contrairement à la Russie qui a réagi après 2005. De 1991 à 2013, soit en 22 ans, la population du pays est passée de 51.944.000 à 45.553.000 habitants soit une baisse totale de 6.391.000 habitants, ce qui correspond à une baisse moyenne annuelle de 290.500 habitants.
Cette baisse a été particulièrement prononcée entre 1996 et 2005, puisqu’en une décennie la population a chuté de 3.425.108 habitants, soit à une moyenne annuelle de 342.510 habitants. Si l’on devait comparer avec la Russie, qui a une population environ trois fois plus importante, cela correspondrait à une baisse annuelle de plus d’un million d’habitants.
A partir de 2005, tandis que la population de Russie tendait à évoluer vers un retour à l’équilibre naturel (atteint en 2012), la population d’Ukraine continuait, elle, à diminuer, passant de 47.280.800 d’habitants à 42,9 millions d’habitants au 01/04/2015 selon le bureau des statistiques de l’état ukrainien. Ceci représente une baisse de population de près de 10 millions (20% de la population du pays) entre 1991 et 2015.Un tableau comparatif fort parlant (base 100 en 1992) des évolutions démographiques des deux pays sur la cette période est consultable ici. Bien sûr, il ne faut pas oublier qu’en 2014, le pays a perdu deux millions d’habitants puisque la Crimée est redevenue russe, tandis que près d’un million de réfugiés ont fui les conflits pour se réfugier en Russie.
Le nombre de naissances que l’Ukraine constate diminue également, il est passé de 520.700 naissances en 2012 à 503.700 en 2013 et 465.900 en 2014. L’année 2015 ne devrait pas apporter d’amélioration au tableau, bien au contraire, puisque sur les 18 derniers mois la population du pays (solde naturel sans tenir compte de la Crimée et des réfugiés) a baissé de 250.000 habitants. Soit une diminution d’une ampleur que la Russie n’a connue que durant la dernière décennie du XXe siècle.
Sur les deux premiers mois de 2015, le nombre de naissances connaît un effondrement par rapport aux deux premiers mois de 2014, 67.249 contre 63.545, soit 3.704 naissances de moins. Durant la même période le nombre de décès a lui augmenté de 93.890 à 96.647 soit 2.757 décès de plus.La baisse de population, qui était de 26.641 personnes pour les deux premiers mois de 2014, est donc de 33.102 personnes pour les deux premiers mois de 2015, soit en augmentation de 25%.
Toutes ces statistiques n’incluent pas les zones dans lesquelles se déroulent l’opération « anti-terroriste » de Kiev sans quoi il est évident que les chiffres seraient encore plus dramatiques.
La situation est donc mauvaise sur le plan démographique, et les prochains mois devraient voir un effondrement accentué des naissances, car il est évident que la situation économique et sociale s’est fortement dégradée depuis le deuxième semestre 2014, ce qui a toujours un effet néfaste sur la natalité. Le pire est donc malheureusement sans doute à venir alors que l’on se dirige vraisemblablement tout droit vers l’effondrement économique de l’entité territoriale qui s’appelle aujourd’hui Ukraine.L’Ukraine de 2015, sur le plan démographique, ressemble de plus en plus à la Russie de 1999, alors en pleine crise économique et aux prises avec un conflit sur son territoire.
Il ne reste qu’à souhaiter que l’Ukraine puisse connaître à l’avenir un printemps démographique similaire à celui de la Russie au cours des quinze dernières années.
Mais il faudrait pour cela au préalable que les élites ukrainiennes actuelles retrouvent leurs esprits, et renouent avec le réalisme, comme c’est arrivé en Russie à la fin des années 90.