es dernières semaines ont vu une accélération de la bataille d’influence et de communication contre la Russie et qui se concentre actuellement bien évidemment autour des événements en Ukraine. Le Mainstream médiatique fait tout pour étouffer les aspects non lisses (non acceptables) de ces événements et montrer du doigt les responsabilités russes. Pourtant certaines réalités ne peuvent être occultées.
L’annexion russe en Crimée…
… n’en est en réalité pas une.
Les troupes russes étaient déployées en Ukraine en vertu d’un Traité de droit international signé entre deux Etats souverains ayant, il faut le rappeler, des pouvoirs politiques démocratiquement élus. Ce Traité, signé puis ratifié par la Russie et l’Ukraine en 1999, autorisait la flotte russe de la mer noire à stationner en Crimée jusqu’en 2017. En 2010 l’accord fut modifié, prolongeant la présence russe jusqu’en 2042.
Cette présence militaire et navale russe n’est évidemment pas gratuite pour Moscou : 15 milliards de dollars pour financer une partie de la dette ukrainienne, plus 10 milliards de rabais sur la dette de gaz de l’Etat ukrainien envers la Russie bien que cette dernière mesure vienne d’être supprimée.
Ce Traité autorise en outre la présence permanente de 25.000 soldats russes sur le territoire de Crimée, 132 véhicules militaires armés, 24 systèmes d’artillerie de calibres inferieurs à 100 mm et aussi de 22 avions de combats.
La Crimée est-elle russe?
Les premiers habitants connus de la Crimée, les Cimmériens, qui seront au VIIe siècle avant J.C. remplacé par les Scythes. La Crimée rentrera ensuite dans le monde grec et y restera jusqu’à la chute de Constantinople et la victoire de l’empire ottoman, qui transformera la péninsule en simple province ottomane au sein de laquelle les chrétiens sont minoritaires.
Ils le resteront jusqu’au XVIIIe siècle et la guerre russo-turque de 1668-1774 qui voit la reconquête de la péninsule par l’empire russe. Les Russes mettent alors en place une politique de christianisation via le repeuplement de chrétiens en Crimée: Russes bien sûr, mais aussi Allemands, Arméniens et Grecs. Cette nouvelle entité sera appelée « Nouvelle Russie » et les villes y prendront des noms grecs. En 1853, l’empire ottoman tentera de reprendre la Crimée (avec l’aide de la France, l’Angleterre et le royaume de Sardaigne) mais cette coalition échouera face à la détermination russe.
La Crimée se révélera un des bastions de l’armée blanche russe lors du déclenchement de la révolution de 1917 mais la victoire des bolcheviks transformera la Crimée en République socialiste soviétique autonome de Crimée, « offerte » en 1954 à l’Ukraine par Nikita Khrouchtchev, alors dirigeant de l’URSS et … d’origine ukrainienne.
A la chute de l’URSS, la Crimée deviendra une pomme de discorde entre la Russie et l’Ukraine, aboutissant aux événements de ces dernières semaines.
De 1774 à 2014, la Crimée n’aura donc pas dépendue de Moscou seulement durant 60 ans.
Le référendum n’est pas inconstitutionnel malgré la présence de groupes armés.
Il l’est d’autant plus que l’Ukraine n’a plus de pouvoir depuis le départ forcé du président élu Viktor Ianoukovitch. L’ordre constitutionnel ukrainien n’existant donc plus, il semble difficile d’y faire respecter quelque Constitution que ce soit.
En outre si la présence de groupes armés n’est pas un problème pour organiser des élections, que ce soit au Kosovo, en Irak, en Libye ou en Afghanistan, pourquoi pas en Crimée dans ce cas ?
D’autre part il semble difficile d’imaginer à ce jour que le referendum n’ait pas simplement accompagné une volonté populaire sincère, alors que 96,77% des votants se sont dits favorables au rattachement à la Russie, avec une participation officielle de 86%. Peut-on reprocher aux élites russes de souhaiter écouter le souhait de la population russe de Crimée et ne pas faire comme les élites françaises qui n’ont su/pu écouter le peuple lors du référendum de mai 2005 ?
Le pouvoir de transition ukrainien : libéraux en haut et bandes armées en bas ?
Alors que la situation économique en Ukraine se dégrade, seule l’extrême droite locale a le vent en poupe. Décomposées en deux fractions principales, Svoboda et Praviy Sektor, le bloc ultranationaliste a toute légitimité à revendiquer le « printemps Maïdan » car ce sont ces quelques 20.000 militants qui ont perpétré le coup de force ayant permis le renversement du pouvoir ukrainien. Ces ultranationalistes ont également réussi le coup de force politique en plaçant nombre des leurs au sein de la nouvelle structure de gouvernance du pays et en attente des élections de fin mai auxquelles ils souhaitent participer.
La rue ukrainienne est désormais sous le contrôle de ces groupes armés qui font régner leur loi et la terreur au sein des corporations d’Etats (télévision, justice…) mais aussi au sein des sociétés présentes en Russie via du racket sur les compagnies locales de taxi, les restaurants et de plus en plus souvent les sociétés étrangères ou leurs actifs en Ukraine. Pour beaucoup d’observateurs Kiev se transformerait actuellement en une sorte de Chicago slave.
Alors que les partis plus centristes et europhiles (UDAR et Patrie) voient eux aussi leurs candidats respectifs, Vitali Klitchko et Ioulia Timochenko, souhaiter se présenter aux élections. On peut se demander ce qui devrait se passer désormais et comment le nouveau pouvoir pourra faire cesser l’existence de ces bandes armées dont le seul moyen d’existence politique est désormais d’aller au bout de leur combat pour l’établissement d’une authentique ethnocratie en Ukraine, selon les mots du professeur Motyl.
D’un Euromaïdan plutôt nationaliste et europhile, va-t-on passer à un Altermaïdan mafieux et radical, qui pourrait se dresser contre les futures et plausibles nouvelles élites europhiles du pays ?