Source : Eurasia Info
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Après que l’Iran ait déclaré son opposition, sur des « bases écologiques », à la construction de pipelines sous la Caspienne et qu’elle bloquerait toute délimitation des fonds marins le permettant ainsi que la décision de Bakou de ne pas soutenir le projet NABUCCO de pipeline favorisé par l’Ouest, Moscou peut se prévaloir de sa première victoire politique importante après la guerre de Georgie.
La signification de ces actions c’est que le gouvernement russe aura maintenant le contrôle entier et incontesté sur les pipelines entre le bassin de la Caspienne et l’Ouest passant à travers le territoire russe et pourra perturber, soit directement soit via ses proxys comme le PKK, les seuls corridors comme celui de Bakou-Tbilisi-Ceyhan qui contourne la Fédération de Russie. Bien sûr cela ne veut pas dire que Moscou ait effectivement rétabli son contrôle sur les états de cette région – tous ont d’autres intérêts en dehors du pétrole et du gaz – mais cela veut dire que la Russie a gagné une victoire importante et que l’Ouest, qui trop souvent ces dernières années s’est concentré exclusivement sur le pétrole et le gaz, a souffert d’une importante défaite.
Hier, Mehti Safar, le vice ministre des affaires étrangères d’Iran, a dit aux journalistes que Téhéran s’oppose à la construction de tout pipeline sous la mer dans la Caspienne parce que « cela peut endommager le système écologique sous marin ». Il a noté que les pays exportateurs peuvent transporter leur gaz soit via la Fédération de Russie soit via l’Iran. Compte tenu de l’existence de telles possibilités, le diplomate iranien a dit : « pourquoi endommager » le délicat éco système de la Caspienne ? Mais en faisant cette déclaration, Téhéran soulignait sa volonté de détruire toute chance de réalisation du pipeline de gaz NABUCCO à court terme, projet auquel sont favorables les Etats Unis et certains pays d’Europe de l’Ouest.
Et parce que Washington s’oppose à la livraison d’hydrocarbures du Bassin de la Caspienne via l’Iran, l’action de Téhéran rend maintenant possible le choix des pays exportateurs de pétrole et de gaz du transport à travers la Fédération de Russie, un but géopolitique de longue date de Moscou.
Les changements géoéconomiques et géopolitiques dans le Caucase, résultant des actions russes en Georgie (réponse à la guerre contre le peuple d’Ossétie du Sud déclenchée par le président georgien Saakashvili soutenu par Washington ndlt), ont paru encore plus évidents lors de la brève visite du Vice Président US Dick Cheney dans la capitale d’Azerbaïdjan. Selon ce qui a été rapporté dans les médias russes, cela ne s’est pas très bien passé à la fois sur le plan protocolaire et dans sous l’angle d’une perspective positive. D’abord, ni le Président Ilham Aliyaev, ni le Premier Ministre Artut Rasi-zade, n’ont accueilli Cheney à l’aéroport. A la place, c’est le Vice premier et le ministre des Affaires étrangères qui l’ont accueilli. Après cela, il n’a pas été immédiatement reçu par le Président mais, en attendant, a rencontré des responsables de BP –Azerbaïdjan et de l’ambassade américaine. Puis, selon les dires de responsables du bureau du Président d’Azerbaïdjan au journal de Moscou Kommersant, Cheney a été suffisamment déçu de sa conversation avec le Président Aliyev que « résultat, il a même refusé de participer au dîner protocolaire organisé en son honneur » par le dirigeant d’Azerbaïdjan.
D’une part, Aliyev a fait comprendre qu’il n’était pas prêt à donner son aval à un démarrage du projet du NABUCCO tant que Bakou n’avait pas complété ses négociations avec le Russe Gazprom, ou à faire effectivement autre chose pour « soutenir Washington et (par conséquent) se confronter à Moscou » étant donné ce qui s’était passé en Georgie . Et d’autre part, immédiatement après la rencontre Aliyev Cheney, le Président russe Dmitri Medvedev a téléphoné au Président d’Azerbaïdjan. Ce qui a été l’occasion pour Medvedev , selon ce qu’ont révélé au journal des sources au Kremlin, d’expliquer les politiques de la Russie et de discuter des possibilités pour les présidents de Russie et d’Azerbaïdjan de se rencontrer dans un futur proche.
Bien sûr, tout ceci reflète à un certain niveau la continuité de l’engagement du Président Aliyev dans ce que lui et son gouvernement appelle « une politique étrangère équilibrée », qui cherche à naviguer entre Moscou et l’Ouest en évitant d’offenser quiconque, et en essayant de développer des liens forts avec les deux.
D’un autre côté, la façon dont les médias ont couvert la visite du Vice Président Cheney suggère que, si la politique de Bakou reste équilibrée, la balance n’est plus la même et que les règles du jeu ont changé depuis la guerre de Georgie et la reconnaissance par Moscou de l’indépendance de l’Ossétie du Sud et de l’Abkazie.
Effectivement, en rapportant cette visite, l’un des journaux de Bakou a utilisé comme titre de sa Une des mots qui montrent à quel point les choses ont changé ce dernier mois.
Ce n’est pas par hasard, a fait remarquer le journal, que juste après le départ du Vice Président américain du bureau d’Aliyev, le Président russe a appelé.
Source : www.planetenonviolence.org