Du Kosovo à la Mexicalifornie, prospective et science-fiction

« Fédération américaine ». Territoire Sud. Frontière mexicaine. Alentours de 2030.
An 2 de l’Etat de Mexicalifornie.

Le monde ancien n’est plus, l’Ouest a vécu. En 2020, l’humanité est dominée par l’Asie. Une nouvelle guerre froide oppose Chine et Amérique. L’OCS (Organisation de la coopération de Shanghai), s’est substituée à l’Otan qui a disparu en 2014, après la guerre du Caucase, durant laquelle ses deux principales armées (Amérique et Turquie) se sont affrontées militairement, sans vainqueur réel. Une coalition sino-russe sous mandat de l’OCS a fait cesser les hostilités.

L’Amérique est isolée avec le Canada, l’Europe de l’Ouest et l’Australie au sein des ruines de l’Otan qui a pris le nom d’OEO (Organisation des Etats occidentaux).

Ainsi est le monde de 2020. Bipolaire. Dominé par la Chine (avec ses 4 milliards d’habitants) qui dispose de bases militaires sur tout le continent eurasiatique, de Shanghai à Budapest.

Au cours des années 2010 à 2020, la crise économique mondiale a affaibli l’Amérique. Celle-ci s’est ruinée en de nombreux conflits (Irak, Syrie, Egypte, Liban, Caucase…). Les deux mandats du républicain McCain (2008 à 2016) ont été les derniers. A sa mort en 2014 (pendant la guerre du Caucase), l’Amérique a cessé d’être une démocratie pour devenir une « théocratie militaire », sous contrôle du Pentagone et du « Centre évangélique Impérial ».

Une théocratie ruinée. Seule la Californie, région quasi autonome, riche, concentre les organes culturels, politiques, militaires et économiques lui permettant de maîtriser les « autres Etats fédérés », appauvris et en révolte permanente.

Dans cette bataille pour le « Outland », les Chinois, qui désirent affaiblir l’Amérique (dernier pôle de résistance à l’OCS) ont bien compris l’intérêt que représente la Californie pour eux. En la « coupant » du reste de l’Amérique, c’en serait fini de l’Oncle Sam et de l’OEO. L’extension à l’Ouest ne rencontrerait alors plus aucun concurrent sérieux. Le « sea-power » prôné par les théoriciens anglo-saxons durant le XXe siècle, avant les grandes guerres, sera le leur.

La Californie est à l’Amérique ce que le Kosovo était à la Serbie en 2008, un cœur, plus économique que spirituel, mais un cœur, c’est-à-dire quelque chose de vital.

L’impossibilité (technique et morale) d’un affrontement direct avec l’Amérique va faire germer une idée dans l’esprit des stratèges chinois : déclencher une guérilla indépendantiste dans le Sud américain, pousser l’Etat américain à intervenir pour ainsi justifier une intervention militaire de l’OCS. Avec la crise économique, la Californie est restée comme l’eldorado pour des dizaines de millions d’Hispaniques bien sûr, mais aussi de Centro-Américains. La frontière Sud-Est des Etats-Unis est devenue une vraie passoire, sans contrôle sérieux. En moins de cinq ans, la population mexicaine des trois Etats que sont la Californie, l’Arizona et le Nouveau-Mexique a doublé. En 2022, la Californie a une population de 90 millions d’habitants, elle est devenue une gigantesque conurbation. Elle produit à elle seule 45 % du PIB américain et les Hispaniques représentent 75 % de sa population.

C’est une bombe à retardement que le gouvernement chinois va s’empresser de déclencher. Les Chinois vont financer et former des mouvements indépendantistes mexicains, politiquement, culturellement, mais aussi militairement, de façon plus discrète. L’agit-prop se transforme rapidement en agitation « terroriste », un mouvement indépendantiste va rapidement se créer, l’armée de libération de Mexicalifornie (ALM). Ce mouvement va cumuler entre 2020 et 2025 deux types d’actions bien distinctes, mais liées : former grâce à l’aide chinoise un grand nombre de « soldats politiques » et les faire rentrer en Californie. L’armée se finance aussi par le trafic de drogues (axe Colombie-Guatémala-Californie) et le trafic de femmes, principalement des Mexicaines prostituées en Californie où le gap entre homme et femme est très élevé (estimé en 2020 à cinq hommes pour une femme).

Rapidement, l’Etat de Californie commence à prendre conscience de ce qui se trame sur son territoire. La branche régio-étatique du congrès lance une opération « mains propres » de grande envergure, destinée à nettoyer cette nouvelle mafia. Des incidents armés éclatent. L’OEO diffuse sur son canal la version de faits qui sera démentie par l’OCS. D’influents lobbyistes chinois expliqueront que les Américains de souche chassent et déciment des milliers de clandestins mexicains pour tenter de renverser le rapport de force démographique. Des images circuleront en boucle et la communauté internationale sera bouleversée. De gigantesques manifestations ont lieu dans tous les pays contre le fascisme américain et le « pogrom » en cours de la pauvre minorité mexicaine.

On entendra que la Californie était mexicaine depuis toujours et que ce n’est que depuis 1847 que les Américains ont volé cette terre à leurs propriétaires. On « ré-apprendra » que les racines des Mexicains remontent aux Olmèques, 1 300 ans avant le Christ, soit à peu près à la même époque où, en Europe, les Illyriens s’installaient dans l’actuelle Albanie.

En 2026, la Californie étant soumise à des troubles massifs, la communauté mexi-hispanique élit son propre corps politique. Un journal mexicain demandera l’indépendance de la Mexicalifornie. Le président de la Fédération hexagonale (l’ancienne France) de l’époque, Necmettin Toparu (un gagaouze nommé par les 19 cultes religieux de l’Hexagone) affirmera : « L’indépendance du Mexicalifornie est inéluctable ! Les Mexicains et les Américains de souche ne veulent plus vivre ensemble, c’est comme ça et c’est tout. La Californie n’existe plus, de même que l’Union soviétique ! »

Ce fut cette même semaine que la Chine intervint militairement en Californie. Au début de l’automne 2026. Une campagne militaire « courte, ciblée et humanitaire » selon le gouvernement chinois et l’état-major de l’OCS. Les bombardements ne devaient durer que trois jours, selon le haut commandement de l’OCS, ils se prolongèrent en fait soixante-dix-huit jours.

Ce fut la fin de l’Amérique. La « Californie » fut occupée par une troupe de paix de l’OCS, sino-indienne. Les Américains de souche et de nombreuses minorités furent contraints d’abandonner leur territoire et de migrer au Nord, vers la frontière avec l’Oregon, victimes de pogroms d’une intensité et d’une violence considérable.
Au début de l’année 2027, l’Amérique n’existait plus. Contre la volonté de la grande majorité des Américains de souche, mais également des minorités non mexicaines, début 2028, les premières élections eurent lieu, marquées par des faits-divers étranges, elles consacrèrent le chef charismatique de l’ALM, qui prit le titre de procureur de la région. Lorsque le premier recensement de population eut lieu le 1er janvier 2029, les non-Mexicains ne représentaient plus que 12 % de la population, coincés dans le nord d’un Etat dont la langue officielle, la seule tolérée est devenue l’espagnol.

En 2030, on apprit que le « procureur » fraîchement élu était mêlé à un gigantesque trafic d’organes humains vers l’Amérique centrale, mais l’enquête fut close rapidement par la Cour chinoise de justice globale,

Fin des données…

 Cette fable n’est en aucun cas le fruit d’une quelconque animosité de l’auteur à l’égard de la communauté mexicaine ou de la Chine, bien au contraire, le Mexique étant à ce jour un des nombreux États à ne pas avoir reconnu l’indépendance du Kosovo et la Chine à s’y être opposée.

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