L’article original a été publie sur Ria Novosti.
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Vers un monde incertain
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L’agence a publié les impressions personnelles des commentateurs de RIA-Novosti et je tenais à apporter ma modeste contribution à ce sujet.
Que penser de l’année qui s’achève et de celle qui commence? Les présidents des deux pays qui me tiennent le plus à cœur, à savoir la Russie et la France, ont eu des mots finalement assez identiques lors de leurs discours de fin d’année, qualifiant 2011 d’année très difficile.
Le monde d’avant la crise nous parait aujourd’hui bien lointain mais la similitude de tonalité des discours présidentiels de fin d’année ne doit pas masquer le fait que les situations en France et en Russie sont sensiblement différentes.
économiques. La question est de savoir si cette transition pourra être pacifique. L’avenir qui se dessine semble bien incertain.
Réflexions sur les manifestations en Russie
Vladimir Poutine. Aleksei Koudrine a d’ailleurs pris la parole, ajoutant à la cacophonie ambiante et déclenchant un record de sifflements du public. Pour la première fois un député d’opposition très connu a mis le doigt sur cette désunion systémique de la soi disant opposition, en quittant la manifestation avant même de prendre la parole. Même son de cloche pour l’analyste politique Vitali Ivanov, pour qui l’opposition à Vladimir Poutine est une nébuleuse qui mène des conversations de
cuisine.
Ziouganov. Un choix cornélien pour les occidentaux, mais qui refléterait parfaitement la tendance électorale initiée par les dernières élections législatives russes qui ont vu les partis de gauche augmenter fortement leur poids électoral.
Jean Radvanyi répond aux questions de RIA-Novosti
Jean Radvanyi est spécialiste du Caucase et de la géographie régionale. Il est à ce titre professeur de géographie et de géopolitique de la Russie et l’ex-URSS à l’Inalco à Paris. Auteur de plusieurs ouvrages, il dirige à Moscou le centre franco-russe de recherche en sciences humaines et sociales de Moscou, qui vient de fêter ses 10 ans.
Bien sur, la Russie a une partie de son territoire en Asie et par ce biais il y a d’autres influences qui interviennent, mais on peut dire ça pour d’autres pays européens, après tout l’histoire française c’est aussi les colonies africaines, l’outre-mer et donc bien sûr un seul facteur (historique, religieux) ne suffit pas, il faut voir dans son ensemble.
Vous êtes professeur de géographie de la Russie à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco). La géographie est souvent citée comme le facteur d’appartenance russe a l’Asie. On connaît la phrase de De-Gaulle sur l’Europe de l’atlantique a l’Oural, or la Russie s’étend jusqu’au pacifique. Dimitri de Kochko par exemple dit : “Pour moi l’Oural n’est pas la frontière de l’Europe mais le centre de l’Europe de demain!”. Quelle est votre opinion à ce sujet? Cette frontière est-elle selon vous purement sémantique ou symbolique?
Je pense que la frontière est symbolique. L’Europe est un continent qui est mal défini et en particulier ujourd’hui du point de vue de la géographie cela dépend de quel niveau on se place. La géographie classique a une définition assez simple de l’Europe, qui tient au relief, critère souvent retenu pour les grandes entités géographiques. A ce moment la l’Europe s’arrête à l’Oural d’une part et aux chaînes principales du Caucase d’autre part. De ce point de vue classique, le sud-Caucase et les espaces russes au delà de l’Oural sont donc en Asie.
Cela créé quelques problèmes, car une partie de la Géorgie et de l’Azerbaïdjan sont sur le versant nord du Caucase et donc sont des territoires européens. Même chose pour le Kazakhstan dont une partie du territoire est à l’ouest du fleuve Oural et fait donc partie de l’Europe selon cette définition géographique classique. Par ailleurs il y a eu beaucoup de débat entre les géographes russes et plusieurs définitions données (reprises dans notre atlas du Caucase paru chez Autrement en 2010). Certains ont dit que la limite du Caucase, et donc de l’Europe, passait non pas par la chaîne principale, mais par le Kouban et le Terek. D’autres à l’inverse on dit que les limites sud du Caucase étaient situées au sud de la dépression Koura/Araxe, c’est-à-dire intégrant dans la partie européenne l’ensemble de la Géorgie et l’Azerbaïdjan, mais avec un point d’interrogation sur l’Arménie qui serait en partie européenne et aussi en partie asiatique.
Aujourd’hui on pense moins au relief, mais le problème n’est pas plus simple. L’Union Européenne met de temps en temps les Etats du sud Caucase dans l’Europe (politique de voisinage, partenariat oriental..) mais cela ne semble pas sur. Les cartes climatiques, les organisations internationales hésitent. En Russie par contre tout le monde s’accorde pour dire que la limite de l’Europe est l’Oural et que donc la Russie est bien à cheval sur deux continents. Elle fait partie de ces deux de la politique de voisinage, c’est la Russie qui a refusé. De ce point de vue géopolitique, les critères de définitions sont un peu différent et la Russie fait donc indéniablement partie de l’espace européen mais aussi asiatique.
Je sais que vous avez beaucoup voyagé en Russie. Récemment je suis allé à Perm, dans l’Oural justement, pour les Permiens, Perm est une ville Européenne.
Pour croiser la géographie, l’administratif et la culture, la ville prétend au statut de capitale européenne de la culture. Les Permiens se sentent très européens, j’ai même entendu la bas que “l’Europe va de l’Oural à l’atlantique”! j’ai pu constater qu’un habitant à Perm se sent tout autant européen qu’un habitant de Valence ou Sibiu? Est-ce que cela vous surprend?
route et donc on a voulu créer un autre monument. Or avec l’extension des limites administratives de la ville, la ville a inclu ce nouveau monument dans son territoire. Cela permettait aux gens d’Ekaterinbourg (la ville étant quand même franchement située sur le coté est de l’Oural) de prétendre (via cette extension administrative et ce jeu sur l’emplacement du monument) faire partie de l’Europe. D’un point de vue de géographe, ce jeu est très intéressant et je le cite en exemple à mes étudiants comme l’illustration d’une relative fascination des Russes à l’égard du mythe de l’Europe.
Avez-vous quelque chose à rajouter?
Réflexion sur la révolution des neiges en Russie
Les qualifications excessives et souvent obsessionnellement dirigées contre la figure du premier ministre sont certes en adéquation totale avec quelques slogans que j’ai pu entendre lors de cette manifestation mais semblent bien loin de la réalité du terrain tout autant que de ce que pensent a ce jour la grande majorité des Russes. Cette fois-ci, le mainstream médiatique francophone n’a pas égalé le mainstream anglophone, dont une des principales chaînes de télévision a commenté les manifestations en Russie en utilisant des images d’émeutes en Grèce. On sait pourtant que les palmiers sont rares dans les rues de Moscou :), et que la police russe ne porte pas d’uniformes grecs. Tout commentaire est inutile, il suffit de regarder le reportage.
Reprenons depuis le début. Suite aux élections législatives du 4 décembre, des cas de fraudes électorales ont été mis en évidence. Pour autant une analyse sérieuse et non émotionnelle montre que des différences entre les sondages, les sondages d’après votes, les estimations et les résultats ne seraient palpables que dans le Caucase ou éventuellement à Moscou, comme je l’avais mentionné ici. Il a été rappelé que la structure traditionnelle et conservatrice tchétchène (rôle des teïps par exemple) peut être un facteur de vote difficile à comprendre. Les autres fraudes dénoncées concerneraient donc essentiellement Moscou ou le score de Russie Unie aurait été gonflé, comme l’a affirmé en cours de dépouillement un sondage de sortie des urnes publié par l’institut FOM et qui a mis le feu aux poudres. Très curieusement ce sondage n’est plus en ligne aujourd’hui sur leur site, mais il a été repris sur de nombreux blogs. Quoi de plus simple à manipuler qu’un sondage d’après vote par un institut? Les mouvements de protestations n’ont donc concerné essentiellement que Moscou et Saint-Petersbourg, qui ont rassemblé les ¾ des manifestants du pays.
La 6ème Douma?
Vers un nouveau mur de Berlin?
Le mouvement prométhéen?
L’article original a été publie sur Ria Novosti.
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Quel avenir pour les chemins de fer russes?
L’article original a été publie sur Ria Novosti.
Le réseau ferré russe est l’héritier de l’immense réseau ferré construit à l’époque de l’URSS. A l’époque, il s’agissait de relier les villes d’un territoire neuf fois plus vaste que l’Union européenne d’aujourd’hui. La taille continentale de la Russie fait que les voyages en train peuvent durer des jours et des nuits, comme c’est le cas pour le très fameux transsibérien qui met une semaine pour parcourir les 9.500 km du trajet. Notez que depuis peu vous pouvez visionner tout l’itinéraire sans quitter votre salon en cliquant ici). Peut être à cause de cette immensité et de la durée des voyages, l’organisation de la vie dans les trains russes est bien particulière. C’est une réalité banale pour les russes, mais presque une aventure pour les étrangers qui voyagent en Russie.
Un 4 novembre en Russie
L’article original a été publie sur Ria Novosti.