Gapzrom à la conquête de la planête !

Le Monde du 11 juin titrait que Gazprom envisageait de tout simplement devenir le premier groupe mondial, ce qui à l’évidence devient plus plausible chaque jour ! Alexeï Miller, qui toujours selon Le Monde “fuirait les médias comme la peste“, aurait annoncé lors d’une réunion d’hommes d’affaires que : “Gazprom était certaine de devenir la première société mondiale dans sept ou huit ans, et pas seulement dans l’énergie… En se déployant tous azimuts (Asie-Pacifique, Amérique du Nord) et en investissant dans le gaz naturel liquéfié, les pipelines, le pétrole, l’électricité, le trading des hydrocarbures, le marché du CO2…

Ainsi qu’en France, où il envisage d’être à terme l’opérateur de référence“.

Au milieu de la première décennie la capitalisation boursière du groupe atteindra 1 000 milliards de dollars (contre 343 milliards actuellement), a estimé M. Miller notamment car : “la rareté des hydrocarbures va pousser le prix du baril à 250 dollars et les réserves gazières de GAZPROM seraient aujourd’hui huit fois supérieures à celles d’ExxonMobil, la première major occidentale concurrente ». En outre GAZPROM devrait investir en 2008 30 milliards de dollars (dont la prospection géologique) ce montant faisant de lui le N°1 du secteur pétrolier et gazier en termes d’investissements, loin devant Shell et BP.
Que l’on en juge par les chiffres : Gazprom « Газпром » est depuis 1954 le premier exploitant et le premier exportateur de gaz au monde. Depuis 2005, elle est aussi un acteur majeur sur le marché mondial du pétrole. Plu grosse entreprise de Russie, 3ième capitalisation boursière au monde nous l’avons vu, Gazprom a contribué pour 20% aux recettes budgétaires de l’état russe en 2005 et à 8% du PIB Russe. Elle emploie plus de 300 000 personnes. La société possède plus de 90% du gaz naturel russe, tout en contrôlant 16% des réserves mondiales. En plus de ses réserves de gaz naturel, et du plus grand réseau de pipelines au monde, elle détient des positions dans les banques, l’assurance, les médias, la construction ou l’agriculture…
L’Europe au main de Gazprom, l’interdépendance Energétique
Pour mémoire Gazprom a fourni à l’Europe occidentale 25 % de ses approvisionnements en gaz naturel en 2005. Les États baltes et la Finlande sont dépendants à 100%, l’Autriche à 55%, l’Allemagne à 37%, la France à 21%. Le gaz en direction de l’Union européenne est transporté essentiellement via l’Ukraine (80%) et la Biélorussie (10%).

Après la résolution des crises Ukrainiennes et BiéloRusse en 2006 (pays essentiels pour le transit), l’Ukraine va dès 2009 acheter le gaz au prix Européen et Gapzrom a acquis en BiéloRussie 50% de la principale société Biélorusse Beltransgaz.

Cette Gazpromisation générale préoccupe l’Europe mais pour GAZPROM il ne s’agit que “d’interdépendance“. Pour preuve la nouvelle relation entre Gazprom et GDF : Gazprom livrera jusqu’en 2030 12 milliards de mètres cubes de gaz par an à GDF qui, en échange, rétrocède à Gazprom 1,5 milliard de m3 pour alimenter la filiale de distribution de Gazprom en France. Cette « interdépendance » se traduit également par le développement des bilatérales entre la Russie et certains états Européens, comme pour South-Stream avec l’Italie ou encore avec l’Autriche et la Slovénie qui viennent aussi de donner leur accord ou encore avec l’Allemagne via North Stream (dont la production devrait d’ailleurs augmenter), ce qui semble satisfaire l’UE.
Cette prise de position de la Russie via GAZPROM pour les approvisionnements vers l’Union rend quasi certain le succès de South-Stream, d’autant plus que le projet concurrent NABUCCO semble paralysé par les dissensions internes, entre Turcs et Francais notamment.

Malgré tout, Gazprom cherche à rassurer les Européens, pour preuve la très récente proposition de Dmitri Medvedev de créer des consortiums gérant les conduits de transit, avec la participation de la Russie, de l’Union européenne et des pays transitaires.

Hormis cette toute Orthodoxe proposée aux Européens,(déjà traitée ici) l’empire GAZPROM est en train de construire deux autres immenses routes énergétiques, la route arctique, et La route Eurasiatique.
La route Arctique de l’énergie : la conquête du grand nord Américain
GDF a en effet fait entrer Gazprom dans un projet de terminal de gaz naturel liquéfié en … Amérique du nord !
Le 15 mai 2008, Gazprom a signé un accord avec PETRO CANADA pour fournir 100% du gaz naturel à destination du terminal méthanier Rabaska. Qu’est ce que Rabaska ? Un partenariat entre trois sociétés (Gaz Métro, Enbridge et Gaz de France) consistant à construire un terminal capable d’accueillir des navires méthaniers qui transportent du gaz naturel liquéfié (GNL) avant que celui ci ne soit par la suite regazéifié pour être injecté dans le réseau de transport de gaz naturel du Québec et de l’Ontario. Cet accord signé entre PETRO CANADA et GAZPROM permettrait la fourniture cinq milliards de mètres cubes par année aux marchés du Canada et des Etats-Unis. Les bruits de couloir laissent entendre que le contrat d’approvisionnement pourrait être d’une durée de 25 ans et sa valeur pourrait dépasser les 20 milliards de dollars. La fourniture se fera par l’extraction du Gaz du gisement Chtokman. Découvert en 1988, Chtokman est situé dans la partie centrale de la mer de Barents, à environ 450 kilomètres au nord-est de la ville de Murmansk, en Russie. Le gisement est l’une des plus grandes réserves de gaz naturel au monde puisque ses réserves sont estimées à 2 % des réserves mondiales de gaz conventionnel. Les difficultés d’extraction arctiques du gisement nécessitent la construction d’un gazoduc sous-marin de 500 km de long soit le plus du monde, situé de plus en milieu polaire. En 2007, GAZPROM a annoncé que la collaboration d’extraction se ferait avec la société Francaise TOTAL, qui obtiendrait 25 % des parts du consortium, le reste à GAZPROM.
Cette « offensive outre-Béring », dans le grand nord Américain ne s’arrête pas la, Gazprom s’est dit également intéressé par le projet de gazoduc géant reliant l’Alaska au Canada et au reste des Etats-Unis. “Nous sommes intéressés par une participation à un projet d’ampleur comme la construction d’un gazoduc en Alaska et avons déjà soumis des offres à nos partenaires ConocoPhillips et British Petroleum“, a déclaré récemment Alexeï Miller.
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Le projet, baptisé Denali, pourrait transporter 113 millions de m3 par jour, depuis le gisement de North Slope en Alaska jusqu’à l’Alberta (Canada) puis, via un second gazoduc, vers le reste des Etats-Unis. Ce projet (d’un coût final de plus de 20 milliards de dollars) serait l’un des plus grands projets privés jamais réalisés en Amérique du Nord.

* Le projet « Prirazlomnoye Oil Field »ce champ de pétrole est situé dans la mer de Barents témoigne bien (tout comme le gisement Chtokman) de l’évolution fondamentale en cours au coeur de la stratégie GAZPROM pour la maîtrise des sources d’énergie : la diversification (gaz liquéfié, pétrole …) et la conquête de l’arctique et de son potentiel jugé très prometteur via de nouvelles techniques Off-Shores.
* Yuzhno-Russkoye field est encore un exemple de l’alliance Russo Allemande visant à assurer la sécurité énergétique stable en Europe. Une gigantesque réserve de gaz et pétrole a en effet été découverte dans dans le district des Yamal-Nenets, les réserves seront exploitées par Severneftegazprom, en collaboration avec la société Allemande BASF AG. Ces réserves devraient notamment servir à alimenter le terminal North Stream dont GAZPROM vient d’annoncer la hausse des livraisons ce qui semble satisfaire l’UE.
* Le projet Zapoliarnoïe en Sibérie du nord, qui sera exploité en collaboration par Shell et Gazprom. Celui ci produira d’ici 2011 jusqu’à 30 milliards de mètres cubes de gaz par an et Gazprom espère maintenir ce niveau de production jusqu’en 2019. Les réserves avérées de Zapoliarnoïe représentent 3.400 milliards de mètres cubes de gaz, soit, selon certaines estimations, 7% de la totalité des réserves russes.

La route Eurasiatique de l’énergie : la conquête de l’orient

La politique de Gazprom ne concerne pas que l’Occident (Europe – Amerique du nord). Hormis les projet à destination de l’Europe (South Stream et North Stream), et de l’Amérique du nord (Shtokman), GAZPROM s’est lancé dans une conquète de l’Est et de l’Asie centrale, réelle route Eurasiatique de l’énergie. Comme la société l’explique parfaitement sur son site internet : l’établissement d’infrastructures (production, transport et système d’approvisionnement) en Sibérie et en extrême-Orient sont les plus grandes priorités pour Gazprom dans une perspective à long terme.

Cette redistribution énergétique vers l’Asie pourrait même selon certains spécialistes amener à ce que d’ici 10 à 15 ans la Russie abandonne l’Europe pour ne se consacrer qu’à l’Asie.

* Blue Stream
Le gazoduc Blue Stream existe depuis novembre 2005 grâce à une participation de la compagnie russe Gazprom, de la compagnie turque Botas et de la compagnie italienne ENI. Il s’agit d’un gazoduc de 1213 km de long qui fournit le gaz russe via la mer Noire pour la Turquie.
Dès 2005, le président russe Vladimir Poutine et le président turc Recep-Tayyip-Erdogan envisagèrent la possibilité de l’extension du gazoduc Blue-Stream à partir de la Turquie à travers la Bulgarie, la Serbie, la Croatie jusqu’à la Hongrie, mais depuis le 23 juin 2007 et l’accord Italo-Russe (ENI et Gazprom) pour le projet « South Stream » c’est ce dernier qui remplacera une partie de l’extension prévue du gazoduc Blue Stream. Récemment, Gazprom a annoncé une augmentation de ses exportations de gaz naturel vers la Turquie de 22 millions à 30 millions de mètres cubes par jour.
* Le projet Altai
En mars 2006, Gazprom et la China National Petroleum Corporation ont signé le Protocole sur les livraisons de gaz naturel à la république populaire de Chine. Les premières livraisons Russes de gaz naturel sont prévues pour atteindre la Chine en 2011. Ces livraisons se feront par la région Altai, avec la création d’infrastructures destinées au marché Chinois, bien sur mais derrière également à toute la zone “Asie-Pacifique”, jugée a potentiel considérable. La seule production Chinoise de gaz naturel pour 2004 à atteint 47,5 milliards de mètres cubes, ce qui équivaut à sa consommation annuelle pour la même année. La consommation dépassant les capacités d’extraction, le manque en gaz de la Chine devrait être de 130 milliards de mètre cube dès 2010. Il est donc clair que l’importation de gaz est vital pour la Chine. Pour ce faire, la Russie livrera du gaz en Chine via deux routes :
- la route Occidentale via un tronçon reliant la Russie au Xinjiang Uyghur, la région autonome de l’ouest de la Chine en passant par l’Altai (30 milliards de mètres cubes de gaz par an) avant de rejoindre le tronçon existant (dit est-ouest) vers la zone de Shanghai.
- La route Orientale via les champs gaziers de Sakhaline.

Pour ce faire, la Russie va établir de nouveaux centres de production de gaz sur la péninsule de Yamal, en Sibérie orientale et en Extrême-Orient.

* Les projets Sakhaline sont destinés à la zone pacifique, à la Chine et à l’Amérique du nord : - Le projet Sakhaline I prévoit l’exploitation de 3 gisements situés sur le plateau continental au nord-est de Sakhaline. Le projet avait été annoncé rentable en octobre 2001. Les réserves exploitables sont estimées à 307 millions de tonnes de pétrole et à 485 milliards de m3 de gaz. -Sakhaline II est d’une importace capitale pour la Russie ! Il s’agit de deux grands gisements de pétrole et de gaz, dont les réserves exploitables sont estimées à 150 millions de tonnes de pétrole et à 500 milliards m3 de gaz. Le projet prévoit en outre la création d’une importante usine de liquéfaction de gaz dont la quasi-totalité de la production doit être livrée au marché nord américain (donc la consommation augmente de 30% par an), mais aussi aux plus grands consommateurs de GNL au monde : la Corée du Sud et le Japon ! Un accord entre GAZPROM et la Banque Japonaise pour la coopération commercial vient d’ailleurs d’être signé puisque la BERD a préféré se désister au motif que celle ci : « favoriserait, en effet, plutôt l’investissement privé dans les anciens pays du bloc communiste qu’une entreprise renationalisée de fait ». L’exploitation de Sakhalin II, qui se situe en mer d’Okhotsk devant l’île Sakhaline (au nord du Japon), prévoit la construction de deux plates-formes de forage intégrant pétrole et gaz (Lunskoye et Piltun Astokhskoye) dans des profondeurs d’eau respectives de 48 et 30 m. Sakhalin II est considéré comme un projet défi au vu des conditions géo-météorologiques locales. -Sakhaline III enfin témoigne de la coopération ascendante entre la Russie et la Chine CF l’accord entre Rosneft et la corporation chinoise Sinopec, qui ont l’intention de procéder à la prospection du bloc de Veninsky ainsi que l’idée de livrer du gaz du gisement de Kovykta en Asie du Nord-Est.
GAZPROM vers le siècle Altaique ?
L’exploitation et l’utilisation des ressources en hydrocarbures ne concerne pas « que » le territoire Russe (Eurasien) mais aussi tout le Heartland de l’Asie centrale. La Russie via GAZPROM a ainsi développé toute une collaboration avec les états d’Asie centrale, dans le prolongement de l’axe Altai.
En Ouzbékistan ou la filiale locale de GAZPROM (ZAO Zarubezhneftegaz) va remettre en état le champ gazier Shakhpakhty, via TsentrCaspneftegaz et au Turkmenistan avec lequel a été signé l’accord de développement et d’entretien du Gazoduc-PreCaspien, (AsieCentraleCentre = ACA), principale route d’exportation du gaz du Turkménistan.
Afin de garantir des capacités de transit entre ces trois pays, Gazprom a élaboré un programme d’actions prioritaires signé en mai 2007 par les présidents du Kazakhstan, de la Russie, du Turkménistan et de l’Ouzbékistan) et une déclaration commune pour construire le Gazoduc-PreCaspien (signé par les Présidents du Kazakhstan, Russie et Turkménistan).
La fin 2007 et le début 2008 ayant mis en exergue ma main mise de Gapzrom sur l’Asie centrale et l’Europe, l’IRAN devient dès lors un acteur plus qu’essentiel. GAZPROM et le gouvernement iranien ont signé un protocole d’accordpour coopérer dans le développement de champs pétroliers et gaziers, de même que dans des investissements et des études d’exploration“. Sont concernés plusieurs sites du champ gazier de Pars-Sud dans le Golfe Persique et le gisement pétrolier d’Azadegan-Nord au sud de l’Iran. Gazprom participe déjà au développement des seconde et troisième phases de Pars-Sud, conjointement avec le français Total et le malais Petronas.
Moscou pousse en outre via GAZPROM à une collaboration russo-irano-qatari, c’est à dire les pays détenant 55% des réserves de gaz du monde. Néammoins Téhéran semble pour l’instant hésiter a totalement adhérer à la tactique GAZPROM de participer à la création d’une OPEP du Gaz, ce que semble craindre l’Union Européenne.
GAZPROM semble vouloir en effet « utiliser » l’IRAN pour conduire le gaz Iranien via le fameux projet de gazoduc Iran-Pakistan-Inde, qui devrait permettre de fournir 110 millions de mètres cubes de gaz iranien par jour vers l’Inde et le Pakistan.
L’extension du domaine de GAZPROM
A Ben-Aknoun en Algérie, Gazprom a récemment ouvert sa représentation permanente, oconfirmant le souhait des deux pays de poursuivreleur collaboration énergétique notamment en vue du : «…projet de gazoduc Transalia, qui relie le Nigéria à l’Algérie pour l’approvisionnement européen et devrait acheminer 20 à 30 milliards de mètres cubes par an ».
Cette nouvelle avait avait affolé les pays européens, inquiets d’une éventuelle entente sur les prix et de la création d’un éventuel cartel du gaz sur le modèle de l’organisation des pays exportateurs de pétrole. GAZPROM a également entamé des explorations géologiques Off-Shores en Inde mais également au Vietnam, enfin au Vénézuela des négociations ont été entamées pour explorer et développer deux « champs » Off-Shore : Urumaco I and Urumaco II.
Enfin récemment des négociations ont été entamées avec Israel pour la livraison de gaz.
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Gazprom veut donner l’image d’une entreprise comme les autres. “Nous préférons être vus comme Batman plutôt que comme Godzilla“, a ironisé Alexander Medvedev, directeur général de la filiale export du groupe, qui avait été au coeur du conflit entre la Russie et l’Ukraine au cours de l’hiver 2006-2007. Loin d’être le bras armé du Kremlin, il assure que la multinationale a un objectif prioritaire : “le profit“.
La volonté de GAZPROM est pourtant claire : maîtriser les immenses ressources énergétiques du HEARTLAND Eurasien, car qui dirige le Heartland dirige le monde.
Pour lire la dernière interview de Alexei Miller dans le Financial Times, c’est ici.

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