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Des critiques malgré les bombes

Cet article a été publié originalement sur Ria Novosti
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Ainsi l’abominable s’est encore produit. Vers 14h30 lundi dernier, un kamikaze a fait exploser sa bombe dans le hall d’arrivée de l’aéroport international de Domodedovo. L’attentat, qui survient après la visite du président Russe au Proche-Orient et à la veille du sommet mondial de Davos, visait clairement tant à fragiliser le pouvoir russe qu’à inquiéter la communauté internationale, notamment en ciblant des étrangers. Le bilan est lourd, 35 personnes sont mortes et 180 blessées. La Russie apprend-on aurait pu en outre plus mal terminer l’année 2010 puisque le kamikaze de l’aéroport serait lié à une cellule terroriste, en cours d’identification et de démantèlement, qui avait planifié un attentat sur la place rouge le 31 décembre au soir.

Même dans ce moment difficile, la Russie n’a encore eu droit qu’à beaucoup de critiques et peu de soutien.Mention spéciale à la presse française qui s’est encore distinguée. Pour Hélène Blanc sur France-info par exemple, il faut se montrer particulièrement prudent car nous dit-elle en citant la série d’attentats qui avait fait 293 morts en Russie en 1999 : “ces attentats n’étaient pas du tout l’œuvre des Tchétchènes auxquels on les a attribués mais l’œuvre du FSB”. Pour Anne Nivat: “Poutine comme Medvedev exploitent l’obsession sécuritaire pour gagner des votes et ils se sont fait élire grâce à leur rhétorique sur la Tchétchénie”. Pour le correspondant du Figaro en Russie, Pierre Avril: “le pays serait en proie à une quasi guerre civile”. Enfin pour Vincent Jauvert, l’attentat démontrerait “la faillite du système Poutine”. Cette affirmation nous a déjà été martelé cet été, lorsque les incendies qui ont frappé la Russie avaient soit disant démontré une faillite d’un hypothétique système Poutine. En outre, ce dernier ajoute: “corrompus et incompétents, les services de sécurité n’ont pas repéré le kamikaze”.
Pourtant, bien loin des bureaux des rédactions des quartiers huppés de Moscou ou Paris, sur le terrain, les résultats de la Russie en matière de lutte anti-terrorisme sont assez éloquents. Pour la seule année 2010, dans le Caucase du nord, 301 terroristes ont été abattus et 468 arrêtés, 4.500 raids ont été réalisés, ainsi que 50 opérations antiterroristes d’envergure. 66 attentats ont été déjoués, même si 500 actes terroristes (dont 92 explosions et attentats) ont coûté la vie à plus de 600 personnes. En Russie pour la seule année 2010, plus de 360 policiers russes sont  morts dans l’exercice de leurs fonctions.

Bien sur, le Caucase musulman, Tchétchénie en tête, à longtemps été présenté par les médias occidentaux comme une région du monde occupée par la tyrannique Russie, mais aspirant à l’indépendance et à la liberté. Le terrorisme dans le Caucase serait une sorte de réaction désespérée de peuples opprimés. Les Français, ayant la nostalgie du village Gaulois assiégé par la puissante Rome, et désinformés sur la réalité du terrain, ne pouvaient que se laisser séduire, du moins pour une grande partie d’entre eux. Pourtant, il n’en est rien. Le but des terroristes n’est pas de libérer des peuples opprimés mais de les asservir. Les terroristes du Caucase sont liés à une nébuleuse islamiste sous forte influence étrangère, Wahhabite, reliée elle à une idéologie révolutionnaire et destructrice, qui vise à l’établissement d’un émirat Islamique dans tout la région. Ce noyau Wahhabite a probablement ses racines dans la première guerre de Tchétchénie, lorsque de très nombreux supplétifs étrangers (Arabes, Afghans…) ont rejoint les rangs Tchétchènes, pensant transformer la guerre d’indépendance en un conflit religieux et amener la guerre sainte dans la région. On sait ce qu’il advint, les nationalistes Tchétchènes, s’ils ont perdu la guerre sur  le terrain contre l’armée fédérale, ont au final obtenu pour la Tchétchénie une autonomie très importante, politique et religieuse, mais au sein de la fédération. Les tensions entre caucasiens et étrangers ont même explosé au grand jour, les premiers ne reconnaissant que difficilement les méthodes des seconds et leur radicalité intransigeante, bien loin du soufisme du Caucase, qui s’est quand même un tant soi peu accommodé des traditions locales. Ramzan Kadyrov proclamait d’ailleurs récemment et symboliquement, la défaite du Wahhabisme en Tchétchénie.

La séparation du Caucase et de la Russie comme le souhaitent et les Islamistes Wahhabites et certains intellectuels étrangers ne représenterait en rien une solution. Il semble évident que la conséquence première d’une telle décision serait de livrer la région à des conflits internes avec la probabilité qu’elle ne devienne rapidement un foyer régional de terrorisme. Il faut aussi rappeler que ces régions du sud de la Russie sont pour la plupart russes depuis plus longtemps que Nice n’est définitivement devenue Française. Enfin, de très nombreux Caucasiens musulmans se sentent russes et citoyens à part entière de la fédération, dont ils représentent une des facettes de l’identité multiculturelle.

Il serait appréciable que les commentateurs étrangers concentrent leurs attaques et leur énergie sur les criminels et non sur l’Etat russe. A ce que je sache, de Madrid à Londres ou Moscou, les victimes sont les victimes d’un seul et même terrorisme. Je ne crois pas que lorsque des événements similaires ont frappé d’autres démocraties européennes, comme l’Espagne ou l’Angleterre, en 2004 et 2005, avoir lu de la part de commentateurs russes que les attentats signifiaient un échec des gouvernements de ces pays ou que les services de sécurité n’auraient pas bien fait leur travail. Cela pour la simple et bonne raison qu’il est quasiment impossible d’empêcher tous les attentats terroristes. Les Espagnols, les Israéliens, les Turcs ou les Indiens, dont les pays sont souvent visés par le terrorisme ont depuis longtemps compris la nécessité de mesures de sécurité drastiques pour prévenir au maximum ces attentats, avec plus ou moins de succès. Ces mesures même si elles entravent certaines libertés individuelles sont sans doute essentielles pour que la vie puisse suivre un cours paisible malgré la menace.

Les esprits sont préparés si de nouveaux attentats surviennent, en Russie et peut-être encore dans la capitale, ce qui semble malheureusement inévitable. Le but des terroristes est toujours d’effrayer la population et déstabiliser la société. Mais aucun cas nous ne devons nous citoyens russes et étrangers nous laisser déstabiliser. Bien au contraire, c’est la coordination d’un état volontaire et décidé, et d’une population soudée et attentive qui est le meilleur rempart contre le terrorisme. La Russie a la capacité de surmonter ces épreuves. Comme l’a parfaitement résumé Alexeï Pimanov, le présentateur du programme Chelovek i Zakon (Homme et loi) dans l’émission récente consacrée à ces évènements: “Ceux qui ont spontanément et bénévolement proposé leur aide suite à cet attentat, qui ont transporté gratuitement de l’aéroport au métro des passagers, ceux qui ont donné leur sang ou aidé les secours dans les premiers difficiles moments, ces gens la représentent la vraie Russie”.

Polémiques vestimentaires

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Dans le petit futé 2006-2007, un paragraphe intitulé Moscou en 25 mots clefs décrit la devouchka (entendez la jeune femme russe) comme “une créature très apprêtée”  et affirme que “l’occidental en simple visite touristique fait souvent pâle figure, particulièrement l’hiver où il a du mal à s’adapter aux possibles changements de température”. Le paragraphe se termine de la façon suivante: “il vous sera bien difficile en face de défendre la réputation d’élégance dont la France doit porter le terrible fardeau”. Je précise que la tribune du petit futé était rédigée par une femme, et donc sans doute à destination des lectrices femmes en grande majorité puisque ces dernières ont bien évidemment à cœur ce sujet de l’élégance.

Cette guerre des élégances entre Françaises et Russes n’est pas nouvelle. En 1842 lorsque le secrétaire d’ambassade à Paris Victor de Balabine prend son poste, celui-ci remarque la compétition des genres, entre femmes françaises et femmes russes, et la décrit de façon très intéressante dans son journal. Il y note que: “si les Françaises, dans leur accoutrement de promenade, à la fois simple et élégant, ont sur elles un avantage marqué (…) En revanche, le soir dans un salon et au bal, les nôtres l’emportent par leurs toilettes d’abord, toujours fraîches et de bon goût, ensuite par un certain bel air, une certaine tenue un peu raide peut-être, mais qui leur donne un je ne sais quoi de distingué et de grande dame”.

Cette affirmation sur la supériorité de l’élégance russe devient une évidence pour quiconque, femme ou homme, voyage en Russie ou à Moscou de nos jours. La Russie n’a du point de vue de l’élégance des femmes aucun concurrent sérieux et certainement pas la France, ou depuis bien longtemps et pour diverses raisons pratiques, nos concitoyennes nous ont affirmé qu’un look moderne et neutre (entendez là jean large, basket et blouson sport) était le plus adapté à la vie urbaine, bien que vraiment peu sexy. Les hommes français qui viennent à Moscou sont donc généralement très agréablement surpris d’y découvrir une gent féminine très apprêtée, comme dirait notre commentatrice du petit futé. Quand aux femmes françaises, elles découvrent généralement avec stupéfaction et souvent une pointe de jalousie, que les Moscovites savent rester très élégantes, malgré le fait que les distances à parcourir à pied y soient souvent longues ou encore que l’architecture urbaine soit moins propice à la marche que dans les villes françaises.

Cette élégance marquée à travers les saisons, étonne également souvent l’étranger de passage en Russie. L’hiver, l’élégance féminine est animale, en fourrure et talons hauts, les femmes moscovites, avec leur comportement digne, le regard droit et clair ont indéniablement une classe et un style à part. La généralisation de la fourrure ne souffre pas en Russie de cette mode récente, soi disant écologique mais surtout très bourgeoise bohème, portée et propagée par notre égérie Brigitte Bardot, et qui veut qu’on ne porte pas de fourrures au nom du droits des animaux. L’été, le déshabillé excessif russe n’a sans doute non plus aucun égal, la beauté extra-terrestre des femmes Russes est aussi grande que les minijupes sont petites. Les étrangers sont d’ailleurs souvent estomaqués de voir à quel point les femmes russes sont libres de choisir leurs vêtements sans aucune crainte. C’est vrai que la légèreté vestimentaire russe n’a pas d’équivalent en Europe de l’ouest et surtout pas en France. L’explosion de l’insécurité et des incivilités dans les villes françaises est en effet sans doute la raison principale du choix de nombre de femmes à l’ouest de ne plus opter pour des looks sexy ou aguicheurs, mais au contraire très neutres et discrets.

A contrario en Russie, l’absence d’incivilités dans la rue à l’égard des femmes dévêtues permet je dois dire tous les excès, généralement pour le plus grand bonheur des yeux masculins. Cette équation féminine russe est sans doute un des raisons principales du succès des femmes russes auprès des hommes du monde entier, mais pour autant, cette mode vestimentaire estivale n’est pas approuvée par toute l’opinion en Russie.

Récemment l’une des principales têtes pensantes de l’Eglise orthodoxe, l’archiprêtre Vsevolod Tchapline, a exigé l’instauration d’un dress-code pour les femmes en Russie, estimant que “certaines d’entre elles confondent la rue avec un club de strip-tease”. Ce pamphlet contre les spécialités Russes modernes que sont le micro-short ou la mini-jupe pourrait faire sourire si l’homme d’église n’avait rajouté que “la minijupe provoquerait des conflits interethniques et la violence et des crimes de la part de Caucasiens, mais aussi de Russes”. Cette analyse des conséquences d’un tel code vestimentaire est à mettre en lien avec l’idée de création d’un “code des Moscovites”, annoncé par le président du comité chargé des liens inter-ethniques l’année dernière, qui visait à réguler le comportement des non Moscovites, en vue de leur bonne intégration dans la capitale. Le code prévoyait notamment l’interdiction de marcher dans la ville en tenue traditionnelle.

Cette volonté de l’église d’influer sur les comportements est à comprendre dans une double logique. Tout d’abord tenter de sauver une structure familiale garante d’une démographie en bonne santé et qui est aujourd’hui gangrénée par la tentation, les avortements et les divorces. Mais surtout désamorcer les tensions pouvant résulter de la cohabitation à Moscou de nombreux peuples aux habitudes et mœurs très différentes. L’archiprêtre l’avait annoncé en décembre dernier, l’église orthodoxe va désormais interférer dans la politique et se poser en garant de la cohabitation et de l’harmonie entre les communautés. Comme je l’avais écrit dans une précédente tribune, le maintien du fragile modèle multiculturel russe est en effet menacé par la confrontation des mondes modernes et traditionnels.

Bien entendu, cette phrase de l’archiprêtre a provoqué un tollé dans les milieux laïcs, féministes ou libéraux, mais en revanche elle a immédiatement trouvé le soutien du clergé musulman de Russie, des représentants des autorités juives du pays, ou encore du président de la Tchétchénie, Ramzan Kadyrov. Quoi qu’on puisse donc penser, individuellement, d’une telle initiative contre les excès de la mini jupe, on doit admettre que ses objectifs sont nobles, et se féliciter quand à la concorde religieuse qu’elle à permis d’établir sur le sujet.

Made in Russia

Cet article à été publié initialement sur Ria Novosti
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L’image du “made in Russia” change rapidement, décennie après décennie. Jusqu’à la fin de l’époque soviétique, la presse internationale voyait Moscou comme une ville bâtie autour du Kremlin et de la Lubianka, et l’URSS comme la patrie de l’idéologie marxiste, de la guerre froide, de l’industrie lourde et de la conquête spatiale.
Pendant les dix années qui ont suivi la désintégration de l’Union soviétique, avec la ruine de l’industrie et l’appauvrissement de la population, le made in Russia a toujours fait penser à des stéréotypes négatifs et dangereux: les mafias internationales, les oligarques richissimes, l’argent facile, les trafics en tous genres, l’exportation de vodka ou d’armes de guerre.
Pendant que le Japon vendait Toyota et Sony, l’Amérique Coca-cola, Microsoft et General-Motors, l’Allemagne Mercedes ou Bosch, la France avait toujours ses produits de luxe, Chanel, Vuitton ou Hermès, la  Russie elle n’offrait pas de modèles pour faire rêver les consommateurs de la planète.

 

 

Pire sans doute, la jeunesse russe et la nouvelle bourgeoisie ne rêvaient que des produits importés de l’étranger. Les années 1990 ont tout de même apporté en Occident une surprise de taille, à propos du made in Russia. Les marxistes disaient depuis longtemps que le modèle soviétique préparait en secret un prototype “d’homme nouveau”, mais ce sont les femmes russes qui sont devenues brusquement les produits d’exportation les plus prestigieux de la Russie. Sur les courts de tennis du monde entier ou dans tous les défilés de mode de la planète, elles ont imposé le modèle de beauté russe et donné une image éclatante du pays.
La décennie suivante, à partir de l’an 2000, a de nouveau profondément modifié l’image de la Russie à l’étranger, de même que l’image du made in Russia. La Lubianka et les tennis women ont été presque oubliées et pour la presse occidentale, la Russie est devenue la patrie de la marque Gazprom. Beaucoup d’analyses critiques se sont focalisées sur les exportations russes de gaz et de pétrole pour en tirer deux conclusions: l’explosion fulgurante du prix du baril serait la raison principale de la bonne santé économique du pays, et la Russie serait menacée par la “maladie hollandaise“. Ces analyses ne tiennent pas compte des progrès réalisés par d’autres secteurs de l’économie. La Russie est devenue le 3ème exportateur mondial de céréales, et de nombreux projets industriels sont en cours de réalisation, comme le système russe Glonass (système GPS par satellites).

La Russie qui était lourdement endettée au début des années 2000, a fini l’année 2010 avec presque 500 milliards de dollars de réserves de change, malgré la crise financière, et après avoir connu un fort taux de croissance du PIB pendant la décennie, d’une moyenne annuelle de 6 %. Contrairement à de nombreux pays occidentaux, la Russie n’est plus obligée d’emprunter de l’argent à l’étranger pour payer ses fonctionnaires. Dire que ces réussites sont uniquement dues au pétrole est inexact. La méthode de management de l’économie, pragmatique et réactive, y est certainement également pour beaucoup. C’est un modèle  made in Russia qui a fait ses preuves, mais curieusement, ce n’est pas encore un produit d’exportation.

 

 

En Russie, en même temps que le redressement économique, la décennie a vu renaitre un engouement certain pour les produits made in Russia. Une petite révolution est en cours dans les esprits des consommateurs russes, et le Cheburashka a tenu une place importante dans cette évolution. Cette peluche qui ressemble à un ourson, conçue au temps de l’URSS, est devenue un véritable symbole national en Russie. Elle a ouvert la voie à ce qu’on appelle en Europe occidentale les produits ethniques. La société Russe Bosco, qui habille notamment les équipes de sport du pays, ainsi qu’une clientèle relativement huppée, ne s’est pas trompée et a fait du cheburaska un véritable symbole identitaire. D’autres exemples existent, par exemple le succès des produits vestimentaires de jeunes designers Russes jouant très habilement sur des symboles, motifs et designs nationaux, que l’on pense par exemple à Antonina Shapovalova ou bien encore à Denis Simachev.

 

Après une décennie de reprise en main, la ré-industrialisation, la modernisation et l’innovation sont redevenues des priorités nationales. Dans le domaine industriel, des nombreux chantiers sont lancés, que l’on pense par exemple au développement envisagé des nanotechnologies. On a aussi beaucoup parlé du projet de voiture électrique hybride russe à un prix défiant toute concurrence. Des informaticiens préparent un système d’exploitation russe et un nouvel iPhone 4g, à terme entièrement fabriqué en Russie, sera mis sur le marché dans quelques mois. Ce sera par ailleurs le premier téléphone avec une fonction GPS qui utilisera le système de satellites Glonass. Alors que l’année croisée franco-russe vient de se terminer, on peut citer également le rachat par le français Jacques Von-Polier, de la société de montres Raketa, dont l’usine est la plus ancienne du pays mais également la dernière usine de montres produites en Russie.

Il très important que désormais les Russes ne conçoivent plus le made in Russia comme quelque chose de dépassé ou d’has-been mais bel et bien comme quelque chose de moderne et que l’on peut être fier de porter. Egalement, le développement de marques et produits made in Russia contribuera à l’affirmation de la Russie à la place qui est la sienne: au sein des économies développées de ce monde. Il y a de la créativité dans l’air et on peut raisonnablement penser que le made in Russia a de l’avenir.

Made in Russia

Оригинальная статья была опубликована в РИА Новости

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Представление о «made in Russia» быстро меняется, от десятилетия к десятилетию. До конца советской эпохи международная пресса воспринимала Москву как город, построенным вокруг Кремля и Лубянки, а Советский Союз ― как родину марксистской идеологии, холодной войны, тяжелой промышленности и покорения космоса.На протяжении десяти лет, последовавших после распада Советского Союза, с разрушением промышленности и обнищанием населения, «сделано в России» всегда заставляло думать о стереотипах негативных и опасных: международная мафия, богатейшие олигархи, легкие деньги, незаконная торговля всех видов, экспорт водки или вооружения.

В то время как Япония продавала Toyota и Sony, Америка ― Coca-Cola, Microsoft и General-Motors, Германия торговала Mercedes или Bosch, Франция ― предметами роскоши, Chanel, Vuitton и Hermès, России не предлагала никаких товаров, о которых могли бы мечтать потребители в мире.

Еще хуже, несомненно, было то, что российская молодежь и новая буржуазия желали только товаров, импортируемых из-за рубежа. 1990-е годы все же преподнесли Западу большой сюрприз относительно «made in Russia». Марксисты давно говорили, что советская модель втайне готовила прототип «нового человека», но это были российские женщины, внезапно ставшие самым лучшим экспортным товаром России. На теннисных кортах или модных дефиле всего мира, они ввели образец русской красоты и показали ослепительный образ страны.

Следующее десятилетие, начиная с 2000 года, снова глубоко изменило образ России за рубежом, а также представление о «made in Russia». Лубянка и теннисистки были почти забыты, а для западной прессы Россия стала родиной «Газпрома». Многие критические анализы были сосредоточены на российском экспорте нефти и газа, и сводились к двум выводам: взрывной рост цены барреля является основной причиной экономического здоровья страны, а России угрожает «голландская болезнь». Эти анализы не принимают во внимание прогресс, достигнутый в других секторах экономики. Россия стала третьим по величине экспортером зерна, реализуются многие промышленные проекты, как, например, российская система ГЛОНАСС (спутниковая система GPS).

Россия, имевшая в начале 2000-х годов крупную задолженностью, закончила 2010 год с почти 500 миллиардами валютных резервов, несмотря на финансовый кризис, а рост ВВП в течение десятилетия составлял в среднем 6%. В отличие от многих западных стран, Россия больше не должна занимать деньги за рубежом, чтобы выплачивать зарплату государственным служащим. Говорить, что эти успехи обусловлены исключительно нефтью, неверно. Метод управления экономикой, прагматичный и активный, также очень важен. Это модель, «сделанная в России», зарекомендовала себя, но, что любопытно, все еще не является экспортным продуктом.

В России наряду с восстановлением экономики в последнее десятилетие возродился некоторый энтузиазм по отношению к товарам «made in Russia». В умах российских потребителей происходит маленькая революция, важное место в которой занимает Чебурашка. Эта мягкая игрушка, похожая на плюшевого мишку, разработанная в советское время, стала национальным символом в России. Она проложила путь для того, что в Западной Европе называется этническими товарами. Российская компания Bosco, которая одевает спортивные команды страны, а также относительно богатую клиентуру, не ошиблась, сделав из Чебурашки настоящий национальный символ. Существуют другие примеры, например успех одежды молодых российских дизайнеров, умело играющих символами, мотивами и национальными формами, например, Антонина Шаповалова или Денис Симачев.

После десятилетия восстановления контроля, реиндустриализация, модернизация и инновации вновь стали национальными приоритетами. В промышленности были запущены многие проекты, например, развитие нанотехнологий. Кроме того, много говорилось о российских гибридных электрических автомобилях по ценам, которые бросают вызов любой конкуренции. Компьютерщики создают российскую операционную систему, а новый iPhone 4G (так в тексте – прим. перев.), полностью сделанный в России, появится на рынке через нескольких месяцев. Это будет первый телефон с функцией GPS, использующей систему ГЛОНАСС. В то время как закончился перекрестный франко-российский год, можно также вспомнить покупку французом Жаком фон Полье часового завода «Ракета», являющегося не только старейшим в стране, но также последним заводом в России, производящим часы.

Очень важно, что теперь россияне воспринимают произведенное в России не как что-то устаревшее или отсталое, а как нечто современное, что можно носить с гордостью. Кроме того, развитие брендов и товаров «made in Russia» будет способствовать утверждению России на том месте, которое является ее собственным: среди развитых экономик мира. В воздухе витает дух творчества, и вполне разумно предположить, что у «made in Russia» впереди большое будущее.

Перевод : Уголин (Ursa-Tm)

Divine Carélie

Cet article à été publié originalement sur Ria Novosti
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Divine Carélie
 
“Alexandre, tu passes le Nouvel an avec nous?”, m’ont demandé mes proches amis dans le courant du mois de décembre. J’avais une autre idée: passer les fêtes dans le Nord, à Petrozavodsk, capitale de la Carélie.
C’est à 1.000 kilomètres de Moscou, en direction de la mer Blanche, l’endroit où je passe le plus de temps, en dehors de la capitale. On y croise encore peu de touristes francophones et pourtant cette destination mérite le voyage pour ceux qui recherchent le dépaysement et des impressions nouvelles.
 
La République de Carélie, grande comme 1/3 de la France métropolitaine, n’est peuplée que de 680.000 habitants. Elle représente l’exemple de l’unité la plus décentralisée possible au sein de la fédération de Russie puisqu’elle a le statut de république, comme la Tchétchénie ou le Tatarstan. Les républiques russes sont des entités très autonomes, ayant leurs constitutions, leurs présidents et même parfois leurs langues officielles. Mais contrairement aux autres républiques russes, toutes fondées sur des peuples minoritaires ayant un territoire et des spécificités tant culturelles que religieuses ou linguistiques, en Carélie c’est le peuple indigène qui y est minoritaire. Les Caréliens ethniques représentent en effet moins de 10% de la population, les Russes ethniques plus de 76% et les Ukrainiens et Biélorusses 8%. La décentralisation y est donc uniquement politique, institutionnelle et non basée sur des principes ethno-religieux. Cette particularité donne à la République de Carélie une personnalité assez unique en Russie. La population de Carélie est donc très majoritairement slave orthodoxe, mais il y a aussi de nombreux Finlandais qui représentent près de 2% de la population de la République. A Petrozavodsk, on a l’habitude de dire que l’influence finlandaise est présente dans la gastronomie, dans le calme et dans le civisme des Caréliens, notamment au volant de leur voiture ou encore dans leur attachement parfois excessif à la propreté et à la nature.
 
Petrozavodsk, la capitale de la République, avec moins de 268.000 habitants fût construite par Pierre le Grand en 1703, lors de la grande guerre du Nord qui opposa la Russie à une coalition germano-scandinave. La ville était à l’origine bâtie autour d’une usine qui fabriquait des canons. Maintenant, elle est tournée vers son lac, le lac Onega, l’un des deux plus grands d’Europe avec son cousin, le lac Ladoga. Cette immensité d’eau calme est difficile à imaginer, on pourrait y plonger toute la Corse et il resterait de la place. L’été, des bateaux de croisière énormes s’arrêtent à Petrozavodsk. Ils vont de Saint-Pétersbourg à Moscou en traversant les lacs et en suivant le réseau de canaux gigantesque créé à l’époque soviétique. Dans la ville, le bord du lac est une promenade dans la verdure l’été et une piste de ski de fond l’hiver. En ville on trouve des bâtiments de style stalinien, mais aussi des hôtels de qualité, des centres commerciaux et un nouveau complexe hospitalier ultramoderne. Dans le centre, le réseau Wifi est accessible quasiment partout. Dans les restaurants on peut déguster une cuisine typiquement carélienne, délicieuse, composée notamment de poissons grillés et salés ou de viande de renne, d’élan ou d’ours, accompagnée de sauces aux baies de Carélie. 
 
La République de Carélie avec ses 60.000 lacs, ses 27.000 rivières et son territoire recouvert à 85 % par la forêt donne l’impression d’être entièrement verte et bleue. Sur cette terre d’eau et de verdure, ce qui frappe le visiteur c’est avant tout le calme, la sérénité et l’absence d’agitation qui y règnent. La Carélie est une riviera du nord, sans frasques, sans touristes bruyants, sans excès, une immense réserve d’air pur avec une nature préservée. Il faut rouler et sortir de la ville pour arriver à de petits villages composés de maisons et d’églises bariolés de couleurs vives, villages régulièrement visités par des ours, loups et lynx. Les pêcheurs du coin ne s’y trompent pas, ils emportent une carabine quand ils vont à la pêche aux truites saumonées.
 
L’hiver c’est une tout autre affaire, l’hiver carélien est réellement froid car venté et très humide. C’est un froid glacial, blanc, immaculé, polaire. La moto neige remplace le 4×4, les lacs sont gelés et dans le port de Petrozavodsk les bateaux de transport de bois sont figés dans la glace. Cette glace pourtant n’arrête pas les pêcheurs, qui bravent le froid et la neige au profit de leur activité préférée. Dans le centre-ville de Petrozavodsk les habitants sont toujours aussi calmes et chaleureux, bien qu’emmitouflés dans des combinaisons de ski en polaire, pour se protéger.
 
Le patriarche de toutes les Russies Alexeï II avait dit avant sa mort que le nord de la Russie était son cœur spirituel. On comprend mieux cette phrase après être allé en bateau, sur le lac Onega, de Petrozavodsk à l’île de Kiji. Cette traversée révèle toute la majesté de la nature en Carélie. En été seulement, le bateau de type Comèta file à 30 nœuds et il faut presque une heure et demie pour atteindre l’île. L’apparition des bulbes des églises, à l’horizon, au milieu d’une nature qui semble sans fin est simplement indescriptible. L’île de Kiji, ce chef-d’œuvre de l’art religieux, est connue pour ses deux églises entièrement en bois, assemblées sans clous, vis ni aucune pièce métallique. Cet ensemble paroissial est inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO. Le visiteur francophone sera agréablement surpris de pouvoir entendre le prêtre orthodoxe de l’île, le père Nicolas, s’exprimer dans un français parfait.
Si je devais conseiller où aller à un étranger qui visite la Russie pour la première fois, je lui conseillerais la Carélie. L’influence finlandaise procure un aspect très européen à cette république pourtant si russe, mais qui a su préserver son identité régionale. Le renouveau récent de cette identité régionale, qui n’entre absolument pas en conflit avec l’identité fédérale russe est sans doute un modèle pour l’Union Européenne au sein de laquelle l’agencement des relations entre régions, euro-régions, Etats et institutions européennes sont souvent délicates.

La démographie russe objet de tous les fantasmes

L’article original a été publié sur Ria-Novosti
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En octobre 2010, un grand quotidien français,  réputé pour le sérieux de ses analyses internationales consacrait 6 pages à un dossier sur la démographie Russe. Le titre: “Quand la Russie disparaitra: enquête sur un désastre démographique” était posé en grosses lettres sur la photo d’un enfant à l’air hagard et aux mains sales, dont on ne sait trop s’il était en haillons ou pas. Un correspondant ayant vu la photo  m’a demandé si c’était une photo colorisée datant du siège de Stalingrad. Le dossier analysait la période de déclin démographique que la Russie a connu après l’effondrement de l’Union soviétique et concluait que la population Russe devrait chuter à 80 millions d’habitants en 2050, le peuple Russe ayant plausiblement disparu en 2150.

 

Certes, l’effondrement politique, économique et institutionnel qui a suivi la disparition de l’URSS a contribué au déclenchement d’un désastre sanitaire et démographique sans précédent. En quelques années, l’espérance de vie s’est écroulée, et l’état sanitaire moyen s’est considérablement détérioré. La surconsommation d’alcool souvent frelaté, les empoisonnements liés et les suicides ont provoqué une explosion du taux de mortalité. Les maladies sexuellement transmissibles dont le sida, se sont développées, parallèlement à l’augmentation de la consommation de drogue.  Mais surtout, alors que de plus en plus de Russes mourraient, de moins en moins naissaient. L’augmentation de la mortalité s’est accompagnée d’une baisse de la natalité. Face à la crise économique, l’avortement était souvent la seule solution pour beaucoup de femmes. Par ailleurs pour 1993 on a estimé que sur 1,6 millions de naissances, il y a eu près de 5% d’abandons d’enfants.

 

La démographie russe est un sujet complexe, certes alarmant, mais qui bien souvent est traité de façon excessivement pessimiste dans la presse étrangère. Par exemple il nous est annoncé dans cet article que la Russie perdrait 900.000 habitants chaque année, puis une carte du taux d’accroissement naturel des régions Russes datant de 2009 était agrémentée d’un commentaire expliquant qu’en 2007, le solde migratoire positif de la population russe ne compense pas l’accroissement naturel négatif. Tous ces chiffres mélangés semblent extrêmement inquiétants, mais la disparition annoncée de la population de la Russie ne tient pas compte de tous les paramètres de la situation. Reprenons: la population Russe est passée de 147,7 millions en 1990 à 141,9 millions en 2009, une diminution de 5,8 millions d’habitants en 19 ans, soit une baisse annuelle moyenne de 305.000 personnes. La population a donc diminué de 5,8 millions d’habitants malgré plus de 6 millions de naturalisations réalisées  en 17 ans, de 1992 à 2009, soit une moyenne annuelle de 350.000. Les personnes naturalisées  étaient principalement des Russes des ex-républiques de l’Union Soviétique, dont plus de 30 millions se sont retrouvés en 1991 hors des frontières de la Russie. Ainsi si l’on devait établir une moyenne de la diminution de la population Russe, elle s’établirait pour la période de 1990 à 2009 à environ 650.000 personnes chaque année.

La situation s’est considérablement aggravée après 2000. De 2001 à 2006, la population chute de 146,3 à 142,8 millions d’habitants, soit une perte de 3,5 millions d’habitants en 5 ans. Pour la seule année de 2005, la population a diminué de 780.000 habitants. Cette année catastrophique est également l’année ou l’Etat a lancé un programme national « santé » confié à Dimitri Medvedev, alors vice-Premier ministre en charge des projets nationaux et prioritaires. Destiné à relancer la natalité et faire baisser la mortalité, ce new-deal démographique a déjà eu des résultats assez consistants. Les chiffres sont parlants. En 1990, il y eut 2 millions de naissances et 1,7 millions de décès contre 1,2 millions de naissances et 2,1 millions de décès en 1999. Mais dès 2005, un mouvement de hausse de la natalité et de baisse de la mortalité s’est amorcé, mouvement qui se confirme aujourd’hui. En 2009, avec 1,76 millions naissances, 1,95 millions de décès, 100.000 émigrants et 330.000 naturalisations, la population russe a augmenté pour la première fois depuis 15 ans, de quelques 50.000 habitants. Le taux de fécondité de 1,9 enfant/femme en 1990, tombé à 1,1 enfant/femme en 2000 est remonté à 1,56 enfants/femme en 2009, soit un taux similaire à celui de l’Union européenne qui était de 1,57 enfants/femme en 2008. 

Un autre volet du plan démographique a  notamment pour objectif la diminution du nombre d’avortements. Bien que le nombre d’avortements ait diminué de 25 % entre 2003 et 2008, on en a tout de même recensé en 2008 1,234 million, pour 1,714 million de naissances la même année. La seconde partie du plan vise aussi la diminution du taux de mortalité. Il est axé sur  le développement des hôpitaux et de l’accès aux soins, tout particulièrement dans le domaine des maladies cardio-vasculaires qui ont été la cause de plus de la moitié des décès en 2008. Désormais, il est prévu que la natalité dépasse la mortalité dès 2012 et qu’ainsi la population recommence à augmenter naturellement, sans besoin d’apport extérieur. L’espérance de vie est également encore trop basse, 66 ans contre 78 ans dans l’Union européenne, même si depuis 2005 elle a augmenté de 4 ans. Bien sûr, tout n’est pas réglé, loin de là. Egalement, la natalité actuelle est le fait des enfants qui sont nés dans les années 80, soit avant le déclin démographique. Lorsque la génération du déclin, moins nombreuse, sera en elle âge de procréer, la population devrait baisser mais également vieillir. 
 
Quelle  pourrait alors être la situation démographique Russe en 2030 ? Des prévisions démographiques sans aucun doute plus sérieuses que celles de certains journalistes  ont été faites par le principal centre russe de statistiques, elles envisagent une population comprise entre 128 et 144 millions d’habitants en 2030, selon le taux de fécondité et l’immigration que connaitra le pays. La démographie est une science incertaine, et l’étude de la démographie russe d’après-guerre nous montre que la hausse du niveau de vie et la confiance dans l’avenir sont des facteurs essentiels dans ce domaine. La croissance économique actuelle de la Russie est donc certainement un point très positif, pour le “new deal démographique” en cours. En tout état de cause, nous sommes très loin de certaines prévisions catastrophistes, et en 2010, la Russie n’est pas dans une situation démographique pire que certains pays Européens. Une chose est sûre: contrairement à ce que pensent certains, non, la Russie ne disparaitra pas!

Pour le modèle multiculturel russe

L’article original a été publié chez ria novosti
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Moscou a connu en ce mois de décembre 2010 des tensions entre ressortissants du Caucase et jeunes nationalistes. S’il ne s’agit pas d’un fait nouveau, certains commentateurs ont comparé ces incidents aux émeutes urbaines de plus en plus fréquentes qui se produisent dans les villes d’Europe de l’ouest. Pourtant, malgré les similitudes que les événements semblent présenter, les situations de fond sont fondamentalement différentes.
Jusqu’à la moitié du siècle dernier les nations d’Europe de l’ouest étaient très homogènes sur le plan ethnique et religieux, et les migrations en leur sein étaient principalement intra-Européenes. Ce n’est qu’après le second conflit mondial que ces Etats ont fait appel à une immigration non européenne, issue de leurs ex-colonies.
La première vague de ces migrants économiques n’a rencontré que “peu” de difficultés d’intégration, grâce à la forte croissance d’après-guerre. Mais peu à peu, l’embellie économique a disparu et l’immigration économique se transforme en une immigration de fuite de la misère qui a, en quelques décennies, profondément modifié le visage de l’Europe. L’actualité regorge de manifestations de l’échec de l’intégration de ces migrants dans leurs nouveaux pays de résidence.
L’absence de contrôle des flux migratoires et les calamiteuses politiques d’intégration des Etats européens ont favorisé le repli communautaire, culturel et parfois religieux de certaines communautés, et entraîné la création de ghettos au sein de la plupart des grandes villes occidentales. Ni le modèle communautariste anglo-saxon, ni le modèle d’intégration français n’ont donné de résultats satisfaisants en Europe occidentale, quant à la cohabitation de populations différentes. La situation est telle que récemment, la chancelière allemande a dénoncé l’échec du système multiculturel en Allemagne. Un constat que l’on pourrait appliquer à toute l’Europe qui pour beaucoup d’analystes serait en cours de balkanisation.
La Russie a quant à elle une expérience de cohabitation plutôt harmonieuse sur son territoire entre populations possédant des religions différentes. Sous le règne d’Ivan IV, la victoire sur les Tatars et l’intégration de divers peuples de la plaine qui a suivi a transformé la Russie en un état multiethnique et multiconfessionnel, il y a de cela 500 ans. Comme l’explique l’historienne Natalia Narotchnitskaya: “La Russie a une différence avec tous les pays européens dans la façon dont elle a absorbé ses différents peuples conquis. Lorsque les Tatars et les Caucasiens l’ont été, leurs chefs ont été plus qu’intégrés, même anoblis. Ils ne furent jamais traités en colonisés ou comme les égaux des aristocrates russes. Ils avaient même des serfs russes. Peut-on imaginer des Lords indiens avec des domestiques anglais”?
L’expansion territoriale de la Russie a fait que tous les peuples conquis ont ensuite été incorporés au sein de l’Union soviétique, qui excluait toute forme de racisme. Cette dissémination géographique de peuples très différents sur l’immense territoire russe a contribué à façonner l’aspect multiculturel de la Russie, qui a fait ses preuves. La Russie, qui est un empire, s’est efforcée de maintenir jusqu’à ce jour la cohabitation sur son territoire de plus d’une centaine d’ethnies, de nombreuses religions, et ces peuples ont pu préserver leurs traditions culturelles. Elle a su éviter les tensions qui auraient pu survenir après les guerres dans le Caucase ou après les attentats qui ont frappés sa capitale ces dernières années. La Russie s’est aussi préservée de la création de ghettos communautaires dans ses villes, malgré une situation économique bien plus difficile qu’en Europe. Enfin, l’intégration des minorités et leur représentation aussi bien au sein du peuple qu’au sommet de l’Etat est réelle, ce qui est encore une différence majeure avec l’Europe.
Les incidents de ces derniers jours ne sont donc pas comparables aux émeutes d’Europe occidentale lorsque des jeunes d’origine immigrés affrontent l’Etat, via sa police par exemple. Ni les nationalistes, ni les Caucasiens qui étaient dans les rues de Moscou n’ont exprimé un rejet réel de l’Etat russe. De plus, aucune casse massive n’a été constatée. En revanche, une frange de la population a exprimé un mécontentement que les autorités devraient sans doute écouter. Suite à la mort d’un jeune lors d’une rixe, cinq des six suspects ont été relâchés le jour même. Le sentiment d’injustice compréhensible que cela a créé est sans doute la raison principale du déclenchement de ces tensions. Cette anomalie a, par ailleurs, soulevé de nombreuses autres questions majeures, dont le disfonctionnement évident de certains services publics. C’est plus cela, que le rejet du “vivre-ensemble” à la russe qui est fondamentalement remis en cause par les divers manifestants.
Comme le rappelait Natalia Narotchnitskaya: “La Russie vit en même temps au XIXe, au XXe et au XXIe siècle. Elle combine l’opulence et la misère; la technologie de pointe y côtoie les conditions de vie les plus primitives; on trouve, sur son territoire, tous les climats possibles; de nombreuses religions et civilisations y cohabitent. La coexistence relativement harmonieuse de toute cette diversité confère à la Russie une expérience unique. En tout cas, nous n’avons jamais eu de guerres de religions comparables à celles qui ont sévi en Europe”.
La taille de la Russie fait donc qu’un Caucasien, par exemple, peut avoir un style de vie et un système de valeurs très différents d’un jeune cadre moscovite urbanisé. La confrontation des mondes modernes et traditionnels est toujours difficile et conflictuelle, et exacerbée en Russie par la dimension et la diversité du pays. La question n’est donc pas tant le problème de la nationalité ou de la religion mais bel et bien le maintien d’une identité suffisamment forte et ouverte pour que chacun garde la capacité et surtout la volonté d’appartenir à cette maison commune qu’est la Fédération de Russie. Un proverbe russe dit que dans la steppe immense, chaque population a pu trouver sa place sans gêner l’autre. Pour cette raison, il faut défendre le “modèle russe” et continuer à être fier d’habiter dans ce pays multiculturel qu’est la Russie d’aujourd’hui.

Mosca, capitale dell’Europa?

L’articolo originale è stato pubblicato il RIA Novosti

Quasi tutti i francesi sono profondamente eurofili, è ironico perché gli stranieri che si recano in Francia sono spesso colpiti dalla loro relativa chiusura mentale, dalla loro ignoranza delle lingue straniere e dal loro sciovinismo spesso eccessivo.Ma i francesi sono dietro il primo tentativo d’integrazione europea dal IX secolo, Carlo Magno, imperatore d’Occidente, fu alla fine del suo regno, a capo di un impero continentale che comprendeva la Francia attuale, parte della Spagna e dell’Italia, e anche parte del mondo germanico e dei Balcani. Per molti intellettuali e storici, Carlo Magno è il padre dell’Europa. Purtroppo o per fortuna dell’Europa, dopo la sua morte, il suo impero venne smembrato. Il secondo tentativo francese di costruire l’Europa è quello di Napoleone, quest’ultimo immaginava di controllare un vasto territorio, continentale, dalla Corsica a Mosca. E’ ben noto, soprattutto in Russia, come il tentativo del corso di costruire l’Europa con le armi fallì nel 1812, di fronte alla resistenza del popolo russo e a un inverno terribile.

Dopo la seconda guerra mondiale, l’Europa si è trovata divisa in due blocchi, un blocco transatlantico degli Stati Uniti e un polo sovietico, continentale. In Occidente, l’Europa fu costruita con i soldi statunitensi del piano Marshall, in cambio dell’integrazione nella NATO, un’alleanza militare di obbedienza statunitense, fondata nel 1949 e volta a prevenire qualsiasi tentativo imperialista dell’Unione Sovietica. Nel 1955, i paesi dell’Europa orientale sotto la dominazione sovietica, furono incorporati nel Patto di Varsavia, un’alleanza militare creata in risposta alla NATO. L’eurofilia francese si manifesta di nuovo quando nel 1967, il generale de Gaulle fece uscire il suo paese dalla NATO e gli diede l’accesso alla potenza nucleare. Voltando le spalle al mondo anglo-sassone, questi affermò il suo progetto visionario di un’Europa continentale, cancellando la provvisoria cortina di ferro e predicando l’avvicinamento storico con la Germania e la Russia, come parte del continente europeo dall’Atlantico agli Urali. Nel 1960, Parigi si posizionò come capitale politica, e la Francia ha iniziato un nuovo tentativo per la creazione dell’Europa. Questa idea di un asse gollista Parigi-Berlino-Mosca, e l’affermazione secondo cui la Russia, l’Unione Sovietica, all’epoca, è europea, si rivela nel tempo sempre più giusta.
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Ci sono sempre discussioni in Francia, sull’appartenenza della Russia all’Europa. Molte persone, sapendo poco o male della Russia, mi chiedono di questa frontiera gollista che sarebbero gli Urali. Gli Urali, confine geografico tra Europa e Asia, sono davvero un confine, nel cuore della Russia o dell’Europa? I popoli che possiamo incontrare al di là degli Urali sono diversi dai popoli della parte occidentale della Russia? Queste domande possono forse far sorridere chiunque nel paese, ma non sono inventate e, a mio avviso, sono comprensibili sia l’errore semantico del generale de Gaulle che la relativa ignoranza della Russia di oggi.

Poiché vivo in Russia, posso solo confermare quello che ho pensato prima di venire, e cioè che la Russia è un paese molto europeo. Molto europea, come la natura della maggioranza del suo popolo, gli slavi ortodossi, o come il suo patrimonio culturale dominante, l’eredità di Roma e Atene. Questo aspetto della Russia europea è presente in tutto il territorio, sia a Mosca che nel cuore della Siberia fino a Vladivostok, sulla costa del Pacifico, nel Caucaso o nella Carelia settentrionale. Anche l’orientale Kazan non è meno europea di Sarajevo. Tuttavia si deve ammettere, la Russia non è un paese come gli altri paesi dell’Europa. Per le sue dimensioni, le molte nazionalità, la sua estensione geografica fino all’Asia e al Pacifico, la Russia è un impero, un colosso la cui spina dorsale è certamente europea, ma alcune vertebre a volte sono asiatiche o tartare, a volte musulmane o buddiste. Infatti, ho spesso detto ai miei amici francesi che ci sono molte lezioni da prendere dalla Russia nella gestione del “modello multiculturale“, che l’Europa stenta a creare.

Oggi, anche se la Russia e la NATO discutono della creazione di un’architettura di sicurezza nell’emisfero settentrionale, da Vancouver a Vladivostok, le differenze persistono. Gli Stati Uniti, attraverso la NATO estesa sull’Europa occidentale e orientale, stanno entrando nel continente eurasiatico, teatro ritenuto essenziale per la gestione degli affari del mondo. La Russia è un membro dell’Organizzazione della Cooperazione di Shanghai, spesso descritta come la NATO asiatica, che vorrebbe coinvolgere l’Europa in una nuova architettura di sicurezza continentale complementare. In questo senso, le proposte russe per creare un’architettura di sicurezza continentale e un comune mercato economico unico da Lisbona a Vladivostok sono sia visionarie che totalmente golliste.

L’unica differenza è che lo slancio politico viene ora da Mosca, non da Parigi come 40 anni fa. C’è probabilmente una ragione, da Mosca, l’Europa s’estende per oltre 4000 km a ovest, verso l’Atlantico, e si trova a circa 6500 km, attraverso la Siberia, dal Pacifico. Il centro di gravità politico dell’Europa si è appena trasferito a est. L’alleanza Parigi-Berlino-Mosca consentirà agli Europei, che non sono stati in grado di costruire dal 1945 una vera autonomia politica e militare, di non rimanere bloccati in camicia di forza unilaterale della NATO e di offrire uno sbocco su regioni così importanti quali saranno, nel mondo multipolare di domani, il Caucaso, l’Asia centrale e l’Asia-Pacifico. E se dopo Parigi ieri e Bruxelles oggi, Mosca domani divenisse la capitale dell’Europa?

Moscou capitale de l’Europe

Cet article à été publié initialement sur Ria Novosti
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Presque tous les Français sont profondément europhiles, c’est assez paradoxal car les étrangers qui vont en France sont souvent frappés par leur relative fermeture d’esprit, leur méconnaissance des langues étrangères et leur chauvinisme souvent excessif.

Pourtant les Français sont à l’origine de la première tentative de construction européenne, puisque au 9e siècle, Charlemagne, empereur de l’Occident, est à la fin de son règne à la tête d’un empire continental qui comprend la France actuelle, une partie de l’Espagne et de l’Italie, ainsi qu’une partie du monde germanique et des Balkans. Pour de nombreux intellectuels et historiens, Charlemagne est le père de l’Europe. Malheureusement ou heureusement pour l’Europe, après sa mort, son empire sera démembré. La seconde tentative française pour faire l’Europe est celle de Napoléon, ce dernier s’imaginant contrôler un immense territoire, continental, allant de la Corse à Moscou. On sait bien, surtout en Russie, comment cette tentative corse de construire l’Europe par les armes échoua en 1812 face à la résistance du peuple russe et un hiver effroyable.Après la Seconde guerre mondiale, l’Europe se retrouve divisée en deux blocs, un bloc américain, transatlantique, et un pôle soviétique, continental. A l’Ouest, l’Europe se construisit avec l’argent américain du plan Marshall, en contrepartie d’une intégration à l’Otan, une alliance militaire d’obédience américaine, créée en 1949 et destinée à prévenir toute volonté impérialiste de l’Union soviétique.
En 1955, les pays d’Europe de l’Est, sous domination soviétique, sont eux incorporés au pacte de Varsovie, une alliance militaire créée en réaction à l’Otan. L’europhilie française se manifeste de nouveau lorsqu’en 1967 le général de Gaulle fait sortir son pays de l’Otan et lui donne accès à la puissance nucléaire. Tournant le dos au monde anglo-saxon, ce dernier affirme son projet visionnaire d’Europe continentale, gomme le provisoire rideau de fer et prône le rapprochement  historique avec l’Allemagne, puis la Russie, dans le cadre d’une Europe continentale de l’Atlantique à l’Oural. En 1960, Paris se positionne donc comme capitale politique et la France amorce une nouvelle tentative de créer l’Europe. Cette idée gaullienne d’un axe Paris-Berlin-Moscou, et cette affirmation que la Russie, Union soviétique à l’époque, est européenne, se révèle avec le temps de plus en plus juste.Il y a toujours des discussions en France sur l’appartenance de la Russie à l’Europe. Nombreux sont ceux qui, connaissant peu ou mal la Russie, me questionnent sur cette frontière gaullienne que serait l’Oural. L’Oural, frontière géographique entre l’Europe et l’Asie, est-il vraiment une frontière au cœur de la Russie ou de l’Europe? Les peuples que l’on peut rencontrer au-delà de l’Oural seraient- ils différents des peuples de la partie ouest de la Russie? Ces questions peuvent sans doute faire sourire quiconque connaît le pays, mais elles ne sont pourtant pas inventées et à mon sens compréhensibles tant par l’erreur sémantique du général de Gaulle que par la relative méconnaissance de la Russie d’aujourd’hui.

Depuis que j’habite en Russie, je ne peux que confirmer ce que je pensais avant de venir, à savoir que la Russie est un pays très européen. Très européen que ce soit par la nature même de son peuple majoritaire, les slaves orthodoxes, ou encore par son héritage culturel dominant, l’héritage de Rome et d’Athènes. Cet aspect européen de la Russie est présent sur tout le territoire, que ce soit à Moscou, au cœur de la Sibérie, à Vladivostok sur la côte pacifique, dans le Caucase ou encore dans le Nord de la Carélie. Même Kazan l’orientale ne fait pas moins européenne que Sarajevo. Cependant il faut bien le reconnaître, la Russie n’est pas un pays comme les autres pays d’Europe. Par sa taille, la multitude de peuples qu’il comprend, sa géographie étalée vers l’Asie et le Pacifique, la Russie est un empire, un colosse dont la colonne vertébrale est certes européenne mais dont certaines vertèbres sont tantôt asiatiques ou tatares, tantôt musulmanes ou bouddhistes. J’ai d’ailleurs souvent dit à mes amis français que l’on avait beaucoup de leçons à prendre de la Russie quant à la gestion du “modèle multiculturel” que l’Europe peine tant à établir.

Aujourd’hui, si la Russie et l’Otan discutent la création d’une architecture de sécurité de l’hémisphère nord, allant de Vancouver à Vladivostok, des divergences persistent. Les Etats-Unis, via un Otan étendu à l’Europe de l’Ouest et de l’Est, pénètrent le continent eurasien, théâtre d’opération jugé essentiel pour la gestion des affaires du monde. La Russie qui est membre de l’Organisation de la coopération de Shanghai, souvent qualifiée d’Otan asiatique, souhaite, elle, associer l’Europe à une nouvelle architecture continentale de sécurité, complémentaire. En ce sens, les propositions russes de création d’une architecture continentale de sécurité et d’un marché commun économique unique de Lisbonne à Vladivostok sont tout autant visionnaires que totalement gaulliennes.

La seule différence est que l’impulsion politique désormais vient de Moscou, et non plus de Paris comme il y a 40 ans. Il y a sans doute une raison à cela, de Moscou, l’Europe s’étend à l’ouest sur 4.000 kilomètres, jusqu’à l’Atlantique, et à l’est sur 6.500 kilomètres, à travers la Sibérie et jusqu’au bord du Pacifique. Le centre de gravité politique de l’Europe s’est simplement déplacé vers l’est. L’alliance Paris-Berlin-Moscou permettrait aux Européens, qui n’ont pas pu se doter après 1945 d’une réelle autonomie politique et militaire, de ne pas rester enfermés dans le carcan unilatéral de l’Otan et de s’offrir un débouché sur des régions aussi importantes que seront, dans le monde multipolaire de demain, le Caucase, l’Asie centrale et l’Asie-Pacifique. Et si, après Paris hier et Bruxelles aujourd’hui, Moscou devenait demain la capitale de l’Europe ?

Moscow as a would be capital of Europe

 

Almost every French man is a staunch Europhile, which is quite paradoxical in fact — most part of foreigners, visiting France are often stricken by their relatively narrow views, lack of foreign languages knowledge and their (at times excessive) chauvinism. Nevertheless, it were the Frenchmen who backed up the first attempt of European integration. By the end of his rule in the 9th century Carl the Great, Emperor of the West reigned over the continental empire that included contemporary France, parts of Spain and Italy, German territories and the Balkans. For many intellectuals and historians Carl the Great is the founding father of today’s Europe. Fortunately for Europe or not, but after his death the empire was disbanded. Second French attempt to create united Europe belonged to Napoleon — he hoped to control vast territory, stretching from Corsica to Moscow. It is well-known (in Russia especially) that this armed attempt to unite the continent by the power of arms failed in 1812, having met fierce resistance of Russians and the terribly cold winter.

 

After the Second World War, Europe fetched itself divided into two blocs — American trans-Atlantic bloc and the Soviet continental one. Western Europe was restored for American Marshall Plan funds in exchange for NATO integration, which was a U. S.-controlled military alliance found in 1949 and intended to prevent any imperial aspirations of the Soviet Union. In 1955 countries of the Eastern Europe, being under the Soviet auspice, entered the Warsaw Treaty, yet another military alliance, created as the NATO counterpoise. French Europhilia made itself visible once again in 1967, when General De Gaulle withdrew his country from the NATO and gave it an access to the nuclear energy.Turning his back to the Anglo-Saxon world, De Gaulle maintained his farseeing project of continental Europe, temporarily tore down the iron curtain and stood up for the historical proximity with Germany and Russia within the framework of continental Europe stretching from Atlantics to the Ural Mountains. In 1960 Paris established itself as a political capital and France undertaken yet another attempt to re-create Europe.

 

This Gaullist idea of Paris-Berlin-Moscow axis and the concept of Russia (Soviet Union at that time) being a part of Europe tended to turn fairer as the time went by.There have always been discussions whether Russia really belongs to Europe in France. Many people, poorly knowing Russia or not knowing it at all, were asking me about this Gaullist border, which the Ural Mountains might have been. They asked if the Ural — border line between Europe and Asia — really was a border right in the heart of Russia or Europe. And are the people living over the Ural Mountains really different from those, living in its western part? These questions may undoubtedly cause a smile on the faces of those who know the country but they are not make-believe. In my opinion, semantic mistake of General De Gaulle and the relative lack of knowledge about Russia among the common Europeans make this quite understandable.Since I live in Russia, I can only confirm that before my arrival I considered it to be a completely European country — so to say, European in its essence, be it the mentality of its citizens (Orthodox Slavs) or the dominating cultural legacy of Rome and Athens. This European tint is present all along its territory — from Moscow to the heart of Siberia, in Vladivostok, at the Pacific coast, in the Caucasus and Northern Karelia. Even Kazan with its eastern culture is not less European than, say, Sarajevo.But I have to admit that Russia is not like the rest of European countries. Sheer size, variety of nations inhabiting it, territories stretching to Asia and Pacific Ocean — Russia is an empire, colossus, which spine is European but certain vertebrae may be Asian, Tatar, Muslim or even Buddhist. I often tell French friends of mine that we have a lot to learn from Russia in the field of “multi-cultural model” that Europe is trying to establish with such great efforts.

 

Today, while Russia and NATO discuss the creation of security architecture in the Northern hemisphere, stretching from Vancouver to Vladivostok, the discords remain. Via NATO, which extended itself up to the Eastern- and Western-European borders, the United States infiltrated the Eurasian continent — theater of war that is considered to be vitally important for orchestrating the world politics. Russia, being a member of Shanghai Treaty Organization, often called the Asian NATO is willing to attract Europe into new additional continental security system. In that sense, Russian initiatives on creation of continental security structure and a common integral economic space from Lisbon to Vladivostok are every bit as Gaullist as they are farsighted.The only difference is that this time political impulse comes from Moscow, rather than from Paris like 40 years ago. There’s a certain reason for that: gauging from Moscow, Europe stretches 4.000 km to the Atlantic and 6.500 km to the East, through Siberia to the Pacific Coast. European political centre of gravity just shifted to the East. Paris-Berlin-Moscow alliance would have allowed Europeans — who failed to gain real political and military autonomy after the 1945 — not to get stuck in the unilateral NATO ties and to obtain an exit to the utmost important regions of tomorrow: Caucasus, Central Asia and Asian-Pacific region.

In the past Paris was the capital of Europe, today it is Brussels — what if Moscow to become one in future?